Les efforts déployés au Soudan pour empêcher qu'une jeune femme soit lapidée à mort, après avoir été reconnue coupable d'adultère, sont entravés par l'absence de ministres dans le pays.
Le Soudan est dirigé par une junte militaire depuis un coup d'État il y a un an.
Les activistes affirment que la jeune femme de 20 ans n'a pas bénéficié d'un procès équitable et devrait être libérée. Un représentant du gouvernement a reconnu que le procès était "une blague", mais a ajouté : "nous n'avons pas de ministre qui puisse intervenir pour demander sa libération."
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"Nous avons des raisons de croire qu'elle a été illégalement forcée par la police à signer des aveux", a indiqué Mossaad Mohamed Ali, directeur exécutif de l'African Centre for Justice and Peace Studies (ACJPS).
L'avocate de la femme, Intisar Abdala, a confié à la BBC qu'elle espérait qu'à la suite de l'appel, la cour "ferait ce qu'il faut" et libérerait sa cliente.
Le Soudan impose toujours la peine de mort pour certains crimes classés hudud - des infractions spécifiées par Allah dans le Coran, notamment le vol et l'adultère. En droit soudanais, ils sont passibles de peines telles que la flagellation, l'amputation des mains et des pieds, la pendaison et la lapidation.
Une promesse du gouvernement en 2015 de retirer la mort par lapidation comme forme de punition n'a jamais été suivie d'effet, selon les groupes de défense des droits de l'homme.
"Même les politiciens les plus conservateurs sont contre la lapidation", a raconté Sulaima Ishaq à la BBC. "Mais les choses mettent beaucoup de temps à changer ici, puis à se répercuter dans les tribunaux, et ce sont les femmes qui souffrent."
Hala Al-Karib, directrice régionale de l'Initiative stratégique pour les femmes de la Corne de l'Afrique (Siha), a déclaré que les lois soudanaises sur l'adultère étaient "appliquées de manière disproportionnée aux femmes".
"Les féministes et les groupes de défense des droits humains dans le pays ont des ressources minimales et il pourrait bien y avoir des centaines de cas dont nous n'avons pas connaissance."
Sous le gouvernement de transition qui a pris en charge le Soudan après le soulèvement contre le président Omar el-Béchir en 2019, une loi sur "l'ordre public" qui contrôlait la façon dont les femmes agissaient et s'habillaient en public a été abrogée. Cependant, la journaliste soudanaise Zeinab Mohammed Salih a rapporté que la "police de la moralité" qui avait l'habitude de patrouiller dans les rues et de faire respecter cette loi est revenue à la suite d'un coup d'État il y a un an.
Selon certaines informations, des fidèles de Bachir ont été réembauchés par la junte au pouvoir après le coup d'État.
"Nous espérions que le gouvernement de transition soudanais établirait des changements dans le cadre juridique du Soudan, qui continue à criminaliser ouvertement les femmes et les filles et à contribuer à leur subordination et à leur inégalité", a souligné Hala Al-Kirab. "Mais nous étions naïfs".
En 2021, le Soudan est également devenu signataire de la Convention des Nations unies contre la torture.
"Selon la Convention, la torture est définie comme le fait de causer à une personne une souffrance intentionnelle et intense", a indiqué Mossaad Mohamed Ali de l'ACJPS. "La lapidation est l'une des pires formes de torture".
Les ONG internationales et locales qui appellent à la libération de la femme ont également qualifié la peine de lapidation de "cruelle, inhumaine et dégradante".
L'avocat Intisar Abdala est la seule personne qui a été autorisée à rendre visite à la jeune femme de 20 ans, détenue depuis des mois dans une prison pour femmes dans l'État du Nil blanc.
"La jeune femme est en bonne santé physique, mais elle est très anxieuse, ce qui est compréhensible. Je ne peux pas en dire beaucoup plus en tant que femme avocate qui vit et travaille pour aider d'autres femmes dans une région conservatrice comme Kosti", a-t-elle précisé.
Elle a ajouté que la jeune femme était une "fille de la campagne ordinaire et simple, issue d'une famille d'agriculteurs très traditionnelle et religieuse" et que ses parents ne l'avaient pas abandonnée.
"Nous attendons un jugement de la cour d'appel, mais personne ne peut dire quand il sera rendu. L'attente est notre seule option."
La BBC s'est adressée au tribunal pénal de Kosti pour obtenir un commentaire, mais n'a pas reçu de réponse.
Il n'a pas été possible de demander une réponse officielle au ministre de la Justice, le poste n'étant pas pourvu.
"Nous sommes pleinement conscients de cette affaire et, pour autant que nous le sachions, il ne s'agit pas de la décision finale du tribunal. Nous avons contacté les autorités judiciaires du Soudan à ce sujet, et nous attendons leur réponse", a signalé un porte-parole de l'ambassade du Soudan à Londres.