«Alléger la surpopulation carcérale et créer de meilleures conditions de détention dans nos prisons». Des propos du ministre d’État chargé de la Justice (Minjustice), Laurent Esso, à l’ouverture de la traditionnelle réunion des cours d’appel a ont immédiatement été suivis d’effet.
De hauts magistrats des dix régions auxquels le garde des Sceaux avait associé des délégués régionaux de l’administration pénitentiaire ont proposé une batterie de mesures visant à décongestionner les geôles camerounaises.
Les participants aux assises tenues dans la capitale politique camerounaise ont logiquement proposé la construction de nouvelles prisons, et l’aménagement de celles existantes, l’équipement des salles d’audiences, la relecture de certaines dispositions du Code de procédure pénale génératrices de lenteurs judiciaires.
Il en va aussi de l’appropriation par les magistrats des dispositions du Code de procédure favorables à la liberté individuelle, notamment les poursuites libres, le prononcé des peines de privation de liberté avec sursis et la libération conditionnelle.
A l’issue des échanges, plusieurs recommandations ont été formulées. Il s’agit de la tenue à l’initiative des chefs de cours d’appel, de séminaires régionaux sur l’appropriation des dispositions du Code de procédure pénale, le règlement dans un délai raisonnable, des procédures pénales, la formation des greffiers de prisons pour une meilleure tenue des documents, le renforcement des moyens alloués au département de la justice, etc.
«La surpopulation carcérale qui semble bien être le corolaire des lenteurs administratives préoccupe au plus haut point les pouvoirs publics», a déclaré le Minjustice Laurent Esso, en rappelant que pour 17.000 places disponibles dans les prisons camerounaises, il y a plus de 26.000 détenus, prévenus, condamnés définitifs et contraignables.
Des chiffres encore plus étonnants ont été révélés au cours de cette rencontre. Le Cameroun compte 88 prisons crées dont 78 sont effectivement ouvertes.
De l’autre côté, 29 tribunaux de première instance, 12 de grande instance, 46 tribunaux de première et grande instance, 10 cours d’appel, un tribunal criminel spécial et une cours suprême. Soit au total, 99 juridictions qui statuent en matière pénale, et qui ont permis à un millier de magistrats de connaître plus de 50.000 affaires de cette nature.
Il parait donc clair, qu’il y a une forte disproportion entre le nombre de magistrats, le nombre de juridictions saisies, le nombre d’affaires pénales et les prisons ouvertes. Cette disproportion est une cause objective qui génère des lenteurs judiciaires et qui elles mêmes entraînent la surpopulation carcérale.
Préoccupations.
Les prisons ont été construites avec une capacité d’accueil que l’on ne peut pas modifier en fonction de l’accroissement du nombre de détenus. Celle de Kondengui à Yaoundé a une capacité d’accueil de 15.000 personnes. Dans les années 60, cela paraissait suffisant.
Mais, aujourd’hui, elle compte 4234 détenus. La situation est quasi identique à Douala. La prison de New Bell a été érigée à l’époque coloniale avec une capacité de 500 places. Des travaux d’aménagement ont été faits au fil des ans, augmentant le nombre de lits à 960. Mais, il y a 3150 détenus.
Les autres maisons d’arrêt du Cameroun connaissent les mêmes problèmes. Monatélé a 478 pensionnaires, pour 150 places disponibles. Maroua, sous les feus de Boko Haram, 1360 prisonniers se partagent tant bien que mal les 350 places disponibles. Alors qu’à Bafoussam, on dénombre 857 geôliers pour 600 places effectifs.
Actuellement, le gouvernement est en train de réaliser un programme de construction ou d’aménagement des infrastructures, pour décongestionner les prisons existantes.
C’est le cas des travaux de construction de la prison de Ngoma, sur la route de Douala-Bonepoupa dans le Littoral, où il est prévu 5000 places sur une superficie de 30 hectares, les prisons de Bali-Nyongha, Baham, Ngoumou, Bengbis, Ntui, BAngeum, Moundemba sont en cours, bien que certains d’entre eux soient arrêtés pour un complément de financement.
D’autres aménagements sont faits dans certaines prisons en vue du transfert des détenus. C’est le cas de Yoko et Tcholiré 2. De nouvelles maisons d’arrêt ont été créées à Mbankomo, Touboro, Bandjoun, Mendji, Tombel et Limbe. Il reste à régler les problèmes d’ordre budgétaire en vue du lancement des travaux.