Massacres de Menka: un chef traditionnel livre le ministre Paul Atangana Nji

Paul Atangana Nji Menka Paul Atanga Nji, photo d'archive

Tue, 29 May 2018 Source: hurinews.com

D’après une publication attribuée au chef traditionnel de Menka dans le Southern Cameroon (Cameroun anglophone) et qui circule en ce moment sur les réseaux sociaux, la vingtaine de jeunes massacrée par l’armée appartenait à un gang de malfrats qui semait la terreur dans ce village.

Mais son récit ne va pas sans sonner comme un aveu de sa responsabilité dans ces massacres pour avoir laissé sévir ces malfaiteurs des jours durant sans avertir ni les responsables de la police ou de la gendarmerie, ni le sous-préfet de la localité dont dépend le village Menka.

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Bien plus, dans son démenti, il révèle que l’hôtel dans lequel ces jeunes ont été tué appartenait à un de ses fils. Le silence (complice ?) des responsables de la sécurité, du sous-préfet face aux méfaits de ces jeunes malfrats emporte la responsabilité de Paul Atanga Nji, ministre de l’Intérieur et élite de la région.

Pour une pièce à conviction bonne à croquer pour la Cour pénale internationale, c’en est une. En relatant « la vraie histoire » (voir au bas de l’article) des évènements de Menka (si ce texte est vraiment de lui) survenus le vendredi 25 mai dernier, Fon Asobo Pius Nguh, chef traditionnel de Menka, a cru bien faire de minimiser le massacre de près d’une trentaine de jeunes gens par l’armée survenu dans son village. Pourtant, son récit achève de révéler sa responsabilité dans ce drame ainsi que celle des autorités locales et par ricochet celle de Paul Atanga Nji, ministre de l’Administration territoriale et secrétaire du Conseil national de la sécurité (en charge du renseignement) qui, comme par hasard, est élite de cette région.

S’agissant de la responsabilité du Fon Asobo, comment comprendre-du moins à en croire son récit- qu’un « groupe de bandits lourdement armé » (et non les rebelles indépendantistes) ait autant menacé, kidnappé, rançonné les populations, enlevé, et ce, des jours durant (des semaines durant de sources locales) sans que ce chef traditionnel, auxiliaire de l’administration, ne saisisse ni la police, ni la gendarmerie encore moins le sous-préfet de Santa (dont dépend Menka) ? Pourquoi curieusement c’est au moment où ces « voyous » prennent refuge dans un hôtel appartenant à son fils que d’après lui, la population a alerté l’armée ? Où étaient cette population et cette armée pendant tout ce temps où cette horde de jeunes délinquants semait la terreur à Menka ? Aux dernières nouvelles, ce monarque local aurait quitté discrètement le village après ce drame pour se réfugier à Yaoundé.

Le chef traditionnel parle d’un échange de tirs entre les jeunes gens dans l’hôtel et l’armée, lequel a occasionné près de 30 morts. Curieusement, d’après des habitants de ce village, il n y a pas d’impact de balles au Star Hotel. Si tel est le cas, dans quelles circonstances ces jeunes filles et garçons ont été tués ? Comble de cynisme, Fon Asobo Peter Nguh remercie l’armée pour son intervention « qui a apporté un peu de sommeil aux yeux de mon peuple ». Pourtant, des images de ce drame qui ont circulé sur les réseaux sociaux montrent plutôt une population de Menka dans le désarroi et en larmes pour avoir perdu un proche.

Bulletins de renseignement quotidien

En plus du Fon de Menka, la responsabilité du ministre de l’Administration territoriale et non moins secrétaire du Conseil national de sécurité, Paul Atanga Nji est engagée ici. Surtout qu’il fait partie de l’élite de l’arrondissement de Santa. Après sa nomination au poste de ministre le 2 mars dernier, Paul Atanga Nji avait instruit toutes les autorités administratives (gouverneurs, préfets, sous-préfets, chefs de district) de lui transmettre des bulletins de renseignement quotidien sur la situation sécuritaire de leur zone de compétence.

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Veut-on nous faire croire que le sous-préfet de Santa n’a pas fait parvenir à son supérieur hiérarchique ses deux bulletins de renseignement quotidien comme demandé ? Si cela n’a pas été fait et si le ministre ne les a pas exigé au sous-préfet, cela voudrait dire qu’ils sont responsables tous les deux. Dans l’hypothèse où Paul Atanga Nji a été mis au parfum des exactions de ces jeunes voyous dans l’arrondissement de Santa, pourquoi n’a-t-il pas réagi ? D’après des sources locales, Paul Atanga Nji et d’autres élites de Santa ont monté et financé un groupe d’autodéfense (SantaQuifors) qui devait kidnapper des villageois en se passant pour les mouvements rebelles indépendantistes dans le but de discréditer ceux-ci. Mais, toujours d’après ces sources, n’ayant pas rempli cette mission, leurs sponsors auraient décidé de les liquider.

Est-ce ce qui justifie le silence des autorités locales autour des actes de banditisme répétés et réguliers de ces jeunes comme il transparait dans le témoignage de Fon Asobo Pius Nguh ? Difficile pour l’instant d’explorer cette hypothèse. Toujours est-il que Paul Atanga Nji, ce chef traditionnel, le sous-préfet de Santa, le commissaire de sécurité publique et le commandant de brigade de gendarmerie de cette même localité doivent des explications aux familles des disparus et aux camerounais relatives à ce carnage.

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