La déclaration est de la bouche la plus autorisée en matière d'état des lieux de la communication au Cameroun. Le ministre de la Communication, Porte-parole du gouvernement, affirme : "Bien que la presse camerounaise évolue dans un environnement qui lui permet d'exercer librement, le principal défi auquel elle est confrontée demeure, nous le disons une fois de plus, l'amélioration de ses conditions de viabilité économique". Pour apporter un début de solution à cette situation préoccupante, le gouvernement a mis en place un mécanisme de soutien dénommé « Appui institutionnel de l'État aux médias à capitaux privés ». Sauf que celui-ci, en plus de disposer d'une cagnotte littéralement modique, est limité à la presse écrite. Dans l'optique d'élargir le spectre de cet appui étatique, le ministre de la Communication a, dans sa déclaration de circonstance, annoncé "dans un avenir proche", la mise en place d'un fonds de développement spécial de l'audiovisuel tel que prévu par la loi de 2015 régissant l’audiovisuel au Cameroun. Un peu plus de dix ans après, on dira qu'il n'est que trop urgent. On pourra toujours discourir sur la liberté de publier, de diffuser et d'entreprendre au Cameroun, mais le nœud du problème reste d'assurer l'indépendance économique du journaliste.
On pourra toujours inviter la presse autour d'une table-ronde, comme ce fut encore le cas cette année lors de la Journée mondiale de la liberté de la presse, pour réfléchir sur " le rôle des médias face aux enjeux des changements climatiques " ou sur la responsabilité des médias devant " les enjeux de la migration numérique ", mais tant que les hommes de médias ne peuvent bénéficier d'un travail stable et d'un traitement salarial décent et régulier, il restera difficile de mettre fin à ces dérives régulièrement décriées qui sont entre autres le chantage, la diffamation, la complicité passive dans la diffusion du discours de haine.
Dans le secteur des médias, l'argent est en effet le nerf de la guerre. Plusieurs entreprises de presse ont fermé leur salle de rédaction faute de ressources financières pour soutenir la location des lieux et assumer les charges salariales des employés. La situation de précarité sociale fait malheureusement le lit de la corruption et de toutes sortes d'arnaques auxquelles s'exposent les journalistes, quand ils n’en sont pas eux-mêmes les acteurs. La conséquence inévitable est que les professionnels des médias font alors très peu de cas de l'éthique et de la déontologie du métier. Chacun se rappelle l'adage qui dit clairement que dans le manquement, la vertu fout le camp. Sans doute que lors de la visite de certains médias audiovisuels et de la presse écrite effectuée la semaine dernière à Yaoundé, à la veille de la Journée mondiale de la presse, René Emmanuel SADI a pu capter en direct les doléances des différents patrons de presse sur les voies et moyens que les uns et les autres souhaitent voir l'État mettre en œuvre pour les soutenir dans la liberté de publier, de diffuser et d'entreprendre.