Makepe Missoke, ce mercredi 8 Juillet 2015. Il est environ 16 heures. Assises sur le site où reposait leur résidence détruite par la Communauté Urbaine de Douala, deux dames ont les yeux remplis de larmes. Du regard, elles semblent maudire le bulldozer qui a permis d’effectuer ce sale boulot, encore stationné au milieu des ruines.
Pour la troisième journée consécutive, cet engin a été sans pitié pour des constructions situées près des drains qui traversent ce quartier situé dans l’arrondissement de Douala 5ème, régulièrement victime des inondations.
Comme les jours précédents, ceux qui n’ont pas pris au sérieux les menaces de Fritz Ntonè Ntonè en ont eu pour leur compte. « Je pleure le sort de ce monsieur qui n’a rien pu récupérer. Il pouvait au moins enlever ses tôles et ses lattes avant le passage de l’engin… »
Regrette un riverain pointant les restes d’une maison désormais rayée de la carte. La surface déjà dégagée s’étend sur plusieurs centaines de mètres. Jonchée de tas de fer, tôles, lattes, parpaings et autres objets laissés par les déguerpis, elle est noire de monde.
En plus des propriétaires qui cherchent à récupérer quelques biens encore utilisables, plusieurs opportunistes ont pris d’assaut cet espace. Ils amassent des objets abandonnés (tôles, fer, bois) qu’ils iront certainement commercialiser.
Quelques agents communaux, reconnaissables à travers leurs chasubles de couleur verte font des navettes sur le site. Les populations ont du mal à les regarder dans les yeux. Des groupuscules parfois constitués des victimes qui se lamentent et se consolent mutuellement se sont formés ça et là.
Non loin du pont qui relie les deux rives du cours d’eau, des camions se succèdent pour transporter des effets importants. Lits, matelas, frigos, ventilateurs, téléviseurs, canapés, réchauds, bouteilles à gaz… sont emmenés chez des proches en attendant que leurs propriétaires trouvent de nouvelles solutions de logement.
Plusieurs autres riverains, encore épargnés mais qui, vue la position de leurs maisons, ne croient pas pouvoir échapper aux crocs des engins, rangent soigneusement leurs affaires. « On nous dit qu’à partir de demain, on pourra entamer la destruction des maisons situées au bord du drain des eaux issues des usines de la Guinness et de la Cicam. Cette fois là, je ne crois pas qu’ils puissent y échapper », indique un habitant de Makèpè Missoke.
L’opération de démolition engagée par la Communauté Urbaine de Douala pour libérer les emprises des cours d’eau et ainsi lutter contre les inondations, vise plus de 300 habitations des arrondissements de Douala 5ème et Douala 3ème apprend-on.
La décision de procéder à cette série de destruction avait été prise au lendemain des graves inondations qui avaient sinistré plus de 2000 familles à Douala, dans la nuit du vendredi 19 au samedi 20 juin 2015.
Après ces démolitions forcées, la CUD promet de curer et d’élargir ces lits d’eau généralement à l’origine des inondations. Débutées ce lundi ces démolitions forcées pourront se poursuivre jusqu’à la fin du mois de juillet. Des quartiers comme la Cité des Palmiers, Saint Thomas… seront également touchés.