Les derniers jours de Bapès avec la justice

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Sun, 14 Feb 2016 Source: Le Jour

Six jours avant sa mort, l’ancien ministre a procédé à un remboursement du corps du délit.

LouisBapès Le 6 novembre 2015, un mois après sa sortie du gouvernement (celle-ci est intervenue à la suite du remaniement ministériel du 2 octobre 2015, Ndlr), Louis Bapès Bapès se rend au Tribunal criminel spécial (Tcs), où il avait été convoqué quelques jours plus tôt. Le juge d’instruction, Annie Noëlle Bahounoui, lui notifie les conclusions de son enquête.

L’ancien ministre des Enseignements secondaires apprend ce jour-là qu’il est renvoyé en jugement pour un détournement de deniers publics de l’ordre de 550 millions FCfa. A cet instant, il se montre déterminé à se défendre. Il dit vouloir prouver son innocence. Certains de ses « proches » qui eux, sont restés dans l’appareil étatique, discutent avec lui d’une possibilité de remboursement du corps du délit qui lui est imputé. Il n’en est pas question, leur rétorque l’ancien ministre. « Je n’ai rien à me reprocher et je le prouverai devant la justice », balaie-t-il. A cette période-là, Louis Bapès Bapès est déjà physiquement affaibli.

Ses « amis » disent vouloir lui éviter un procès qui pourrait s’avérer insupportable et pénible avec le lot d’humiliations qui entourent ce genre de procédures judiciaires. Le 23 novembre 2015, l’état de santé de Louis Bapès Bapès se détériore. Il est admis à l’hôpital central de Yaoundé où il passe Noël. Entre autres maux, une anémie sévère lui est détectée. Il se confie à des « proches ». Sur son lit d’hôpital, ceux-ci lui reparle de l’éventualité de rembourser, si ce n’est en espèce, en nature. Une autre possibilité de restitution du corps du délit qu’offre la loi sur le Tcs.

« On verra », dit-il. Le 31 décembre 2015, Louis Bapès Bapès sort de l’hôpital. Le 4 janvier 2016, il est attendu chez Yap Abdou, le président du Tcs pour le dernier interrogatoire avant le début du procès prévu le 15 janvier 2016.

Mais Bapès Bapès qui a un repos médical de 21 jours ne pourra pas se présenter à la convocation du magistrat. Celui-ci est tenu informé de cela par les avocats de l’accusé. Dès ce moment, l’ouverture du procès programmé pour le 15 janvier 2016 paraissait peu probable. Le jour J effectivement, aucune partie ne se présente à l’audience. Le président du Tcs ayant pris la peine, quelques jours avant, d’annuler le rôle du Tcs sur lequel la date du 15 avait déjà été mentionnée.  

Jane Bapès

Sur insistance de son entourage, le 27 janvier 2016, l’ancien ministre de l’Enseignement technique et de la formation professionnelle finit par faire une offre de remboursement en nature. D’après nos sources au Tcs, il cède un terrain non bâti d’un hectare à Kribi (le titre foncier est immatriculé au nom de son épouse) et un terrain non bâti de 3000 mètres carrés situé dans la Mefou non loin de Yaoundé. La demande d’arrêt des poursuites est adressée à madame le procureur général près le Tcs, Justine Aimée Tchokonthieu.

Le dossier a ensuite été soumis au ministre de la Justice qui devait à son tour saisir le ministre des Domaines afin qu’une évaluation de ces propriétés foncières soit faite. D’après nos informations, des dispositions auraient été prises pour que cette procédure soit accélérée. « Les amis » de Louis Bapès Bapès auraient alors décidé de lui donner un coup de pouce afin qu’il puisse bénéficier de l’arrêt des poursuites sollicité.

L’offre de restitution en nature faite le 27 janvier venait alors s’ajouter aux 35 millions FCfa versés en espèces par Louis Bapès Bapès au Trésor public le 16 janvier 2016. L’ingénieur avait déjà fait les choux gras de la presse nationale et internationale lorsque le 31 mars 2015, il est placé en détention provisoire à la prison centrale de Yaoundé à Kondengui. Une information judiciaire avait par ailleurs été ouverte contre lui. L’opération Epervier s’était attaquée pour la première fois à un ministre en fonction. Le lendemain de son interpellation, en fin d’après-midi du 1er avril 2015, Bapès est remis en liberté.

Le 2 février 2016, à peine une semaine après avoir engagé une action de « remboursement complet » du corps du délit, Louis Bapès Bapès rechute. Il est à nouveau interné à l’hôpital central de Yaoundé. Dans la nuit du jeudi 4 février au vendredi 5 février 2016, l’ancien directeur général de la Mission d’aménagement et de gestion des zones industrielles (Magzi) décède. Il meurt sans savoir quel sort a été réservé à sa demande d’arrêt des poursuites.

Louis Bapès Bapès rejoint dans l’au-delà, Jane Bapès, sa dernière fille qui l’y avait précédé il y a une dizaine d’années.

Source: Le Jour