Lutte contre la vie chère : le gouvernement en peine et en panne

Des produits alimentaires

Wed, 6 Oct 2021 Source: L'Essentiel du Cameroun N°364

Cette vérité peut choquer, moins par ce qu’elle énonce que par ce qu’elle suggère ou révèle. Certains n’hésiteraient d’ailleurs pas à casser le thermomètre, pour ne pas avoir à affronter la réalité d’une température qui monte désespérément.

En fait, et quoi qu’on dise, en un mot comme en mille, et peu importe l’angle d’observation, il se fait chaque fois plus évident que le gouvernement ne peut contenir l’inflation, ni la vie chère; et il y a bien longtemps qu’il s’en est privé des moyens et de la volonté, en diluant l’objectif dans un enchevêtrement d’erreurs. On n’insistera pas ici, outre mesure, sur l’incohérence de la structure d’action gouvernementale sur la question.

Qu’il suffise d’observer les murs qui se dressent, autant que les ponts qui s’effondrent entre les parties prenantes ; l’on voit ainsi, par exemple, les départements en charge de la production tels, l’agriculture et l’élevage, totalement ignorés ou ignorants des exigences de la lutte contre la vie chère ; c’est à se demander si on les a jamais impliqués ou sollicités ; curieux quand-même !

Il y a ensuite, les caissiers obtus, notamment le ministère des Finances, arque bouté sur ses redevances, taxes et impôts, et peu enclin aux souplesses et assouplissements nécessaires à la négociation sur les prix, encore qu’il y participe faiblement ; il y a enfin l’ouvrier sacrificiel de l’ouvrage, le ministère du Commerce, qui, tout seul, dévoué et engagé, ne peut cependant faire plus que ce qu’il essaye déjà de faire. Pour autant, il ne cèderait rien d’une zone de confort dont il a littéralement arraisonné le jeu et les enjeux, pour nourrir sa propre inflation d’existence, dans une furie d’agir qui frise bien souvent le délire de surmédiatisation.

Dans la même foulée, et autre erreur; en ayant un impact zéro sur l’acquisition des produits à l’étranger, le transport, la douane, les impôts, les charges locatives et d’énergie, le ministère du Commerce est bien téméraire de se tenir à la queue de la chaine, avec pour unique arme, l’onction gouvernementale, pour essayer de contrôler les prix, sans bourse déliée. Les commerçants ont bien compris le jeu, qu’ils n’éprouvent plus aucune gêne à accompagner le gouvernement dans le glissement qui porte la lutte contre la vie chère du champ économique, vers les effusions patriotiques. Cette dernière évolution a le don de laisser chacun à sa bonne foi patriotique, prêt et prompt à tout signer des accords de commerce, mais libre de toute contrainte. Le cas échéant, on joue avec les contrôleurs sur la place des marchés, à partir des instruments de mesure pipés et des étiquettes de prix à deux faces.

Plus vicieux est aujourd’hui le jeu de certains commerçants qui, largement avertis de la fragilité de la sphère gouvernementale dans la lutte contre la vie chère, en ont parasité les franchises à des fins perfides, comme ces pénuries artificielles, devenues leviers d’action politique… Un moment, on a mis en place la MIRAP pour suppléer aux insuffisances des pouvoirs publics dans le secteur des approvisionnements de base… Misère d’une errance sans croute ni mie, qui se consume aujourd’hui dans une concurrence moite entre l’État et son démembrement, le MICOMMERCE et la MIRAP, au coude à coude pour offrir le même service à la même cible, par les mêmes erreurs…

Quid d’une autre structure mort-née, qui s’appelle l’Agence Nationale de la Consommation ? Pauvre gadget qui n’a jamais pu décoller. L’on a espéré à un autre un moment que les négociations entre le gouvernement et le GICAM allaient aider à quelque chose, erreur, puisque tous, des importateurs aux détaillants ne sont que de petits comptoirs locaux, de modestes «Bayam Selam » sans épaisseur intrinsèque. Le tout se complique à la fin par l’inexistence des filières professionnelles ou professionnalisées de distribution. On va faire comment, chacun se débrouille. Au fait, qui pour encadrer le secteur de l’immobilier devenu la locomotive à grande vitesse de l’inflation au Cameroun, dans une frénésie immorale qui simule une invitation au soulèvement populaire? Tsuiiip ! En avant pour la vie plus chère pour tout, pour tous, en tout.

Source: L'Essentiel du Cameroun N°364