Paul Biya fête ses 33 ans de règne dans la sobriété

Paul Biya Cold Paul Biya

Sat, 7 Nov 2015 Source: lemonde.fr

Un nouveau jour s’est levé à Yaoundé. La chaleur suffocante qu’il fait en ces premières heures de la matinée ne semble pas perturber les vendeurs à la sauvette du lieu-dit Rond-point de la poste centrale, principal point de passage des habitants de la capitale du Cameroun.

Comme d’ordinaire, ils vont et viennent entre les voitures et les taxis, tous de vieilles guimbardes de couleur jaune, pour proposer qui des mouchoirs en papier qui de petites bouteilles d’eau à la qualité douteuse. Non loin, sur un bout de trottoir, Sadi Bofia vend des cartes de recharge téléphonique. Il a le visage serré. La veille, il a fait de très mauvaises affaires et « n’espère rien pour aujourd’hui. Surtout aujourd’hui ».

« Au Cameroun, le 6 novembre ne peut pas être un jour de chance, lâche, dépité, ce grand gaillard de 34 ans qui a déjà trois bouches à nourrir. Il n’y a pas de travail, pas d’argent, on manque de tout. C’est comme si on régressait pendant que les autres avancent. » Sadi Bofia évoque, à sa manière, le 33e anniversaire ce vendredi de l’arrivée du président Paul Biya au pouvoir.

Le 6 novembre 1982, à 49 ans, M. Biya succède au premier président Ahmadou Ahidjo, démissionnaire. Le nouveau chef de l’Etat promet aussitôt aux Camerounais des lendemains qui chantent, avec un programme ambitieux dit du « Renouveau », censé être marqué par la rigueur dans la gestion des affaires publiques et la moralisation des comportements.

Mais trente-trois ans ont passé et le chef de l’Etat camerounais, bientôt âgé de 83 ans, est devenu le symbole d’une classe politique vieillissante, usée. « Il y a une colère sourde que les gens craignent encore d’extérioriser. Partout à travers le pays, vous ressentez de la lassitude, comme une souffrance de ne jamais savoir de quoi sera fait le lendemain », décrit Jean-Pascal Talla, un membre de la société civile, animateur de la « Grande palabre », un programme de débats citoyens dont les autorités interdisent systématiquement les réunions depuis un an. Pour lui, la prospérité promise lors de l’accession de Paul Biya au pouvoir « n’était que du vent ».

Aujourd’hui au Cameroun, certains chiffrent donnent le tournis. Plus de 70 % des 25 millions d’habitants du pays ont moins de 30 ans et la moitié d’entre eux est au chômage. Le salaire minimum interprofessionnel garanti (SMIG) s’élève à 36 200 francs CFA (55, 11 euros). Malgré la croissance soutenue autour de 5 % ces dernières années, une personne sur quatre vit toujours en dessous du seuil de pauvreté, avec moins d’un euro par jour.

De faibles performances, malgré des ressources naturelles importantes, qui valent au pays d’être classé au 152e rang de l’indice de développement humain de l’ONU, derrière le Myanmar (150e). La couverture sanitaire, elle, demeure précaire avec un médecin pour 15 000 habitants.

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