Poursuivi par l’entreprise de téléphonie mobile mais acquitté devant le Conseil national de la Communication, «EcoMatin» a décidé à son tour de porter plainte à son adversaire d’hier pour faire réparer les dommages jugés importants qu’il dit avoir subis à l’époque du fait de ce dernier. L’affaire portait sur la dénonciation d’un harcèlement sexuel au sein de l’entreprise Orange Cameroun. Le plaignant a donné sa version des faits au juge.
Il faudra encore attendre la prochaine audience prévue le 14 juin 2O22 pour être davantage édifié sur l’affaire qui oppose le directeur de publication de «EcoMatin», M. Fidjeck Emile, à l’entreprise de téléphonie mobile Orange Cameroun, devant le Tribunal de première instance (TPI) de Yaoundé centre administratif (CA). En principe, c’est au cours de ce rendez-vous judiciaire que le représentant de l’entreprise pourra enfin présenter sa version des faits. Le dossier est examiné devant le Tribunal de première instance (TPI) de Yaoundé centre administratif.
Lors de la dernière audience tenue le 10 mai 2022, le directeur de publication de «EcoMatin», M. Fidjeck donné son témoignage devant le TPI de Yaoundé centre administratif. Il raconte que l’article de presse qui a engendré la procédure judiciaire en cours a été rédigé par lui-même le 14 juillet 2021. L’article en question faisait état, d’après lui, de ce que la directrice des Ressources humaines d’Orange Cameroun, Mme Evelyne Enguele, faisait l’objet d’un harcèlement sexuel de la part de Fréderic Debord, directeur général de cette entreprise à l’époque des faits. M. Fidjeck explique que c’est après la parution de l’article critiqué que l’entreprise de téléphonie mobile avait engagé une procédure au Conseil national de la Communication(CNC), l’organe régulateur des médias, dans le but d’obtenir la condamnation d’EcoMatin et de son directeur de publication.
Vaste campagne médiatique
Dans sa plainte adressée au CNC, Orange Cameroun estimait que les écrits du journaliste portaient atteinte à l’honorabilité du DG, personnalité publique, et à l’entreprise citoyenne. Le 12 novembre 2021, le CNC avait, après examen du dossier, rendu une décision de non-lieu en faveur du journaliste. L’organe régulateur des médias avait estimé que le journaliste avait fait un travail conforme à l’éthique et la déontologie de la profession de journaliste. Et que les faits qui lui étaient reprochés n’étaient pas fondés. Surtout qu’il avait suivi une démarche professionnelle de recoupement en adressant une lettre à Orange Cameroun pour avoir sa version des faits.
Cette lettre, dit-il, était restée lettre morte. «Le DG qui a promis de nous recevoir pour nous donner d’amples informations dans cette affaire a pris l’avion précipitamment pour l’étranger», a témoigné M. Fidieck. Après les démentis faits par Orange Cameroun, dans le but de laver son honneur et celui de son DG, M. Fidjeck va, en réaction, rédigé un second article de presse le 9 août 2021. Selon le Directeur de la publication, ces deux textes avaient alors ébranlé l’entreprise Orange qui avait immédiatement organisé une vaste campagne médiatique pour démentir les accusations portées contre elle et «mis sur pied une grosse machine pour broyer EcoMatin et étouffer les différentes publications qui accablaient Frédéric Debord».
Répondant aux questions des avocats, le DP de EcoMatin a indiqué qu’il ne pouvait pas dévoiler ses sources avant de souligner que cette affaire de harcèlement perpétré contre la directrice des Ressources humaines de Orange Cameroun était déjà bien connue et répandue au sein de l’entreprise et même au-delà. «Le directeur Afrique ainsi que le siège de Orange étaient déjà saisis de l’affaire avant qu’elle soit publiée dans mon journal qui s’est appuyé sur une sérieuse enquête».
Décision de non-lieu
A la question du parquet de savoir quelles sont les sanctions maximales que M. Fidjeck pouvait encourir à la suite de la plainte de l’entreprise Orange auprès du CNC, le journaliste répond que ces sanctions sont la fermeture définitive du journal et la radiation définitive des auteurs de l’article en cause de la profession de journaliste. Est-ce qu’il y a des voies recours pour les décisions du CNC, est-ce que Orange a utilisé lesdites voies ? «A ma connaissance, il y a des voies de recours mais Orange ne les a pas exploités. Ce qui rend définitive la décision du CNC», a expliqué le plaignant. Ce dernier dit avoir subi un énorme préjudice étant donné que la campagne médiatique d’Orange Cameroun avait été à l’origine de la mévente de ses journaux.
S’agissant enfin du licenciement de Mme Ngo Mbog Agathe, une ex-employée de Orange Cameroun, pour la somme de 9 mille francs dont il était question dans l’un des articles querellés, le journaliste a indiqué que le CNC avait examiné tous les chefs d’accusation sur la base de différents documents qui lui avaient été communiqués et avait rendu sa décision. Il précise, en outre, que TGI du Mfoundi statuant en matière civile avait qualifié le licenciement querellé d’abusif. L’entreprise de téléphonie mobile avait été condamnée à verser à Mme Ngo Mbog Agathe, en guise de dommages et intérêts, plus de 75 millions de francs. Ce qui signifiait que les informations publiées par le journaliste n’étaient pas mensongères. Il conclut que les accusations de la société Orange ayant été rejetées par le CNC comme étant non fondées, il avait décidé de porter plainte contre Orange Cameroun pour laver son honneur bafoué.
Selon ses dires, le non-lieu prononcé par l’organe de régulation des médias démontrait à suffire que M. Fidjeck n’est pas un mauvais journaliste comme le prétend son adversaire. C’est au terme de son exposé qu’il a fourni au tribunal les documents au soutien de l’accusation. Lesdits documents ont été admis comme pièces à conviction dans le dossier de procédure. Pour sa part, le représentant d’Orange Cameroun, qui a choisi de déposer comme témoin sous serment, a demandé et obtenu un report de l’affaire. Il espère mettre à profit le délai qui lui a été accordé pour mettre les documents dont il compte se servir pour la défense de l’entreprise de téléphonie mobile en la forme requise par la loi. Le dossier revient le 14 juin 2022.