Opération épervier : les nouveaux contours de l’affaire Bapès

Louis Bapes Bapes Secondary Education Minister Photo d'archive utilisée juste à titre d`illustration

Wed, 21 Oct 2015 Source: camer.be

Deux semaines après son départ du gouvernement, l’ancien ministre des Enseignements secondaires continue d’humer l’air de la liberté, prolongeant le suspense sur l’avenir de l’affaire qui porte son nom devant la justice. Des révélations médiatiques avaient pronostiqué son interpellation subséquente après son éviction du gouvernement le 2 octobre dernier.

Et du coup, d’après des indiscrétions dignes de foi, un comité d’accueil était prévu à la prison centrale de Kondengui pour son retour au pénitencier, après son passage fugace de 31 mars 2014. Aujourd’hui, l’attention se focalise sur l’audience du 30 octobre 2015, avec une question lancinante sur l’effectivité de la convocation de l’ancien ministre à l’audience.

Selon les juristes, Bapès Bapès ne bénéficie plus de l’immunité de fait que lui conférait son statut de membre du gouvernement, et le juge trouve là l’opportunité de le convoquer au prétoire en toute indépendance.

Après l’audience du 30 septembre dernier, la cause a été renvoyée au 30 octobre prochain, et beaucoup d’observateurs pensent que la comparution publique de l’ancien ministre pourrait servir de déclic à l’examen au fond de l’affaire. Et pour cause, à en croire les puristes du droit, son statut d’auteur principal des détournements présumés de près d’un milliard de FCFA au détriment du ministère des Enseignements secondaires en fait l’acteur décisif dans la manifestation de la vérité.

Conséquence, ils sont nombreux dans les rangs de la défense à espérer que le TCS - le Tribunal criminel spécial, pourrait enfin décider d’ouvrir les débats de fond sur cette affaire qui pour les avocats de la défense, charrie des injustices dans le traitement des personnes mises en cause.

Remboursement du corps du délit

Pour cause, 3 anciens collaborateurs de Bapès Bapès croupissent toujours dans les geôles de Kondengui depuis janvier 2010, et s’apprêtent à vivre d’ici le 10 janvier leur 6ème année de détention préventive, en dépit des dispositions pertinentes du code de procédure pénale, qui fixent le délai de la détention préventive à 6 mois une fois renouvelable.

Dominique Akoa Akoa- ancien directeur de l’enseignement général, Rosette Eboutou - ancien Contrôleur financier auprès du Minesec, et Jean Rouley Mbida - ex-cadre au Minesec, voient à chaque fois leurs demandes de liberté provisoire rejetées.

Leur péché mignon, n’avoir pas restitué comme nombre de la dizaine d’autres inculpés du dossier, le corps du délit à l’époque leur arrestation en 2010, bien avant l’entrée en vigueur de la loi créant le TCS, et qui offre cette opportunité aux justiciables poursuivis dans le cadre de l’opération Epervier.

Et pour la défense de ces prévenus, qui manifestement clament leur innocence, cette restitution du corps du délit, qui pourrait constituer la ligne directrice du procès, afin de permettre à certains, dont Bapès Bapès, d’échapper à la prison, est sujette à polémique, sur fond d’une problématique juridique : peut-on rembourser pour un délit qu’on n’a pas consommé ?

Telle pourrait être la ligne de la défense de Rosette Eboutou, ancien Contrôleur financier auprès du Minesec, dont la participation présumée au délit du détournement réside dans l’avis qu’elle avait apposé sur l’état de paiement des primes de la commission de répartition et de suivi de la gestion de la subvention de l’Etat à l’enseignement secondaire privé pour l’exercice 2006.

Selon la défense de l’ancien contrôleur financier, ce visa était encadré par les dispositions de l’article 46 du décret N° 90/1461 du 9 septembre 1990, fixant les modalités de création, d’ouverture, de fonctionnement et de financement des établissements d’enseignement secondaire et des formations privées au Cameroun, qui dispose entres autres que la fonction de membre de la commission de répartition et de suivi de la gestion de la subvention de l’Etat est gratuite. Toutefois, le ministre des Enseignements secondaires prend en charge les frais de session de la commission.

Autant penser, comme les avocats de Mme Eboutou, que le visa querellé ne souffrirait d’aucune illégalité. D’ailleurs, un rapport circonstancié du contrôle supérieur de l’Etat, au terme des investigations sur la validité de ce visa, acquittait Mme le Contrôleur financier pour faute de gestion non établie, par décision N°0029 du 09 septembre 2008.

Comment comprendre qu’elle continue d’arborer le costume de complice du détournement des 57. 770.000 FCFA décaissés suite à ce visa, et qui n’ont jamais transité par sa bourse ? Questionnent ses avocats. Autant d’incongruités et bien d’autres que la comparution espérée dès le 30 octobre 2015 de Bapès Bapès, du reste l’auteur principal des détournements présumés, pourrait permettre d’élaguer.

Source: camer.be