L’homme politique, Paul Biya, a dévoilé sa vidéo de campagne au nom du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC). Premier constat, il n’y a pas eu de grand travail d’experts de l’audiovisuel. Le camp du président sortant s’est juste contenté du peu, une vidéo qui est même loin des standards ordinaires et du niveau affiché par le parti d’Issa Tchiroma Bakary ou encore de Bello Bouba Maigari. À quoi cela est-il dû ? La présidence d’Etoudi s’est-elle finalement convaincue qu’il ne fallait plus dépenser assez d’argent pour gagner l’élection ou l’essentiel est-il ailleurs. Le média Le Figaro s’est penché sur la question.
« Grandeur et espérance » : la vidéo de campagne lunaire de Paul Biya, 92 ans, président sortant du Cameroun, tel a été le titre choisi par ce journal quotidien de la presse nationale française. Camille Aguilé, auteur de l’article, met les carences de cette production en avant. Notre rédaction vous propose de découvrir son travail en intégralité.
Le président camerounais Paul Biya a publié samedi 27 septembre sur X une vidéo qui semble en grande partie générée par intelligence artificielle dans le cadre de sa campagne à sa propre succession.
« Nous avons bâti une nation libre, souveraine et unie avec des réalisations palpables », affirme une voix d’homme robotique alors que s’enchaînent les plans du littoral camerounais et de l’emblématique rond-point « J’aime mon pays le Cameroun » de Yaoundé. Ainsi commence l’étrange vidéo de campagne publiée par le président sortant Paul Biya, candidat à l’élection présidentielle du 12 octobre.
La pastille de 30 secondes disponible sur le compte X du chef d’État paraît au premier abord classique, si ce n’est cette voix surfaite qui articule à outrance chaque syllabe et semble tout droit sortie d’un spot publicitaire. Soudain, une première image visiblement générée par IA apparaît : un homme et une femme en gilet orange et casque de chantier débattent devant un plan, alors qu’une pelleteuse œuvre à l’arrière pour étaler le goudron d’une route fraîchement construite.
« Nos efforts sont contrariés par des épreuves multiples », poursuit la voix tandis que la vidéo montre une nouvelle image artificielle d’une femme et d’un enfant terrifiés se serrant dans les bras sur fond de voitures brûlées et d’hommes armés. « Grâce à l’expérience d’un homme et aux sacrifices des Camerounais, nous avons su préserver l’essentiel », rassure toutefois la voix. Paul Biya apparaît, signant un document qui semble déclencher l’intervention des forces armées camerounaises pour secourir la femme et l’enfant à l’aide d’un hélicoptère.
« Maintenir la paix et l’unité »
La vidéo de campagne du président est ponctuée d’autres plans d’IA saugrenus, parfois incompréhensibles comme celui d’un mur qui s’effondre en partie sur un ordinateur ou celui d’une même femme qui apparaît tour à tour devant une serre agricole, aux côtés de scientifiques, puis agitant le drapeau camerounais devant une large assemblée.
« Maintenir la paix et l’unité, offrir à notre jeunesse des opportunités durables, renforcer l’inclusion socioéconomique de la femme et assurer sa protection reste notre engagement », conclut la voix. La rapide succession d’images de drones et de plans générés par IA s’achève avec un lion marchant dans la savane, puis par une photo de Paul Biya souriant, en costume bleu, accompagnée du slogan « Grandeur et espérance ».
Pouvoir autoritaire
L’homme de 92 ans a manifestement fait le choix de l’intelligence artificielle pour faire l’éloge de son bilan et rajeunir son image. Le président nonagénaire et au pouvoir depuis 43 ans a annoncé fin juillet briguer un huitième mandat. Sa fille unique Brenda Biya a appelé sur son compte TikTok à ne pas voter pour son père, affirmant que le chef d’État « fait souffrir beaucoup de gens, y compris sa famille ».
Pourtant, la victoire de Paul Biya ne fait que peu de doute. L’organisation Human Rights Watch a exprimé « des inquiétudes quant à la crédibilité du processus électoral » et son principal opposant Maurice Kamto a été exclu de la course électorale début août par une décision du Conseil constitutionnel. Le pouvoir camerounais, qualifié d’autoritaire, est régulièrement la cible des critiques de l’ONG Amnesty International en raison d’atteintes aux libertés fondamentales et de violations des droits de l’homme.