Nord/Torture : Un jeune encaisse 120 coups de fouet pour injure

C'est la punition qui a été infligée à Woulvang, 33 ans au lamidat de Ngong le 26 février 2023. Il souffre de lésions infectées au niveau du fessier. Une double enquête judiciaire et administrative a été ouverte par le parquet de Garoua et le sous-préfet de Ngong.

C'est une image choquante publiée sur les réseaux sociaux du jeune Woulvang, 33 ans, abandonné sous un arbre dans l'après-midi de lundi 13 février 2023 que l'opinion a été informée de ce énième cas de torture dans le lamidat de Tchéboa, dans l'arrondissement de

Ngong, département de la Bénoué.

Le jeune Woulvang a été transporté dans un dispensaire de la localité par un infirmier pour des premiers soins. D'après le personnel soignant du centre de santé de Ngong où il a reçu les premiers soins, le nommé Woulvang souffre de lésions profondes arrondies au niveau du fessier. « Il s'agit d'une blessure profonde qui a touché les muscles fessiers. La profondeur est de plus de 20 cm et la plaie est infectée sur le fessier gauche» , confie un infirmer de cette formation hospitalière.

Dans une vidéo, Woulvang est revenu hier après-midi lors de son audition par les éléments de la brigade de gendarmerie de Ngong sur les circonstances de son arrestation et de la torture par les membres de la garde du

lamido de Tchéboa. « Je travaillais pour un monsieur répondant au nom de Djibrilla Abba au marché de Ngong.

J'ai cessé de travailler avec lui. Le samedi 25 février il est venu me trouver avec un ami porteur au marché. Nous étions en train de causer et il s'est mêlé de notre causerie.

Lorsque je lui ai demandé pourquoi il s'y mêlait, il m'a dit que j'allais voir. C'est comme ça que le dimanche 26 février j'ai été interpellé par des dogaris du lamido de Tchéboa » , explique l'infortuné. Et d'ajouter : « sur place, ils se sont mis à me fouetter. J'ai reçu 120 coups de fouet. Ils sont ensuite allés me jeter dans une case infeste dans l'enceinte du Lamidat. J'ai passé trois jours en cellule sans boire de l'eau, ni manger. Ils m'ont par la suite jeté sous un arbre au marché à bois de Gayandi, dans la ville de Ngong. » Retrouvé le lundi après-midi par un enseignant, il est transporté au centre de santé pour des soins. « Il est arrivé dans un état critique. Affaibli et sa blessure en état de décomposition » explique un infirmier du centre de santé de Ngong.

Joint au téléphone, le sous-préfet de Ngong a confirmé l'information sur ce cas de torture au Lamidat de Tchéboa. « Nous avons ordonné l'ouverture d'une enquête et avons interpellé le chef traditionnel sur ce cas. Les premiers éléments font état d'un abus de la part des notables du Lamidat qui ont agi à la suite d'une plainte déposée par un commerçant pour injures contre le jeune homme au lamido. Nous avons instruit que ce jeune soit pris en charge » , a déclaré l'autorité administrative. A la brigade de gendarmerie de Ngong, plusieurs notables du Lamidat de Tchéboa ont été entendus par les enquêteurs.

Selon une source proche de l'enquête, une double enquête a été instruite par le sous-préfet de Ngong et le procureur de la République près les tribunaux de la Bénoué à Garoua. Le commerçant ayant conduit le jeune Woulvang au Lamidat de Tchéboa est activement recherché par la gendarmerie.

Idem pour le chef des dogaris ayant autorisé le passage à tabac de Woulvang.

Les multiples tentatives de joindre le lamido de Tchéboa sont restés vaines. Le chef traditionnel s'est refusé de tout commentaire sur l'affaire Woulvang. Il y a quelques mois, un jeune originaire de Yagoua avait été mortellement battu par les membres de la sécurité du Lamido de Tchéboa. L'affaire fut classée sans suite. Ce nouveau cas interroge sur les abus de pouvoir et non-respect des droits de l'Homme par ce lamido que dénoncent les populations depuis des lustres sans la situation ait connu un changement.