Une volonté d’assainir le marché
Sur 419 établissements de microfinance (EMF), seuls 402 sont officiellement agréés après que le ministre des Finances, Louis-Paul Motaze, a exigé que tous finalisent au 31 décembre 2021 leur mise en conformité avec les dispositions réglementaires de la COBAC.
S elon l’Association professionnelle des établissements de crédit du Cameroun (APECCAM), les 419 EMF (établissements de microfinance) en activité au 31 décembre 2020 totalisaient un chiffre d’affaires (CA) de 519 milliards de FCFA, soit environ 963 millions de dollars. Les 394 milliards de crédits octroyés représentaient pour leur part une contribution de 10% au financement de l’économie nationale. Mais ce CA flatteur ne saurait faire oublier certaines faiblesses, notamment en termes de gouvernance, car ces dernières années plusieurs EMF ont fait faillite, engloutissant des milliards de FCFA et plongeant des milliers d’épargnants dans le désarroi. En vue d’assainir ce secteur, le ministre des Finances Louis-Paul Motaze a haussé le ton lors d’un communiqué émis le 12 avril 2021: «Tous les EMF ont jusqu’au 31 décembre 2021 pour finaliser les diligences nécessaires à leur mise en conformité avec les dispositions réglementaires de la COBAC (Commission bancaire de l’Afrique centrale).» Il ajoutait: «L’exercice de l’activité de microfinance sans agrément est proscrit.» Rappelons en effet que la réglementation de la COBAC en date du 30 juillet 2020 fixe entre autres le capital social à 300 millions de FCFA pour les EMF de deuxième catégorie et à 150 millions de FCFA pour les EMF de troisième catégorie, les EMF de première catégorie revêtant quant à eux exclusivement la forme juridique de coopératives constituées d’au moins 100 membres, avec conseil d’administration, et aucun montant minimal n’étant exigé pour leur capital. Á l’issue de ce rappel à l’ordre, Louis Paul Motaze a publié le 2 juin 2022 la liste définitive des EMF agréés au 31 décembre 2021: sur 419, seuls 402 l’étaient officiellement. En dépit de cette avancée, beaucoup d’experts du milieu de la finance camerounaise, dont le ministre des Finances, estiment que le chemin est encore long avant que les EMF ne puissent «prétendre à un secteur financièrement stable et performant, dans le sens de sa vision originelle qui repose sur la volonté d’améliorer les conditions de vie des populations à faibles revenus», comme l’a indiqué le ministre.
C’est probablement l’une des raisons pour lesquelles la Fondation allemande des caisses d’épargne pour la coopération internationale (SBFIC) partage son expertise en proposant aux EMF camerounais un nouveau modèle économique. La maîtrise des enjeux financiers fondamentaux, une nécessité pour réaliser l’inclusion financière, suppose d’amener les professionnels du secteur à rompre avec la gestion «artisanale» qui prévaut encore et à s’approprier un modèle de gestion moderne permettant d’asseoir un écosystème financier performant et favorable au développement des entreprises. Une initiative fortement saluée par le ministre des Finances Louis-Paul Motaze, qui sait que cette démarche participe non seulement à l’amélioration des services bancaires mais aussi au développement de l’activité économique. La Régionale d’Épargne et de Crédit est d’ailleurs un bel exemple de réussite, elle qui joue désormais dans la cour des grands après l’obtention auprès de la COBAC, le 8 septembre 2022, de l’agrément officialisant sa transformation d’EMF de 2e catégorie en banque universelle. L’autorisation qui fait d’elle le 18e établissement bancaire en activité dans le pays est l’heureux dénouement d’un processus de transformation engagé il y a deux ans avec une levée de fonds lui permettant de porter son capital de 8,04 à plus de 15 milliards de FCFA. Ajoutons enfin qu’à l’instar des banques, les EMF et les opérateurs de paiement électronique devraient prochainement être assujettis au respect du secret bancaire, une disposition adoptée au Parlement suite au projet de loi déposé par le gouvernement en avril dernier et actuellement en attente de promulgation sur le bureau du président Paul Biya.