La veuve du sous-préfet de Batibo brise son silence et fait des révélations

Marcel Namata Diteng Sous Prefet De Batibo Enleve Le sous-prefet de Batibo a été kidnappé et tué par les sécessionnistes

Mon, 2 Jul 2018 Source: journalducameroun.com

« Comment des individus ont-ils pu enlever mon mari aussi facilement ?». Ainsi s’est exprimée l’épouse du sous-préfet de Batibo annoncé mort par le gouvernement. Celle-ci peine encore à croire l’annonce liée au décès de son époux, aucune dépouille ne lui ayant été remise.

Rencontrée dans la maison qu’elle occupe avec ses neuf enfants à Yaoundé, Julienne Namata, ne semble « pas pressée de faire le deuil » de son mari, le sous-préfet de Batibo présumé mort en captivité. Malgré les cernes récentes sur son visage, et la tristesse qui se lit sur son visage, elle continue à espérer qu’il reviendra bientôt ; même si les nouvelles données par le gouvernement dans son plan d’assistance pour les régions anglophones laissent à entendre que cela est désormais impossible.

Le sous-préfet Namata Diteng a été enlevé le 11 février alors qu’il procédait aux dernières mises au point pour le défilé civil de la Fête de la jeunesse. Le gouvernement a annoncé sa mort sans en détailler les circonstances.

« Le ministre [en charge de l’Administration territoriale] m’a dit mercredi que c’est vrai. Il m’a demandé de prendre courage et d’être forte. Il m’a dit qu’ils ont retrouvé les six gars qui avaient enlevé mon mari et qu’ils ont avoué qu’ils l’avaient tué », raconte-t-elle à Journalducameroun.com au lendemain d’une visite au ministre Atanga Nji.

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Deux versions, point de preuves

« Je suis allée voir le ministre avec mon bel-oncle et ma belle-tante et nous lui avons demandé où se trouve le corps de mon mari. Il nous a dit de ne pas trop insister à demander des restes. Il nous a d’abord expliqué que les sécessionnistes tuent souvent des gens et jettent les corps dans l’eau. Il est donc possible que ça soit le cas de mon mari. Ensuite il a dit que mon mari a été enlevé par un gang qui l’a ensuite revendu à un autre groupe, puis il a été conduit quelque part au Nigeria ».

Le gouvernement a promis de soutenir la famille en leur fournissant un logement et en accompagnant l’insertion professionnelle des grands enfants de la maison. Le regret de Julienne Namata est d’avoir appris le décès de son époux par voie de presse.

Au courant de la situation, le gouvernement camerounais s’était bien gardé de lui transmettre l’information. Les seules informations que la famille de Namata Diteng recevait jusqu’ici de la part du gouvernement concernaient la poursuite des recherches.

Le 11 février 2018…

Julienne Namata n’a jamais résidé à temps plein dans la ville de Batibo durant les cinq mois que son époux y a passés. Elle était installée dans la capitale avec ses gamins du fait de l’insécurité régnante dans les deux régions anglophones. Mais le 11 février dernier, elle se trouvait aux côtés de son époux. Le pire est survenu…

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« Ce matin-là, j’étais à la maison. Mon mari et moi avons fini la prière matinale et je me suis rendue dans la cuisine pour entamer la cuisine pour la réception de l’après-défilé. Vers 7h du matin je suis rentrée dans la chambre pour lui demander de commencer à s’apprêter. J’ai trouvé que mon mari s’était remis à la prière. Je suis ressortie et je suis rentrée à la cuisine.

Vers 8h on a entendu des coups de feu. Je ne savais qui tirait parce qu’à l’approche d’un grand évènement comme celui-là, les sécessionnistes envoient des Sms d’intimidation aux populations et donc les militaires tirent souvent en l’air pour les dissuader. Je me suis donc dirigée dans la chambre pour demander à mon mari d’aller dire aux militaires d’arrêter de tirer sinon la population ne pourra pas venir au défilé. Quand j’entre dans la chambre je ne le trouve pas. Il n’est pas non plus dans les autres pièces de la maison », se souvient Julienne Namata.

Le sous-préfet était sorti de la concession en compagnie de son chauffeur. Il s’est rendu à la place des fêtes de Batibo où se tient habituellement la parade du 11 février. C’est là-bas que l’attaque qui a conduit à sa prise d’otage a eu lieu.

« Quelques instants après, le délégué de la Jeunesse est venu me dire qu’ils ont été attaqué à la Place des fêtes. Et je lui ai demandé où se trouve mon mari. Il m’a répondu que le lieutenant était parti avec lui. J’ai essayé d’appeler mon mari ainsi que son chauffeur et aucun d’eux ne répondait. Je me suis inquiétée. J’ai appelé le lieutenant qui m’a dit que mon mari s’est échappé avec son chauffeur. C’est ce qu’il a pensé or, il s’agissait de quatre gars qui kidnappaient mon mari. Il m’a expliqué que lorsqu’il est arrivé à la Place des fêtes, la voiture de mon mari partait déjà. Il se trouvait encore loin lorsqu’il a vu deux gars masqués dans la foule. Il a ouvert le feu et toute son attention s’est portée sur les deux individus », poursuit Julienne Namata.

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Namata Diteng a été conduit dans un endroit qui demeure inconnu mais son véhicule a été retrouvé incendié dans un village voisin.

« Comment ont-ils pu agir si facilement ? »

« Comment ces gars ont-ils pu enlever mon mari et repartir avec lui sans que personne ne puisse intervenir ? Comment ont-ils pu agir si facilement ? » S’interroge Julienne Namata dont le regard se met à briller à la pensée de ces évènements tragiques. Le sous –préfet avait instruit la mise en place d’un cordon de sécurité dès 5h du matin. Mais au moment où la Place des fêtes était attaquée, il ne s’y trouvait ni gendarmes, ni policiers, ni militaires.

« Je ne connaissais pas l’endroit mais je m’y suis rendue plus tard et là j’ai été étonnée. Un poste de police est situé à l’une des extrémités du stade. De même que la gendarmerie et un camp aménagé pour des militaires venus en renfort. Et aucun d’eux n’est intervenu pendant l’attaque. J’ai fait la rencontre d’une femme qui m’a confié s’être rendue à la gendarmerie pour les avertir que des individus armés étaient en train d’enlever le sous-préfet. Les gendarmes lui ont dit qu’ils ne partent pas là-bas. Ils ont fui », raconte Julienne Namata, le visage assombrit à l’évocation de ces tragiques évènements.

Source: journalducameroun.com