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Paul Biya: une biographie toute particulière du président réélu

Jean Noah Biya Limogeage Une biographie onomastique de Paul Biya.

Wed, 24 Oct 2018 Source: Signatures N°101

Le nom est ce qui permet à une chose d'exister. Ce qui n'est pas connu d'une communauté culturelle n'existe pas dans son lexique. A propos du nom, il est de deux natures en règle générale. Il est un nom commun, celui par lequel on désigne tout ce qui relève d'une nature non humaine. Il est également un nom, le nom propre, le patronyme. Il mérite qu'on en étudie l'étendue et la portée dans le caractère d'un individu. L'onomastique est cette technique ; c'est l'art de la dénomination. En Afrique noire, particulièrement chez le Bantu, chaque patronyme a un sens et une signification. Le nom tire son origine des éléments animaliers, végétaux, minéraux, astraux, conceptuels et divins. Chez les Yevôl du Cameroun par exemple, des personnes s'appellent Zambe, ou Dieu. Mais alors, et au demeurant, il n'y a pas de distance entre le nom commun et le nom propre, le patronyme.

Ils sont sémantique- ment liés, le patronyme provenant du nom commun que portent les choses et les éléments de l'univers. Aussi est- il régulier de constater que le nom exerce sa charge sémantique su son porteur. On agit sou- vent selon le nom qu'on porte. A cet effet, celui qui a reçu pour patronyme : Zeh ou panthère, Ngoe ou porc, Bisogo ou l'insatiabilité sexuelle, court d'énormes risques d'être tour à tour : féroce et cruel, glouton et goinfre, lubrique et concupiscent. Donc, il est des noms somme toute négatifs, et peu recommandables.

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Les faire porter aux enfants peut être préjudiciable. Pourtant, afin de ne pas oublier le souvenir des membres de la famille décédés, l'on attribue automatiquement leur nom aux nouveaux - nés, quelle qu'en soit la portée signifiante. Ceci est embarrassant. On peut élever contre sa volonté une horde d'animaux féroces, donc dangereux pour les hommes. Il suffit que leurs ancêtres aient porté pour noms : hyène, léopard, serpents, crocodile... Heureusement, il est un autre patronyme que créent les Ekang, les Beti, Bulu, Fang, Ntumu, Maka, Ngumba..., tous fils de Betibenanga. Ce patronyme c'est le ndan, ou devise.

Paul Biya à l'épreuve de la devise :

La devise ndan est un nom d'appel. Et même plus, la devise est un vœu qu'on émet à l'adresse du nouveau- né. C'est ce qu'on souhaite qu'il devienne dans la vie. Afin d'échapper à la charge sémantique d'un nom défavorable, peu bénéfique ou préjudiciable, alors on élude le problème par la pratique du ndan. C'est le nom par lequel on appelle le plus souvent la per- sonne qui influe sur elle. Biya'a a sa devise.

Mais son patronyme, pour en parler un peu, est d'origine verbale et vient étymolo- giquement du verbe yak. C’est ce qui cloche, qui gêne, qui s'oppose à l'unifor- misme. C'est le contradicteur. A propos de Monsieur Yak, on ne l'aime pas beaucoup et il est très souvent seul à cause de ses prises de positions. Il n'aime pas le suivisme benoit. Et ça c'est bien sûr Biya’a comme nom d’origine conceptuelle.

Voilà succinctement le sens et la signification du patronyme de celui dont nous parlons. Paul Biya’a. Curieusement, le patronyme de l'enfant de Mvomeka'a est conforme à sa devise ndan. Elle est la sui- vante :

Môt ane étam,

Môt ane étam étam Biya’a bi Mvondo Ndôman Mvondo Asam

La traduction de ce discours-là, plus idio- matiquement proche de la langue française, est la suivante :

Le destin est singulier

Le destin est unique non cessible ni contagieux

Ainsi est le destin de Biya’a de Mvondo Fils de Mvondo Asam.

Ceux qui affirment le connaître de près, ceux de ses biographes et analystes ou exégètes sur la base de ses écrits et comportements au quotidien, un quotidien dont on dit qu'il n'est pas de tout repos, diront de lui qu'il est l'imprévisibilité faite homme. Ils disent que bien peu de choses l'émeuvent, le déstabilisent ou le mettent hors de lui. Il déroute dès lors tous ceux qui attendent qu'il réagisse selon la logique du commun des mortels. C’est à croire qu'il est sans émotion ni émotivité.

Môt an'étam, le vrai homme est celui qui assume son destin. Il répond de ses actes parce qu'il sait que son juge est celui ou ceux qui l'ont envoyé ici-bas. Un jour, tous nous aurons à répondre de la manière dont nous avons assumé ou réalisé notre destin. Il est inscrit en nous et nous rappelle à chaque acte, le but de notre venue sur terre, notre vocation, notre appel.

Paul Biya face à l'enjeu de sa stature dans l'histoire, titre de la présente investigation, impose à Signatures de s'ouvrir à davantage d’herméneutes aussi multidisciplinaires que possible. Et alors, plus nombreux devraient être les savants traditionnels. Sages de nos villages, voyants et clairvoyants, médiums et thaumaturges. Seuls eux, hommes et femmes aux quatre z'yeux, savent confirmer ou infirmer jusqu'où est- ce qu'un individu a pu jouer le rôle pour lequel il est ici-bas. Les improvisateurs, truqueurs, arrivistes, rêveurs, élucubrâtes et somnambules ratent leur rendez- vous avec l'histoire parce qu'ils fuient parfois leur destin ; ou encore, ils ne se connaissent pas, ne savent pas pour quoi ils sont ici-bas, ni ce qu'on attend d'eux au moment de leur retour à la source originelle qui les a envoyés.

Sait-on toujours s'interroger sur la stature de Biya’a bi Mvondo, dont on sait les revirements et volte- faces qu'il aurait pu pratiquer sil voulait faire plaisir aux maîtres du monde... Il est resté inébranlable telle une souche d'arbre face aux tempêtes de quelques dirigeants d'ici et d'ailleurs. S'il avait été tout autre que Môt an'étam, nous n'en serions pas là à deviser sur lui. En outre, nous rions en coin de ceux des scribes sur Biya’a Paul qui prétendent le connaître sans toutefois comprendre le langage tambouriné du nkul. Le ndan ne se profère que sous sa formule sifflée étyi'a. Pour parler totalement d'un Ekang, il faut connaître son patronyme, son ndan et y compris sa formule sifflée usitée par le tambour nkul.

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Alors on peut cerner un peu plus le sens et la signification de Môt an'étam. Môt an'étam affirme que celui- là a fait son choix et sait l'assumer, jusqu'au bout, quoiqu'il en coûte. Chez les Ekang, l'on ne cerne l'homme qu'en maîtrisant son patronyme, son ndan, celui de son homonyme dont il porte le patronyme. En dehors de ces autres aspects, la connaissance et les analyses restent elliptiques, tronquées. Voilà donc l'une des analyses sur la thématique : Paul Biya face à l'enjeu de sa stature dans l'Histoire. Sa réponse repose dans ce refrain : Môt ane étam, Môt ane étam étam Biya’a bi Mvondo Ndôman Mvondo Asam.

Source: Signatures N°101
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