Ils sont au total 13 personnalités actuellement dans les viseurs de la justice camerounaise pour des faits de détournements de fonds publics. Dans sa parution de ce mercredi le trihebdomadaire L’Anedocte dresse le profil des personnalités concernées.
Lire leur portrait…
JeanWilliam Sollo: de la confiance abusée, mais des erreurs aussi
Son passage à la tête de Camwater n’aura pas été pour lui une partie de plaisir. Il avait voulu très tôt s’affranchir de son mentor qui était aussi sa tutelle. Ce ne fut pas facile. Alors le ministre Basile Atangana Kouna ne ratait aucune occasion pour rappeler au Dg de Camwater que le chef, c’est lui. Ce chef avait tout scellé en parfait flic de renseignements.
Jean William Sollo se trouve donc depuis lundi dans les mailles de la justice pour son passé à Camwater. Le « blanc d’Akono » avait été selon des sources fiables, auditionné à plusieurs reprises au Secrétariat d’Etat à la défense, dans le cadre d’une enquête expresse du procureur de la République, près le tribunal criminel spécial.
Ces auditions étaient consécutives à une dénonciation de l’Agence nationale d’investigation financière. Au total, Sollo William avait laissé un trou de trésorerie d’environ 50 milliards. La Camwater avait par ailleurs une dette de 10 milliards de dettes aux fournisseurs. Cette dette a obligé les partenaires étrangers à avoir vis-à-vis de l’entreprise une attitude attentiste. La Camwater avait cessé le paiement des cotisations à la Caisse nationale de prévoyance sociale. Gérer une transition dans de pareilles circonstances n’était pas une chose aisée.
La tâche du Dg fut davantage compliquée par la présence d’un directeur administratif et financier (Daf) cupide à l’extrême, mais qui avait curieusement sa confiance. Jean de Dieu Mah obtenait de son Dg une signature sur toute sortie d’argent qu’il initiait très souvent à des fins personnelles.
BasileAtangana Kouna dans les mailles de la police
Au moment où nous écrivions ces lignes, Basile Atangana Kouna, exministre de l’Eau et de l’énergie était partout, sauf entre les mains de la police ou de la justice. Éjecté du gouvernement, il lui était interdit de sortie du Cameroun. Son passeport lui avait été retiré.
En bon policier qui a géré pendant plusieurs années l’exploitation du renseignement au centre national de recherche extérieur (Cener), il avait commencé aussitôt à prendre ses dispositions au cas où… Il avait laissé des hommes partout ; ils lui sont restés fidèles.
Il a été sorti du gouvernement au moment où se discute encore le renouvellement anticipé de la concession de l’État du Cameroun à Eneo, producteur et distributeur de l’électricité au Cameroun. C’est également au même moment où la société Camwater va retrouver ses compétences pour la distribution de l’eau potable. Toutes ces révisions des concessions ont fait dire que le ministre en charge de ces domaines avait négocié ces rétrocessions parfois au détriment du patrimoine national, donc parfois à ses immenses profits personnels.
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Selon certaines informations, Basile Atangana Kouna aurait tenté de quitter le Cameroun à plusieurs reprises sans succès. Vendredi 16 mars dernier, selon une source proche de la famille, après un ultime entretien avec ses enfants, il leur a dit qu’il s’en allait sans espoir de retour. Son épouse a été entendue pour la forme au Tcs.
Jean de Dieu Mah: futé et outrancier dépensier
Suspecté d’avoir participé à de nombreuses opérations douteuses pouvant donner lieu à des poursuites judiciaires, l’ex-Daf de Camwater a été arrêté avant-hier à son arrivée à son bureau de Camwater au quartier Koumassi à Douala.
Depuis le 3 juin 2016, il faisait l’objet de plusieurs auditions par les enquêteurs du Tcs. Jean de Dieu Mah était ainsi entendu pour la gestion financière de Camwater où il a servi en sa qualité d’administratif et de financier. Un dossier préoccupait surtout les enquêteurs du Tribunal criminel spécial (Tcs), au sujet des 8 milliards de Fcfa de virements effectués à l’époque à partir de la Bgfi au profit d’un compte ouvert dans une micro-finance dénommé « Alpha Fund ».
Dans cette affaire, il est fortement reproché à Jean de Dieu Mah d’avoir falsifié les chiffres dans plusieurs documents comptables. On évoque également l’affaire de recouvrement des subventions de l’État à environ un milliard et demi à travers un contrat douteux passé avec une ténébreuse société de recouvrement dénommée «Cameroon general services ». Le Daf, dans sa défense, ne serait pas allé de mains mortes : il a indiqué que dans cette affaire, il avait agi sur instructions de son ancien patron, Jean Williams Sollo.
Pr Ayina Ohandja Louis Max: de l’excellence académique à la prévarication
Il fait depuis le 7 février 2018, l’objet d’une interdiction de quitter le territoire. L’annonce a été faite par un message radio porté, émis par les services du commissaire de l’émi-émigration de l’Extrême-Nord à Maroua et du commissariat de l’aéroport de la même ville. Un message identique au premier a été lancé par la gendarmerie du Littoral à Douala.
Il était Secrétaire d’État auprès du ministre des Travaux publics, chargé des Routes. Universitaire de haut vol, son passage à Douala comme directeur de l’Institut universitaire de technologie fut très apprécié en raison des réformes qu’il implémenta dans cet établissement. Ces performances lui valurent sa promotion à la tête de l’École supérieure polytechnique de Yaoundé. Est-ce sa gestion financière des établissements de Douala et de Yaoundé qui le rattrapent, ou celle des routes ?
En février 2013, pendant que le Conseil de discipline budgétaire et financière faisait un constat de détournement de 91,89 millions FCFA par cet universitaire, et qu’il est sommé de payer une amande de 2 000 000 FCFA en guise de sanction, il est par extraordinaire, nommé et installé le 05 octobre 2015 à la faveur d’un réaménagement gouvernemental. Il gère de juteux marchés d’entretien routier.
Ceci aiguise appétits. Il est président de l’association des anciens boursiers du gouvernement français au Cameroun. Son sort est entre les mains de la justice. À elle d’établir sa culpabilité ou son innocence.
Bruno Bekolo Ebe: Agrégé d’économie et aussi des pots aux roses
Cet économiste est sous le coup d’une arrestation. L’ancien étudiant du professeur Georges Ngango serait poursuivi pour détournement de deniers publics à l’université de Douala qu’il a dirigé en tant que Recteur.
De sources bien introduites, il serait dans sa situation actuelle à cause de son frère cadet. Ce dernier, alors comptable dans la même université au moment où le prof Bruno Bekolo Ebe y officiait, aurait sérieusement pioché dans les caisses de cet établissement d’enseignement supérieur.
Avant que le Prof Ayina Ohandja ne découvre le pot aux roses. Ces actes lui auront d’ailleurs valu une incarcération dans une prison de Douala. Quelques temps après sa libération, il aurait été retrouvé mort par pendaison dans un quartier de la ville. Les raisons n’étant pas élucidées jusqu’à ce jour.
Outre les fonctions suscitées, depuis le début de sa carrière, le professeur Bruno Bekolo Ebe a été respectivement secrétaire général du Centre universitaire de Douala, vice-recteur de l’université de Douala, recteur de l’université de Yaoundé. II est président de l’association des professeurs agrégés du Cameroun. Selon ses proches, c’est un fin connaisseur du système et de l’administration universitaire du Cameroun.
Adolphe Minkoa She: dans la ligne de mire…
Il ne fait peut-être pas encore l’objet de poursuites judiciaires effectives, seulement, le regard des autorités ne se détournent pas de ses faits et gestes depuis quelques temps.
Les commentaires ne tarissent plus dans les chaumières à son sujet, depuis son bras de fer avec le Doyen de l’université dont il a la charge sur le Doctorat professionnel. Depuis lors, on dirait que le Recteur de l’Université de Yaoundé s’est attiré les foudres de part et d’autres. Il ferait l’objet d’une enquête en cours par les autorités judiciaires du pays.
Son passeport lui aurait été retiré et ses comptes bancaires gelés.
Tout part de la décision N°18/044/UYII/CAB/R du 13 février 2018 portant annulation d’une thèse de doctorat en droit public à l’Université de Yaoundé II. C’est cette dernière qui vient mettre au goût du jour ce que l’opinion publique a qualifié de «magouille » dans cette Université. Commence alors la guerre ouverte entre le Professeur Adolphe Minkoa She et le Doyen le Professeur Magloire Ondoa.
Pendant ce temps le ministère des Finances n’a aucune trace de tout ce que les étudiants affirment avoir versé à l’Université. Il est quand même question de beaucoup de fonds, vu leur nombre (360 à payer 1.500.000 frs par tête) et le montant à payer. Et en tant que autorité administrative de l’Établissement il doit rendre compte. Sûrement, il devra le faire en collégialité avec le doyen, instigateur de la situation en question.
Magloire Ondoa: dans la même nasse
Il s’est attiré les foudres du Recteur de l’université de Yaoundé 2, le Prof Adolphe Minkoa She à travers un « nième acte de provocation, d’insubordination caractérisée et de violation grossière et délibérée de la réglementation et de l’éthique universitaires ».
Ce n’est pas pour cette passe d’armes épistolaire que le Doyen de la faculté de Droit est devant le Tcs. Le Pr traîne avec lui un dossier relatif au droit d’auteur, depuis le temps où il occupait pendant quatre ans le poste de président du « Comité permanent de médiation et de contrôle des organes de gestion collective du droit d’auteur et des droits voisins ».
Les magouilles de l’agrégé en Droit ont été révélées au grand jour dans une correspondance à lui adressée par le Recteur de l’université de Yaoundé 2 en date du 13 février 2018. Il y est clairement mentionné que le Pr. Magloire Ondoa « use régulièrement de ruse dans sa profession pour faire soutenir des étudiants en transformant une soutenance de Doctorat Professionnel en un doctorat Ph.D en droit public ».
L’histoire éclate à partir de la soutenance de Gilbert Ngoumou dont la Thèse a hangé de nature au fil des années. Ceci bien sûr sous l’impulsion du Doyen de la Faculté des Sciences juridiques et politiques. Passant ainsi de « Doctorat professionnel » en 2014 à « Thèse Ph.D professionnelle » en 2017. Ce qui remet aussitôt en question les autres 359 soutenances d’étudiants.
Jean Jacques Ndoudoumou: six ans d’anxiété
Limogé le 31 octobre 2012, après 10 ans passés à la tête de l’Agence de régulation des marchés publics (Armp), Jean Jacques Ndoudoumou avait été ébranlé 5 mois plus tôt par une sentence du Conseil Supérieur de l’État, précisément le 11 juin 2012. Au lendemain d’une comparution devant le conseil de discipline et financière de l’Armp.
Les dossiers qui accablent donc l’ex régulateur des marchés publics sont désormais bouclés au Tribunal Criminel Spécial. Accusé de « fautes lourdes de gestion » par une mission d’enquête effectuée pendant quatre mois à l’Armp, la Commission nationale anti-corruption lui avait adressé deux demandes de clarification pour népotisme, laxisme et pillage à grande échelle. Autre grief retenu contre lui, il s’agit du projet Azzamis d’une valeur de 800 millions de francs.
Un projet qui consistait en la mise en place d’une banque de donnée à l’Armp. Il avait été mis en débet pour 62 millions de francs « représentant le montant des primes de recouvrement indûment et personnellement perçues pour la période allant de 2007 à 2010 », a révélé une source du Tcs en charge du dossier. En outre, en janvier 2012, le Secrétaire général de la présidence de la République lui exigeait le versement au Trésor public de 400 millions de Fcfa, représentant des primes de recouvrements dilapidés.
Célestin Ndonga: Intello, renifleur et dandy
Il lui est Interdit de sortir du Cameroun. Alors qu’il s’apprêtait un jour à l’aéroport de Yaoundé- Nsimalen à embarquer pour l’étranger, l’ex-directeur général de l’Edc découvrira que son nom figure sur la liste des personnes interdites de quitter le pays.
Célestin Ndonga est accusé de détournement de près de 359 millions de Fcfa, consécutifs à un contrat avec « Rio Tinto» cette entreprise canadienne mêlée à la gestion d’Allucam. S’ajoute à ce montant une autre somme de 3,10 millions de Fcfa dont il devra justifier l’usage.
L’accusé s’indigne contre la décision prise par le Tribunal criminel spécial l’interdisant de sortir du territoire national. En outre, le Directeur Général d’Electricity Development Corporation (Edc), Célestin Ndonga, dont la gestion pour la période allant de janvier 2008 à juillet 2009 a été examinée, écope également d’une amende spéciale de 2 millions de Fcfa et de l’interdiction d’être responsable dans l’administration ou de la gestion des services publics ou des entreprises d’Etat, à quelque titre que ce soit, pendant un délai de cinq ans.
Il a également détourné 535 millions de Fcfa au préjudice de l’entreprise dont il avait la responsabilité. Au total, 18 fautes de gestion ont été retenues contre lui et le Cdbf a estimé que celles-ci ont causé à Edc un préjudice financier évalué à près de 830 millions de Fcfa. Installé à la tête d’Edc le 21 février 2008, Célestin Ndonga a été limogé le 24 juillet 2009.
Ce diplômé de l’Ecole centrale de Paris aurait fait la fierté de l’intelligentsia camerounaise ; malheureusement, ce dandy qui a dirigé le département de l’Industrie, est resté un renifleur d’argent à tout prix.
Théodore Nsangou un « éperviable » en puissance…
L’actuel Directeur général d’Electricity Development Corporation doit rembourser plus de 350 millions FCFA au Trésor public. C’est du moins ce qu’indique le second rapport de la Commission nationale anti-corruption (Conac) sur l’état de la corruption au Cameroun en 2011 publié le 29 novembre dernier qui l’épingle.
Transmis à la présidence de la République, celui-ci suggère « que cette somme représentant le coût des véhicules et des frais inhérents abusivement prévus dans le marché de l'entreprise de construction du barrage de Lom Pangar, et dont le directeur général d'EDC s'est irrégulièrement accaparé, soit restituée sans délais au Trésor public. Ceci sans préjudice des sanctions administratives et pénales éventuelles ».
D’après les enquêtes menées par la Conac sur le chantier en 2011, il y a un écart de deux véhicules entre le contrat de l'entrepreneur qui en prévoit 26 à remettre à la mission de contrôle et celui de la mission de contrôle qui en prévoit 24 à recevoir de l'entrepreneur. Deux véhicules sont donc sans affectation. Selon la Conac, « il est fort à craindre que cette erreur présume une programmation délictuelle de détournement de ces deux véhicules dont le coût estimé est à soixante millions de FCFA.
Le tout porte donc à 354 666 667 F.CFAce que le Dg actuel devra rembourser à l’Etat du Cameroun, « Sous peine d'être qualifié de fait constitutif de corruption ».