Le Buzz, nouvel oxygène des médias

Par Raoul Christophe Bia

Félicitations à Info TV pour la qualité de son panel. Ce casting, dimanche dernier, a littéralement balayé la concurrence. Mais qui regarde encore une émission où un expert en économie vient décortiquer la Stratégie Nationale de Développement (SND30) ? Ce qui capte vraiment l'attention aujourd'hui, c'est le buzz.

Même Donald Trump l'a compris. Lors de son clash avec Zelensky, il n’a pas hésité à dire : "Sacré moment de télévision !". Voilà le type de contenu que les médias doivent diffuser pour survivre dans ce nouvel ordre mondial. Le public n’est plus intéressé par des débats bien policés où tout le monde est courtois. Ils veulent du sensationnel.

Les médias privés camerounais, eux, se plaignent de l'absence d'annonceurs, de sponsors ou de mécènes. Mais quel investisseur placerait de la publicité dans une émission où tout le monde est parfaitement poli ? Pour des affiches comme celle d'Info TV, il faudrait au moins trois pauses publicitaires pour rentabiliser. La télévision a changé. C'est une époque où les journalistes n'ont plus le luxe de travailler sans télécommande. Les temps ont bien changé.

Je respecte les légendes du métier qui ont exercé à une époque où personne ne zappait, mais aujourd'hui, être diplômé de l'ESSTIC ou avoir une belle plume ne suffit plus. Ces journalistes se retrouvent à négocier des arachides grillées au Hilton lors de colloques auxquels leur média n'était même pas invité. Ils connaissent toutes les règles de déontologie, mais sont incapables de rivaliser avec des figures comme Rodrigue Tongué, Cédrick Noufele ou Parfait Ayissi. Qui peut les respecter dans un tel contexte, alors que l’internet et le nouvel ordre médiatique ont redéfini les règles du jeu ?

Aujourd'hui, nous devons composer avec les influenceurs, blogueurs et lanceurs d'alertes qui attirent plus de publicités que les médias classiques. Fox News diffuse des heures entières sur la propagande pro-Trump, LCI critique Poutine toute une journée. C'est ainsi que fonctionnent les médias aujourd'hui. Ils assument leur positionnement politique et idéologique.

Bravo à Info TV qui a compris comment tirer son épingle du jeu dans ce nouveau paradigme médiatique. Pendant que certains courent après des likes sur Facebook pour attirer l’attention, les rédactions sont confrontées à des factures de plus en plus lourdes et des journalistes manquent de moyens pour se déplacer sur le terrain.

Nous assumons pleinement ce journalisme de sensation, de propagande et d'opinion. Aux novices de ce métier, sachez que le journalisme sensationnel existe bel et bien. Regardez Fox News, C-News ou encore "Le Petit Journal" de Yann Barthès. Ces médias mainstream ont adopté ce format et le revendiquent fièrement. Le journalisme évolue, et avec lui, notre manière de raconter les faits. Ce n'est plus seulement ce qui est vu ou entendu, mais aussi ce qui est ressenti.

Hier, on rapportait les faits. Aujourd'hui, on les commente. C'est le nouveau visage des médias.