Petit à petit, le défi est relevé sur les axes Babadjou-Bamenda, BamendaBambili, Foumban-Koupamatapit ou encore la Ring Road. Alors que les chantiers bénéficient de la protection de l’armée et du soutien des populations, il existe encore des freins à la mobilisation des entreprises.
Pour faire le trait d’union entre les régions de l’Ouest et du NordOuest, il y a l’axe BabadjouBamenda que tout le monde connaît. Mais il y a aussi la route moins connue qui va de Foumban à Koupamatapit dans la région de l’Ouest, puis continue jusqu’à Bui, Kumbo ou encore Jakiri dans le Nord-Ouest. Ces deux tronçons ont souffert de la crise sécuritaire qui dure depuis 2017. Au plus fort de la guerre, le chantier de l’axe Babadjou-Bamenda a été abandonné en 2021 par l’entreprise française Sogea Satom pour « un cas de force majeure en rapport avec la situation sécuritaire dans la zone d’intervention du projet ». En juin 2022, l’entreprise camerounaise Bun’s a repris les travaux sous la protection de l’armée camerounaise qui assure « la sécurité des sites, des engins et la veille sécuritaire le long de l’itinéraire du projet », selon les explications données à l’époque par le ministère des Travaux publics. A ce jour, 12 mois se sont écoulés ; le chantier n’a plus connu une seule interruption. Deux entreprises travaillent désormais sur le projet qui couvre quelque 60 km. Bun’s est bien avancée sur le 17 premiers kilomètres entre Babadjou et Matazem. Les travaux seront achevés d’ici décembre prochain, promet l’entreprise Studi qui assure la mission de contrôle. La couche de fondation de la route est presque terminée sur 15 km. Il reste à finir les 2 km restants avant d’entamer la couche de roulement de la chaussée. Puis il faudra faire l’éclairage public et la signalisation.
Matazem-Welcome to Bamenda affiche 30% de réalisation
C’est de bon augure pour les tronçons restants qui sont moins avancés. A l’instar de la section MatazemWelcome to Bamenda qui fait 18 km, où Bun’s affiche 30% de réalisation. On n’en est pas loin sur la voie de contournement de la falaise de Bamenda sur quelque 5 km. L’entreprise Bofas enregistre une avancée d’environ 25%. Il reste la section urbaine sur 12 km, avec plusieurs points clés dans la ville de Bamenda : Ecole des champions, Amour Mezam junction, Finance junction et Veterinary junction. L’axe Babadjou-Bamenda n’est que la route principale. Sur son itinéraire, elle déploie plusieurs bras qui sont autant de routes secondaires visant à désenclaver plusieurs villages et quartiers dans trois arrondissements : Babadjou, Santa et Bamenda 1er. Un total de 40 km de routes communales sont en cours de construction et seront bitumées. Dans la ville de Bamenda, un autre chantier est en cours et permettra d’allonger la voirie jusqu’à la localité de Bambili qui abrite le site historique de l’université. Le linéaire de 9 km est aujourd’hui exécuté à 90%. On est assuré que l’entreprise Edge livrera le chantier même si le projet, prévu pour s’achever en décembre 2022, est complètement hors-délai. De toute évidence, les retards ne seront pas rattrapés sur les différents chantiers routiers ayant souffert de la crise sécuritaire. L’enjeu majeur aujourd’hui est de terminer ces routes. Le rappel a encore été fait par le ministre des Travaux publics, Emmanuel Nganou Djoumessi, qui était sur le terrain dans les régions du Nord-Ouest et de l’Ouest du 3 au 6 juillet dernier. Les avancées enregistrées ne sont pas seulement dues à l’accalmie dans la guerre et au déploiement militaire sur les chantiers.
Soutien populaire
énéficié de l’accompagnement des populations riveraines. Au village Awing qui bénéficie d’une route communale, l’état d’esprit est résumé par le président de l’Association culturelle Ndong Awing. « Le village dispose d’un grand potentiel agricole avec de larges terres inexploitées à cause de la guerre et du mauvais état des routes menant aux champs. Il était impossible d’évacuer nos productions. En reliant plusieurs villages et plusieurs départements (Bamboutos, Ngoketunja et Mezam), cette route devient le moyen de liaison des communautés et la clé de la cohésion sociale. Nous, populations du village Awing, promettons d’accompagner la société Bun’s dans les travaux », explique Christian Tanyi.
Babadjou-Bamenda revendique 400 emplois directs
L’importance socio-économique des routes s’est progressivement révélée aux populations. Elles ont d’abord trouvé du travail dans les chantiers. Le seul projet de l’axe Babadjou-Bamenda revendique 400 emplois directs ayant bénéficié aux riverains dont les jeunes et les femmes. Pour davantage intéresser et impliquer les populations à la défense de ce projet, plusieurs initiatives ont été menées : des campagnes de sensibilisation et de communication sociale sur la prévention et l’atténuation des violences basées sur le genre. A ce jour la sensibilisation a permis de toucher 300 leaders femmes et filles, 500 leaders jeunes et élèves, au moins 200 femmes et enfants à risque ou victimes de violences basées sur le genre, 150 leaders religieux, traditionnels et associatifs, 30 comités de vigilance ou encore 120 responsables des services techniques déconcentrés et décentralisés des zones de projet.
Projet mythique
Profitant du bon état d’esprit favorable à la relance des projets, le gouvernement annonce le lancement des travaux de la Ring Road. Cet axe est devenu mythique tellement les populations attendent la promesse faite il y a des décennies par le chef de l’Etat. A Bamenda, le ministre des Travaux publics, Emmanuel Nganou Djoumessi, a précisé que les travaux débuteront à la fin de cette année et concerneront le bitumage de 300 km sur la route nationale n°11, soit le trajet Bamenda-NdopKumbo-Nkambe-Mi sajeMungong-Kimbi-Nyos-WehWum-Bamenda. Sachant que la section Ndop- Kumbo (60,5 km) a déjà été faite grâce aux ressources du Budget d’investissement public. Les quelque 300 km à construire coûteront environ 167,2 milliards F.Cfa fournis par la Banque africaine de développement, l’Africa Growing Together Fund et l’Etat du Cameroun.
Foumban-Koupamatapit à l’arrêt
Alors que plusieurs projets sont désormais sur la bonne voie, le contexte d’accalmie ne semble pourtant pas profiter à l’entreprise en charge des 54 km de l’axe Foumban-Koupamatapit, jusqu’à limite de région du NordOuest. Les travaux sont à l’arrêt et marquent un taux d’avancement de 31,46%. Les activités critiques ne sont pas faites, notamment les terrassements terrestres ou encore la construction de la couche de fondation de la chaussée. Le non-paiement des décomptes est un reproche fait à l’Etat par le Groupement Comete International/Comete Engineering International. Mais le gouvernement met en avant les lacunes managériales de l’entreprise : problèmes dans l’organisation et la planification des activités à mener, non-paiement des salaires du personnel, absence de certains personnels d’encadrement notamment le directeur de projet, l’ingénieur routier et l’ingénieur d’étude. Plus grave, le matériel dédié aux travaux n’est pas totalement disponible sur le site. L’entreprise s’est donné 10 jours pour relancer sa machine. Elle s’est aussi engagée à produire un planning d’achèvement des travaux. Le cas de la route Foumban-Koupamatapit remet sur la table les problèmes qui structurent les projets routiers au Cameroun. La fin de la guerre ne marquera pas la fin des défis.