L’école a fait de moi ce que je suis – Charles Ndongo

Charles P Ndongo2 Charles Ndongo

Sat, 2 Jul 2016 Source: cameroun-online.com

Quels souvenirs gardez-vous de l’Ecole de Journalisme ?

Vous me demandez là d’écrire tout un roman lorsque vous me demandez d’évoquer les souvenirs d’une formation qui nous a modelés. Ils sont innombrables ces souvenirs.

Je vais commencer par le concours qui était très sélectif, je crois qu’il y est resté mais à notre temps il était encore beaucoup plus sélectif.

Je crois que nous étions près de 600 pour une quinzaine de candidats camerounais choisis à la fin avec comme major un certain Alain Belibi qui est toujours aussi brillant aujourd’hui sur le terrain.

Moi modestement, j’étais troisième et aussi quelqu’un avec qui j’ai gardé de très bonnes relations amicales qui était ex éco j’ai nommé Jacqueline Abena Ndomo que j’aimerais revoir car je ne sais pas ce qu’elle est devenue aujourd’hui.

Parmi les Camerounais nous avions une seule fille puisque nous étions jeunes à l’époque, il s’agit de Denise Epote.

Nous avons passé trois années magnifiques très studieuses avec des temps forts notamment ce voyage que nous avons effectué du côté de Monatélé et aussi des stages post cursus que nous avons effectué en France, au Canada en Amérique du Nord.

D’une manière générale, j’ai été marqué par mon séjour dans une ville du nord du Canada qu’on appelait Cetile. Il faisait froid là-bas à moins de 10 degré.

Je sais qu’Adamou Moussa qui faisait partie de la promotion a connu des conditions climatiques encore plus rudes en étant à Sougoulouk du côté des esquimaux où il était à moins 40 degré.

On le reconnaissait à peine dans ses vêtements d’hiver entièrement couvert comme les esquimaux.

Bref, il y a plein de choses et je passe rapidement sur la formation elle-même qui nous a beaucoup marquée parce que nous étions partis de très loin quand je vois le chemin parcouru mais je dis vraiment on doit une fière chandelle à tous ceux qui nous ont formés.

Qu’est-ce que cette école a apporté à votre carrière?

Ce que l’Esijy a apporté est d’abord le socle de formation très solide avec de très grands maîtres comme celui à qui je vais rendre hommage, Henri Bandolo qui nous a toujours marqué par son professionnalisme, par sa stature professionnelle.

Il y avait également des gens extrêmement rigoureux en l’occurrence un togolais qui s’appelait Patssou qui faisait preuve de rigueur. Je me souviens qu’il insistait sur la ponctuation et les accents ; mes copies étaient toujours couvertes de rouge.

Il ne laissait rien passer. Il y avait aussi des coopérants français, Richard Haver, Monsieur Lolo et Jean Julius qui étaient aussi extrêmement rigoureux. Ils nous ont appris à être très humbles et à écouter toutes les observations qu’on nous faisait.

Le professeur Jacques Fame Ndongo qui est aujourd’hui ministre de l’Enseignement supérieur, je me souviens de cette phrase qu’il a toujours eu à prononcer à la fin de chacun de nos journaux parlés puisqu’on faisait des journaux en bloc, il disait « prenez bien notes de toutes les observations les unes aussi pertinentes que les autres que vos camarades viennent de vous faire ».

Je crois que c’est une phrase qui m’a accompagné non seulement quand j’étais à l’école mais depuis que je suis sur le terrain. Donc la base c’est à l’Esijy que je l’ai acquise et je crois que c’est la même chose pour tous mes condisciples.

Je sors de l’Esijy en juin-juillet 1981 avec, je vous cite de mémoire, Alain Belibi qui est plus proche de moi, Michel Ndjock Abanda, Dénise Epote, Adamou Moussa, Thomas Babi Koussana, Emmanuel Monyambock et bien d’autres ; que ceux que j’oublie me pardonne ma mémoire commence à faiblir. Nous commençons à travailler.

Nous nous faisons remarquer pour certains d’entre nous dès les années de stage. En première année nous avons passé notre stage en presse écrite dans un journal qu’on appelait le Perroquet à l’époque.

C’était l’un des premiers titres de la presse privée très mordante et très rude qui était tenu dans l’ombre par de grandes plumes puis nous nous retrouvons à la radio dès la deuxième année.

Nous nous sommes attirés de la sympathie, une certaine considération et un certain respect aussi. Nous faisons remarquer et il y a eu une certaine pression pour qu’on nous retienne.

Et très rapidement, on nous confie des responsabilités car je me souviens qu’à peine sortie de l’école je présentais déjà le journal au côté de quelques icônes comme Jean Claude Ottou, Antoine Marie Ngono avec qui j’ai présenté mon premier journal, feu Michel Essang, Jean Vincent Tchieneyom qui m’a beaucoup marqué par son encadrement, sa rigueur et sa stature professionnelle.

Je reste donc à la radio de 81 à 85 quand on lance la télévision. Pour relever encore un souvenir à la radio, le comice agropastoral de décembre 1984 là où je couvre pour la première fois une sortie présidentielle de ma carrière avec Alain Belibi, Antoine Marie Ngono, avec d’autres aînés comme André NguidiBawondo, ensuite il y a eu le congrès de la naissance du Rdpc qui a aussi marqué le lancement de la télévision en mars 85.

Je rejoins donc l’équipe de la télévision en juillet 85 et je présente mon premier journal le 9 août de la même année, trois jours avant l’arrivée du Pape Jean Paul 2 au Cameroun.

A la télévision, j’ai été tour à tour rédacteur en chef adjoint, attaché à la direction générale, rédacteur en chef plein de langue française, chef de la brigade puis directeur de la brigade des reportages spéciaux pendant plus de 20 ans. Depuis le 14 novembre 2005 Directeur de l’Information (DI) Tv.

Maintenant vous êtes DI à la télé, Alain Belibi est DI à la Radio, Dénise Epote à TV5, Michel Ndjock Abanda à la Présidence…Vous avez tous réussi.

Les quatre que vous venez de citer sont restés eux-mêmes c'est-à-dire modestes, journalistes dans l’âme. A l’antenne nous sommes en représentation. Alors nous devons donner ce que nous avons de meilleur.

Quand vous suivez Alain Belibi dans signe des temps, c’est un homme sérieux. Moi quand je suis sur le plateau de télévision ou lorsque j’interviewe le Chef de l’Etat, ce n’est pas là où je fais le mariole. Nous sommes très liés les uns aux autres.

Quel type de relation entretenez-vous avec l’Esstic?

Je suis resté très attaché car je continue, au regard de ma disponibilité, à me rendre utile vis-à-vis de cette école parce que je sais ce que je lui dois. Je participe à l’encadrement de la jeune génération.

L’Esstic est toujours restée pour moi un miroir de notre parcours, évolution et performance. C’est toujours bien quand on me dit « monsieur, l’autre jour vous avez fait quelque chose pourtant ce n’est pas ce que vous nous apprenez à l’école ».

Alors il me revient de répondre en disant l’école c’est la norme. Mais ce que nous faisons sur le terrain est une évolution par rapport à la norme. Nous sommes dans un cadre bien précis à la Crtv.

C’est un instrument de l’Etat, c’est le véhicule privilégié du message gouvernemental, donc il n y a pas que des considérations professionnelles qui prévalent.

Il faut tenir compte de l’environnement, du rapport de force disons les choses telles qu’elles sont parce que nous n’avons pas la pleine maîtrise des choses pour parler des évènements sérieux et sensibles comme les attaques de Boko Haram.

Il faut comprendre qu’il n’y a pas que des considérations professionnelles. Ce sont quand même des vies d’hommes, l’intégrité territoriale qui est en jeu. Ce sont nos soldats qui sont engagés.

C’est le président de la République lui-même qui a pris un certain nombre d’engagements vis-à-vis de l’opinion publique, il faut tenir compte de tous ces repères.

Je ne dirai pas qu’on est loin de la seule norme, mais il faut tenir compte de tous ces éléments.

Quels conseils pouvez-vous donner aux étudiants de l’Esstic ?

Moi, très modestement je leur dis qu’il faut d’abord s’appliquer à maîtriser la technique professionnelle, vraiment c’est la base. Mon maître Henri Bandolo me disait : « personne ne vous prendra au sérieux si vous n’êtes pas sérieux vous-mêmes ».

Vérifier les informations et avoir une bonne connaissance de la langue à défaut d’avoir la maîtrise puisque le français et l’anglais sont les langues d’emprunt.

C’est pour avoir moins de fautes dans vos textes et dans votre langage.

Et aussi il faut vous cultiver en lisant les classiques et la vie des grands hommes, sources d’inspiration. On n’arrête pas d’apprendre.

Source: cameroun-online.com