Dans la capitale économique camerounaise, trouver un espace ou « un coin » pour assouvir sa faim est un jeu d'enfant. Il devient de plus en plus aisé de faire un pas sans trouver un restaurant, un '"tourne-dos", une cafétéria ou un "beignetariat". Dans les quartiers populeux, comme dans les zones résidentielles, le secteur de la restauration semble bien se porter et n’échappe pas à des centaines voire des milliers de personnes qui les fréquentent. On les appelle ici les habitués du coin ou les « asso ».
Dans le centre ville de Douala, le beignet- haricot et le repas préparé son bon marché. Pour les taximan, ben skineurs, les fonctionnaires comme pour les étudiants, les petits plats mijotés, le poisson braisé, la volaille, les plantains, les prunes sont autant de repas à moins de 400 Fcfa. Ce sont souvent des femmes, mères de famille ou étudiantes en vacances qui se posent au bord des rues. Pour celles qui n’ont pas d’endroit fixe, elles transportent sur leur tête leur marchandise, longent la rue en servant à tour de rôle leurs clients et reviennent sur leur pas par le sens opposé.
Selon Marie Jeanne, l’une des vendeuses de riz que Camer.be a pu rencontrer à Douala, elle affirme pouvoir vendre son repas uniquement sur l’avenue de Liberté car elle est connue de tous les habitués.
Juste en face du Carrefour Soudanaise à Akwa, une petite esplanade accueille tous les jours de nombreux visiteurs pour se restaurer. M.T grille des prunes et des plantains, les retournant sur le feu avec les mains, comme son amie Suzanne, en préparant le poisson. Elles n'envisagent pas de vendre à un autre endroit qu'au bord de la route : "Les gens se déplacent, c'est là que nous avons les clients".
À côté, quelques femmes proposent des plats plus élaborés, avec du riz, de la viande, du manioc... Elles font attention à la présentation du plat devant le client, servant le tout à la cuillère, le riz étant conservé dans un grand sac en plastique, la viande et la sauce restant sur le feu. Par contre, l'eau de vaisselle est très rarement changée dans la journée, la couleur tournant rapidement au marron. Comme ces femmes, les marchands ambulants, proposant des fruits, des beignets ou des sandwichs aux œufs etc.
Au niveau du Rond point Deido, Moussa pousse sa charrette d’oranges, d’avocats, de papayes : "Je les achète au marché Mboppi, et je les lave avant de les mettre sur mon plateau".
Plus loin, à la montée Saker, on découvre les marchands de sandwiches qui enlèvent les coquilles des œufs tout en les écrasant avec les mains nues, sans se les laver. Les clients réguliers ici sont les conducteurs de moto taxis et les élèves.
A la Cité Cicam, juste en face de l’université de Douala, dans un tout autre genre, au restaurant K., Magni s'est confectionné un véritable petit restaurant de trottoir avec des poutres en bois, plusieurs cartons, une table et deux bancs. Elle affirme se lever tous les matins à 3h pour cuisiner des plats. Elle se rend sur son lieu de travail à l'aube avec ses marmites pleines. Évidemment, toute cette nourriture est préparée comme à la maison, c'est-à-dire sans protection supplémentaire. Magni montre tout de même sa bonne volonté : "Si on mange à 12h, le repas n'est peut-être plus très chaud, je peux le réchauffer. Et puis, je me lave les mains après chaque service".
Si Etienne, enseignant dans une institution universitaire de la ville préfère un restaurant chic situé à Bonanjo, Ferdinand, étudiant à l'université de Douala, se sent plus à l'aise dans le hangar à beignets de Asso, situé en face du stade de la Cité Cicam.
Si les restaurateurs de rue préservent les apparences, quelques exigences de la norme paraissent délicates à appliquer, comme la préservation de la température ou la distance par rapport aux zones polluées.
De même, peu d'entre eux connaissent vraiment l'origine des aliments qu'ils utilisent. Ils font leurs courses au marché... Mais sur ces marchés, le code est encore moins respecté, comme au marché Sandaga ou encore au marché de Bonassama. La viande rouge y est exposée à l'air libre, sur des tables, la boue par terre ne séchant pas. Les mouches tournent autour.
Au niveau de la délégation régionale du ministère du développement industriel et commercial (Mindic) un agent que nous avons contacté par téléphone et qui a requis l’anonymat affirme qu’un "code d'usages en matière d'hygiène pour la préparation, la cuisson et la vente des aliments sur les voies publiques au Cameroun" est en cours de préparation, ainsi que deux autres normes relatives à la restauration.
Nos autorités locales gagneraient à trouver un endroit propice et propre pour ces restaurateurs qui nourrissent des milliers des Doualaiens par jour suggère Martial Njomo, étudiant à l’université de Douala. Il est aussi souhaitable d’imposer les règles d’hygiène à ces tenanciers des restaurants car la qualité des repas est sujette à caution conclut t-il.