Outragées, meurtries, humiliées, assassinées… Les populations de la ville de Mokolo sont sortes dans la rue hier. Les femmes devant elles ont marché sur la préfecture pour crier à Raymond Roksbo, le préfet, leur ras-lebol. C’était hier aux alentours de 8 h.
commerçants, conducteurs de Moto-taxi, cultivateurs et anonymes, pancartes ave des écriteaux demandant le départ du préfet à la main, ont afflués vers l’édifice qui abrite l’autorité administrative de la ville. Ils venaient de mettre en terre le corps d’Alhadji Issa Hamadou, un commerçant très connu de la ville. La victime était un quadragénaire marié à deux femmes qui toutes sont enceintes, et père de trois enfants.
Il a été froidement abattu par balle vers 1h15 à son domicile de Zimanayak au lieudit Wouro Kessoum.
Moussa Oumarou, grand notable à la chefferie de 1er dégré de Matakam sud était un de ses amis et est l’un des premiers à être arrivé sur les lieux du drame. « Je suis arrivé chez moi hier à une heure. En provenance de Maroua où j’étais allé accueillir le lamido à l’aéroport. Il m’a donné le numéro du sous-préfet pour l’appeler au cas où les forces de défense nous empêchaient d’entrer dans la ville à cette heure tardive. Curieusement, hier il n’avait personnes à la barrière (check point) de l’entrée de la ville.
Nous nous en sommes étonnés. On est resté cinq minutes sans voir personne, puis, nous avons poursuivis notre chemin. Dans la ville, nous avons rencontré une bonne quinzaine d’éléments des forces de l’ordre à la permanence du parti. Ne sachant pas qui nous étions ils nous ont interceptés. Rassurés sur notre identité, ils nous ont laissé passer. À 1h13, j’ai entendu trois coups de feu. Cinq minutes plus tard, Abba Yerima, un voisin du défunt, m’a annoncé la mort de Alhadji Issa », raconte le notable.
« Le préfet doit partir »
Une fois mis au courant de la mort de son ami, le notable dit être sorti à la hâte de chez lui. C’est alors qu’il fait une rencontre qui pour lui est insolite. Celle du commandant de la compagnie de gendarmerie de Mokolo. Il hèle le gendarme qui s’arrête. L’informe de la situation. Le commandant le prend en voiture et c’est ensemble qu’ils arrivent chez le défunt. A peine descendus de voiture, les deux hommes sont interpellés par les voisins accourus sur les lieux. On leur montre un véhicule qui serait celui des agresseurs. « Nous ne l’avons pas vu mais, on nous a décrit un pickup ». Ils apprennent que les occupants de l’auto sortaient de chez Mal Sali, un autre commerçant qu’ils ont délesté d’une forte « somme d’argent ». Ce dernier s’en est sorti indemne de l’agression.
Alhadji Issa H. n’a pas eu la même chance. Selon le notable il aurait parlé. « Il a dit au bandits qui tapaient à sa porte en le menaçant de mort s’il ne leur donnaient pas tout son argent qu’il était aussi armé. » Les agresseurs ont alors tiré deux coups en l’air, puis un autre à travers la baie vitrée de la porte, droit dans la poitrine de Alhadji Issa, le tuant sur le champ. » Pour ne pas être poursuivis par des voisins téméraires, ils ont tiré cinq coups de feu en l’air. Il y avait des douilles partout et même des cartouches non percutées, affirme le notable.
Des fusils de l’armée
Hier, toute la journée, les boutiques du marché de Mokolo étaient fermées. Les commerçants devisant devant leurs échoppes closes ruminaient encore leur colère en fin d’après midi. Pour eux, il n’y a pas l’ombre d’un doute, ce sont des militaires qui ont tué leur collègue. L’assassinat d’Alhadji Issa n’est pas le premier d’un commerçant à Mokolo. Alhadji A. a été victime le 10 septembre2015 d’une agression « de quatre personnes dont trois étaient armées d’un fusil d’assaut à la crosse pliable et non ceux dont se servent les gendarmes avec une crosse en bois, mais ceux des militaires ».
Il décrit le M21 S, une arme de fabrication bulgare dont sont équipés certains des militaires camerounais engagés au front. Il était chez lui avec ses enfants camer.be, dont l’aîné a 20 ans. Les agresseurs ont rudoyé tout le monde et l’ont délesté de plus de 400.000Fçfa et de Nairas. Les agresseurs d’une réelle sauvagerie ont brutalisé sa mère de plus de 70 ans et ont voulu emporter la moto neuve de son fils. Ils étaient accompagnés d’un jeune qui s’exprimait en Mafa, la langue locale dans laquelle il s’est adressé à la vieille femme lui expliquant que les intrus du soir étaient des soldats qui cherchaient de l’argent. Mais, le commerçant s’offusque que son fils qui a réussi à se dérober de la vigilance des bandits soit aller courageusement chercher de l’aide en vain.
« Il a commencé chez un voisin qui a voulu le retenir, il s’est entêté, il est parti à la brigade de gendarmerie, il n’y avait personne. Il a fait du boucan, rien. Il a poursuivi à la compagnie de gendarmerie juste à côté, pareil. Au commissariat spécial aussi il n’avait personne. Il s’est enfin rendu au commissariat de sécurité publique où il y avait deux agents qui l’ont tenu en respect à distance de leurs armes ». Les policiers étaient sourds aux explications du jeune homme.
Les forces de l’ordre absentes
Heureusement, dans sa recherche d’aide, il avait appelé le 1500, le numéro vert de la gendarmerie. On lui avait répondu de Yaoundé. Il n’avait pas été le seul parce que ce soir-là il y a eu quatre agressions similaires de commerçants à Mokolo. Mis au courant de la situation, le commissaire et ses deux collègues ont daigné aller intervenir, non sans lâcher : « ces gens-là sont à double sens ». C’est peut être pourquoi les poliçiers ont choisi de partir intervenir à pieds. Quand ils sont arrivés, il était 3h15 et les bandits s’étaient dissous dans la nature. Mais, ils ont été repris le lendemain. C’étaient deux fusiliers de l’air en poste à Mabass et un jeune garçon nommé Parfait Nsoumday. Une semaine plus tard, deux éléments du bataillon d’infanterie motorisée affectés à Tourou ont été à leur tour arrêtés pour les mêmes faits d’agressions sur des commerçants. Hier, les populations de Mokolo manifestaient pour la deuxième fois en un mois.
Quelques personnes victimes de braquage nocturne à main armée à leur domicile à MOKOLO
01 SOULEY SARKI, Boucher , Zimangayak la nuit du 10/09/2015
02 ALADJI ABALI, Vendeur des pièces de pagnes Mboua
03 IBRAHIM TIDJANI alias IBI , Commerçant tenancier alimentation le BAZAR Mbikem
04 AYOUBA, Commerçant , Mbikem
05 MARTIN VEODE Vendeur d’appareils et pièces électroniques Mendézé la nuit du 09/09/2015
06 GANAVA VAWA Vendeur des prête à porter Mofolé la nuit du 02/09/2015
07 KEMTSAI PATRICE, Commerçant, stockage des céréales Mbikem
08 KODJE KONAI ALIAS DAGAR, Vendeur de poissons Mofolé Petit Barrage
09 JEAN VICHE, Vendeur des assiettes Mofolé Petit Barrage
10 ALADJI ISSOUFA ATHI, Vendeur de carburant ZOAZOA Mboua
11 JEAN MANDOU, Boutiquier à Mbikem Mofolé Petit Barrage
12 DOUGA GERMAIN, Chef de service à la MIDIMA Djiméta
13 OUGO Vendeur des pièces détachées auto Mboua
14 MARAVA MADJARAI, Commerçant, stockage des céréales Mofolé Petit Barrage
15 MANDOU MELDEKE, Commerçant, stockage des céréales Mofolé Petit Barrage
16 KOSNA TITUS, Commerçant, stockage des céréales Kossehone
17 ZRA BASILE, boutiquier Kossehone