Emprisonnements, menaces de mort, vandalisme : Jeune Afrique dévoile l'ampleur des entraves que subit le candidat de l'opposition dans sa course vers la présidentielle du 12 octobre.
"Je vais t'écraser violemment." Ces mots, proférés par le maire d'Akonolinga, résument l'atmosphère dans laquelle se déroule la campagne de Cabral Libii, candidat du Parti camerounais pour la réconciliation nationale (PCRN) à la présidentielle du 12 octobre. Jeune Afrique révèle l'existence d'un climat d'intimidation systématique qui frappe le candidat et ses partisans à travers le pays.
Dans une enquête exclusive, Jeune Afrique a pu documenter plusieurs cas d'entraves graves à la campagne du candidat de l'opposition. À Ayos, dans la région du Centre, des militants du PCRN ont été emprisonnés. Dans le Dja-et-Lobo, les équipes de campagne font face à des menaces de mort, ainsi qu'à des violences et humiliations répétées.
Ces incidents ne sont pas isolés. Jeune Afrique a recueilli de multiples signalements convergents : convocations de militants, interdictions de réunions, destruction de visuels de campagne. Le candidat Cabral Libii dénonce auprès de notre rédaction des consignes "venues d'en haut", suggérant une coordination de ces entraves au plus haut niveau de l'État.
"La vague orange progresse dans une atmosphère tendue", confie à Jeune Afrique l'entourage du candidat. Ce que Cabral Libii qualifie de "vandalisme politique" se manifeste de multiples façons : élus du parti au pouvoir, le Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC), hostiles qui entravent localement les activités de campagne, intimidations administratives, harcèlement des sympathisants.
Sur ses réseaux sociaux, que Jeune Afrique suit quotidiennement, le candidat alterne entre encouragements aux militants harcelés et dénonciations virulentes. Il décrit un régime Biya en "dictature" finissante, "apeurée par la vague orange" et prête à tout pour étouffer cette contestation.
Jeune Afrique révèle que ces entraves suivent un schéma récurrent dans plusieurs régions. Les autorités locales, souvent issues du parti au pouvoir, multiplient les obstacles administratifs : autorisations de meetings refusées ou retardées, convocations de responsables locaux de campagne, pressions sur les propriétaires de salles devant accueillir des événements du PCRN.
Cette stratégie vise manifestement à limiter la capacité de mobilisation du candidat de l'opposition. Pourtant, selon nos informations exclusives, ces intimidations produisent parfois l'effet inverse : elles renforcent la détermination des militants et alimentent le discours victimaire du candidat.
Face à ces pressions, Cabral Libii adopte une posture de résistant. "Nous ne nous tairons pas !" martèle-t-il dans ses interventions publiques. À 45 ans, il se pose en porte-voix d'une jeunesse qui refuse "l'exil ou la résignation", comme il l'a confié à Jeune Afrique.
Cette combativité affichée s'accompagne d'une stratégie de documentation systématique des exactions. Le PCRN compile les témoignages, filme les incidents, publie les preuves sur les réseaux sociaux. Une façon de transformer chaque entrave en argument de campagne et de mobiliser une base militante qui se sent assiégée.
Ces révélations de Jeune Afrique soulèvent des questions cruciales sur l'état de la démocratie camerounaise à la veille du scrutin. Le contraste est saisissant entre le discours officiel sur le pluralisme politique et la réalité du terrain que nous avons pu documenter.
"Nous n'avons ni la puissance financière du RDPC, ni les médias d'État", reconnaît l'équipe de campagne auprès de Jeune Afrique. Dans ce contexte déséquilibré, les intimidations ajoutent une couche supplémentaire de difficultés pour un candidat qui tentait déjà de combler son retard avec des moyens limités.
Le 12 octobre dira si cette stratégie d'entrave aura suffi à contenir la progression de la "vague orange". Mais au-delà du résultat électoral, ces pratiques révélées par Jeune Afrique interrogent sur les conditions d'un véritable débat démocratique au Cameroun et sur la capacité du système politique en place à tolérer une opposition dynamique et combative.