Selon un article publié par Jeune Afrique, Haman Mana, journaliste et patron de presse camerounais, a choisi l'exil aux États-Unis après l'affaire Martinez Zogo en 2023. Dans une interview, il revient sur le lent déclin de la presse indépendante au Cameroun, muselée et paupérisée par une "dérive autoritaire" du pouvoir en place.
Haman Mana, qui a marqué les dernières décennies du journalisme camerounais, assure pourtant que le journalisme n'a jamais été une passion pour lui. C'est au cours des mois d'avril et mai 1985 qu'il intègre l'École supérieure des sciences et techniques de l'information (Essti), aujourd'hui devenue Esstic, alors qu'il accompagnait simplement des amis aux entretiens d'admission.
Près de quarante ans plus tard, Haman Mana a acquis suffisamment d'expérience pour raconter quatre décennies de pratique journalistique dans un livre de mémoires intitulé "J'aime l'odeur de l'encre au petit matin sur le papier", publié le 4 avril dernier aux Éditions du Schabel, qu'il dirige.
L'affaire Martinez Zogo, du nom de ce journaliste camerounais assassiné en 2023, a été l'élément déclencheur de la décision d'Haman Mana de quitter le Cameroun. Il était le dernier journaliste à avoir parlé à Martinez Zogo avant son décès et assure avoir ressenti au plus profond de lui le "climat de terreur" qui régnait dans le pays, craignant d'être le prochain sur la liste des journalistes à neutraliser.
Son livre sert, selon lui, d'instrument de lutte contre "la culture de l'oubli qui caractérise trop souvent la société camerounaise". Il estime qu'il est important de capturer ces souvenirs avant qu'il ne soit trop tard et de préserver la mémoire collective d'une nation confrontée à l'oubli.
Dans son ouvrage, Haman Mana revient sur son parcours journalistique, marqué par la "transhumance" et par ses premiers pas de journaliste professionnel à Cameroon-Tribune, Action, Fraternité, puis Le Messager. Il raconte également l'aventure de Mutations, un journal qu'il a cofondé en 1997 et qui est rapidement devenu l'un des médias les plus influents du pays.
Toutefois, la situation de la presse indépendante au Cameroun s'est considérablement dégradée ces dernières années, selon Haman Mana. Il dénonce une "dérive autoritaire" du pouvoir en place, qui muselle et paupérise les médias indépendants, en les privant notamment de ressources publicitaires.
Haman Mana appelle à une prise de conscience collective et à un sursaut de la société civile pour défendre la liberté de la presse et le pluralisme des voix au Cameroun