Les dissonances apparues le 20 février 2016 au cours du meeting de l’Appel de l’Ouest à la candidature de Paul Biya entre le président du Sénat et le coordonnateur régional des activités du RDPC n’est que le prolongement d’un conflit souterrain de leadership que se livrent les deux hommes depuis la mise en route de la Chambre haute du parlement.
#CoordonnateurRégional Q ui doit parler au nom du RDPC à l’Ouest ? La question est sous-jacente à l’adversité relevée entre les deux grosses pointures du parti au pouvoir de la région de l’Ouest, au cours du meeting du 20 février 2016. En optant de débiter un discours assez osé sur la candidature de Paul Biya à la prochaine élection présidentielle, conditionnée par la tenue d’un Congrès ordinaire du parti de la flamme ardente, Ibrahim Mbombo Njoya n’a pas seulement voulu apporter sa vision personnelle au débat en cours. Mais, il tenait manifestement à réaffirmer son rôle premium dans la conduite des affaires politiques du RDPC à l’Ouest, où il a été désigné coordonnateur régional. Un rôle que lui a littéralement chipé Marcel Niat Njifenji, fort de sa position de président du Sénat.
« Et pourtant, la désignation du roi des Bamoun comme principal responsable du RDPC à l’Ouest était censé régler définitivement cette guéguerre de leadership, tant les prémisses avaient été perçues jusqu’au sommet de la hiérarchie du parti », se lamentent certaines coulisses internes au parti au pouvoir. Les introduits du sérail savent très bien que les noms de Niat et Mbombo Njoya étaient les deux sur la table du chef de l’Etat Paul Biya, lorsqu’il fallait désigner le président de la Chambre haute du parlement. Et depuis sa nomination comme deuxième personnalité de la République, Marcel Niat Njifendi s’est cru doté d’un pouvoir de régence sur les membres du RDPC à l’Ouest, se trouvant en première ligne de plusieurs initiatives.
A l’analyse, Paul Biya voulait jouer à l’équilibriste en portant Ibrahim Mbombo Njoya à la tête de la coordination du RDPC. Un choix qui induisait l’éclipse du président du Sénat du présidium des activités politiques du RDPC à l’Ouest au profit du sultan, avec charge pour lui de se consacrer aux affaires de l’Etat dont il est la deuxième personnalité. Aujourd’hui, les langues se délient dans les rangs même du parti dirigeant pour s’interroger sur cet activisme politicien insidieux du président du Sénat. D’aucuns rappellent que pour régler la même querelle de leadership dans le Littoral en début février 2016, à la faveur de sa visite à Douala, le président du Sénat avait fait valoir la primauté du coordonnateur régional du RDPC sur les autres instances.
Conséquence, Laurent Esso avait organisé un meeting populaire pour corriger l’activisme, sur fond de positionnement, du sénateur Thomas Tobbo Eyoum qui s’était empressé de lancer l’Appel du Littoral sans consultation préalable. Idem dans le Nord où le coordonnateur régional - Aboubakary Abdoulaye, a dû revoir, à travers un autre meeting populaire le 27 févier 2016, la copie du délégué du gouvernement qui, lui aussi, avait fait son show par un meeting peu couru le 6 février.
Précédents
Finalement, pour certains esprits éclairés, cette volonté de dominer la scène politique à l’Ouest constitue une véritable obsession pour Niat Njifenji qui ne semble pas avoir pris la juste mesure de son pouvoir de deuxième personnalité de la République - fonction républicaine au-dessus des considérations politiciennes. Ce n’est pas la première fois que Niat a mis beaucoup d’autres hiérarques du RDPC à l’Ouest sous l’éteignoir. Lors de la collecte de l’effort de guerre des ressortissants de l’Ouest, dans le cadre de la lutte contre Boko Haram, il s’était retrouvé en première ligne, mobilisant les grandes élites de l’Ouest qui avaient dégainé jusqu’à près de 600 millions de FCFA au profit de la cagnotte, hissant l’Ouest au premier rang des contributions à l’échelle nationale, au grand profit de Niat Njifenji qui tire politiquement les prébendes de cette contribution des fils de sa région à la cause nationale.
A cette occasion, Madeleine Tchuenté avait littéralement subi les foudres du président du Sénat, pour avoir organisé la séance de collecte des contributions du Koung-Nki avant celle de Bafoussam, tenue sous les auspices du président du Sénat. Ce n’est pas tout. A l’occasion des opérations de renouvellement des bureaux des organes de base du RDPC en novembredécembre 2015, le président du Sénat avait cru devoir s’adjuger des pouvoirs d’investiture, recevant et soutenant les adversaires de Keutcha Courtès.
Seulement, sa complicité avec Jean Nkueté - le secrétaire général du Comité central du RDPC, n’avait plus fonctionné comme lors de l’effort de guerre, et ses manœuvres visant à corriger les options d’investiture de la Commission départementale de coordination se sont heurtées à la rigueur du Comité central. Résultat des courses, Mme Keutcha Courtès avait été élue contre son gré, laissant transparaitre comme une once de froideur dans ses relations avec Jean Nkueté.
Depuis lors, des observateurs ont perçu comme un isolement du président du Sénat, le clash larvé avec le sultan roi des Bamoun étant apparu comme l’autre fresque de positionnement et de leadership développée par le président du Sénat dans le contrôle du RDPC à l’Ouest. Des précédents qui fragilisent manifestement Niat Njifenji qui affiche profil bas après le meeting de Bafoussam, dont l’opinion retient plus la sortie de son rival Ibrahim Mbombo Njoya. Il était manifestement temps de remettre chacun à sa place.