Lors du «grand meeting» du Rassemblement démocratique du peuple camerounais le samedi 20 février 2016 à Bafoussam, tous les intervenants, à en croire les slogans et spots publiés pour annoncer l’événement, étaient partis pour ressasser les mêmes formules laudateurs que tous ceux qui ont déjà signé des motions de soutien ailleurs à leur champion.
A savoir, inviter le président Biya à organiser l’élection présidentielle de 2018, et à se porter candidat du Rdpc. Ou aussi, à anticiper cette échéance. Tous les discours n’ont rien dit de neuf. Jusqu’au moment où le dernier intervenant, avant Niat, sur une dizaine de discoureurs, Ibrahim Mbombo Njoya, sultan Roi des Bamoun et surtout, coordonnateur général du comité central du Rdpc pour l’Ouest, balance un pavé dans la marre.
«Au moment où nous sommes en train d’essayer d’écrire une nouvelle page de l’histoire de notre pays, sachez Excellence que les clés du bonheur et du malheur de notre pays se trouvent encore aujourd’hui entre vos mains… Il devient très urgent et impératif, d’envisager la convocation d’un congrès extraordinaire de notre parti, en vue de débattre de la situation préoccupante qui pointe à l’horizon, pouvant menacer sérieusement la paix qui nous est très chère, et qui a été acquise de haute lutte».
Ce grand membre du bureau politique du parti au pouvoir se veut plus précis : «Ce congrès extraordinaire n’aura qu’un seul point à l’ordre du jour, à savoir trouver des solutions pertinentes et durables aux problèmes de l’heure».
Autre « petite phrase » qui suscite des interrogations : «Au moment où nous sommes en train d’essayer d’écrire une nouvelle page de l’histoire de notre pays, sachez, Excellence, que les clés du bonheur et du malheur de notre pays se trouvent encore aujourd’hui entre vos mains…». Dans les tribunes, ces prises de position plutôt «iconoclastes» pour certains, ont provoqué une vague de murmures. Et la surprise était perceptible sur les visages de nombres d’élites. La Nouvelle Expression a appris, après enquête, que le contenu de ce discours n’était pas maitrisé par tous les organisateurs.
«Il n’était pas prévu que la question de la convocation du congrès du parti allait être évoquée à l’occasion de ce méga meeting. Nous avons été plutôt surpris», révèle une élite de l’Ouest qui était étroitement associée à la préparation de l’événement. Dans le sérail, ces prises de position du chef de la délégation du comité central du Rdpc pour l’Ouest continuent de faire des gorges chaudes. L’ancien ministre a-t-il pris sur lui d’introduire ce nouveau sujet dans la mouvance des appels à la candidature de Paul Biya ? Dans quelles intentions ?
«Le sultan sénateur qui sait qu’il n’est pas n’importe qui dans l’appareil du parti, veut joueur sa carte personnelle auprès de Paul Biya. Depuis qu’on fait des appels à candidature, personne ne parle du congrès. Parce que cette instance ne joue aucun rôle dans la candidature du président qui est d’office notre candidat naturel», explique un député du Rdpc de l’Ouest. «Manifestement, le Roi veut que Paul Biya le reçoive pour comprendre le fond de sa pensée, parce que là, nous ne comprenons pas sa démarche», conclu un autre membre du comité central du Rdpc.
Il faut rappeler qu’au moment de mettre sur pied le Sénat en 2013, le nom du sultan des Bamoun avait circulé dans les chaumières comme potentiel président de la Chambre haute du parlement camerounais. Selon des sources introduites, il a difficilement digéré que ce somptueux fauteuil revienne à quelqu’un d’autre. Fut-il son «ami» Marcel Niat Njifenji. Comme depuis le début de cette vague de motions et d’appels, la réaction de Paul Biya qui s’est envolé hier pour un court séjour privé en Europe, est attendue. Peut-être à son retour.