Environ six mois après son début, la crise anglophone ne semble pas complètement refermée. Si les mesures (rétablissement d’internet au Sud-Ouest et au Nord-Ouest, création d’une section de la Common Law à l’Ecole Normale d’administration et de magistrature ; redéploiement des magistrats en tenant compte des critères linguistiques ; l’augmentation des effectifs des magistrats anglophones au sein de la Cour suprême etc.) favorisent un certain apaisement, quelques querelles se font encore entendre.
Notamment chez les avocats. C’est la raison pour laquelle Intégration du 24 avril titre que « La crise anglophone déchire le Barreau ». Au centre de cette affaire, « l’annonce par Maître Jackson Ngnie Kamga (la bâtonnier ndlr) de l’arrêt de la grève des avocats anglophones et la reprise des activités de défense et d’assistance des citoyens dès le 2 mai 2017 dans les tribunaux de la partie anglophone du pays », dit le journal.
Cette annonce faite début avril, a suscité la controverse chez certains avocats anglophones. Si certains n’y trouvent pas d’inconvénients, d’autres estiment qu’il y a des préalables avant toute reprise du travail. Le cas de Ruth Leyuga, avocate au Sud-ouest. «Nous sommes prêts à travailler, mais il faut que nos collègues soient libérés», a expliqué récemment expliqué à la BBC, cette membre de la Fako Lawyers Association (FAKLA). Elle fait notamment allusion à Me Felix Nkongho Agbor Balla interpellé en octobre 2016 alors qu’il faisait partie des avocats manifestant pour de meilleures conditions de travail.
Plus durs encore, des membres de l’association des avocats du Sud-Ouest ont signé un communiqué dans lequel ils indiquent que le bâtonnier n’a pas compétence pour appeler à la fin d’une grève dont il n’est pas l’initiateur.
La réponse de l’ordre n’a pas tardé à tomber. «Tout communiqué de presse qui tendrait à méconnaitre ou à remettre en cause les pouvoirs du Conseil de l’Ordre et du Bâtonnier, d’où qu’il vienne, constitue un manquement aux dispositions de la loi organique et du règlement intérieur du barreau, et devrait être considéré comme tel, c’est-à-dire réputé non-écrit», déclare Me Philippe Memong, le secrétaire de l’Ordre des avocats du Cameroun.
Une réaction relative à la sortie d’un collectif d’avocats de la défense des leaders anglophones détenus dans le cadre de la crise anglophone. « A cette occasion, apprend-on, Me Muna (lequel se présente comme étant le porte-parole d’un collectif des avocats de la défense de Maîtres Felix Nkongho Agbor Balla et Abadem Walters, du Dr Fontem Neba et d’autres personnes mises en cause devant le Tribunal militaire de Yaoundé) et Me Assira ont donné un point de presse à Yaoundé pour dénoncer ‘‘le jeu’’ du bâtonnier », précise Intégration.
Mais pour Me Memong, «cette libération n’est pas incompatible avec la prise en compte du désir exprimé par la majorité des quelques huit cents avocats des régions du Sud-ouest et du Nord-ouest, de reprendre leurs activités, afin de donner au gouvernement, l’occasion de mettre en œuvre les mesures qu’il a annoncées. C’est pour tenir compte des intérêts de ses deux confrères en détention, et non pas de ceux de toutes les personnes poursuivies devant le Tribunal militaire, que le bâtonnier a mis en place un conclave de vingt avocats des régions du Sud-ouest et du Nord-Ouest. Nul ne peut contester au bâtonnier, le pouvoir légal et discrétionnaire qu’il a de créer un tel conclave auquel il conférerait des attributions consultatives, voire décisionnelles ».