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Produits pétroliers : le Cameroun au bord d’une nouvelle crise

Dos au mur, le gouvernement a rompu d’avec le silence sans donner plus de pre?cision

Ven., 13 Mai 2022 Source: Le Messager du 13-05-2022

Malgré les assurances du gouvernement au sujet de la disponibilité des stocks confortables de produits, la menace d’une pénurie de carburant plane. Retenues depuis six mois pour continuer à livrer le carburant au Cameroun, des entreprises n’arrivent plus à honorer leurs engagements. Toute chose qui inquiète les automobilistes.

Mercredi 11 mai 2022. Jean, conducteur de taxi ordinaire a parcouru plusieurs stations de service avant de trouver du carburant à Douala. Outre le carburant, il y a également le gasoil qui manque à la pompe. En mars dernier déjà, l’énergéticien Eneo attirait l’attention du gouvernement sur «l’insuffisance de combustible (LFO) au niveau de la Scdp (Société camerounaise de dépôts pétroliers) ».

Une situation qui avait eu pour conséquence la restriction de la fourniture des marketeurs en fioul dont Total, Ola et Neptune Oil qui alimentent ses centrales thermiques. Aussi, le concessionnaire du service de fourniture de l’électricité prévenait dans un communiqué que « des contraintes dans l’approvisionnement en combustibles vont impacter la production de sa centrale thermique de Limbe à partir de ce lundi 18 avril 2022. (…) De ce fait, le déficit de l’offre sera accentué dans les régions du Littoral, du Sud-Ouest, de l’Ouest et du Nord-Ouest ».

Dos au mur, le gouvernement a rompu d’avec le silence sans donner de précision sur le volume du stock disponible. Gaston Eloundou Essomba monte au créneau et affirme cependant que «À la faveur des cargaisons qui viennent d’être livrées, le pays dispose d’un stock confortable à même de satisfaire la demande nationale.

Des instructions ont par ailleurs été données à la Sonara (raffineur public, converti en marketeurs depuis qu’un incendie a consumé ses installations, NDLR) et à la Scdp de travailler de concert avec Camrail (transporteur ferroviaire, NDLR) et des marketeurs en vue d’accélérer le transfert desdits produits, sans délais, vers les différents dépôts de l’intérieur qui ont vocation à approvisionner les stations-service du pays ».

La subvention des produits au point mort Particulièrement dépendant des importations de carburant, le Cameroun subit les effets de la guerre en Ukraine sur la logistique et le prix du pétrole. Craignant une fronde des transporteurs, Yaoundé n’a pas hésité à puiser dans les réserves de la raffinerie de sucre Sosucam pour dépanner le nord du pays.

Toutes les sociétés écoulant des produits pétroliers en Afrique de l’Ouest et centrale se fournissaient jusqu’à présent en partie en Russie. Avec les sanctions américaines, elles vont devoir revoir leurs plannings d’approvisionnement.

Pour Gunvor et Litasco, les plus connectées à Moscou, la transition va être acrobatique. Une situation que craignent les camerounais qui redoutent une augmentation du prix à la pompe. « Si le gouvernement ne continue plus de subventionner l’importation de ces produits », avise un économiste. Dans certaines stations -service de la cité économique, le carburant ne coule plus à la pompe.

« Nous n’avons pas été approvisionnés ces jours-ci. Je ne puis vous dire davantage. Le chef de piste est mieux placé pour vous en dire un peu plus », nous confie un pompiste. Ailleurs chez un autre concurrent, l’heure est au rationnement. « Le stock n’est pas important. Nous avons opté en attendant le prochain approvisionnement de privilégier les motos et autres engins légers », nous pré- vient-on.

Des réactions qui indiquent bien que la pénurie est d’actualité. Pour mieux éclairer la lanterne de ses lecteurs, Le Messager s’est rapproché des sources bien introduites dans le secteur pétrolier. Il en ressort qu’au dernier trimestre 2021, quatre entreprises, Trafigura, Mocoh, Vitol et Sahara avaient été sélectionnées à l’issue d’un appel d’offres pour fournir du carburant au Cameroun via la Sonara (80%) et les autres opérateurs locaux dans la filière (20%). Mais les trois entreprises n’arrivaient pas à livrer les quotas attendus.

A en croire lesdites sources du Messager, le gouvernement camerounais aurait même assoupli les termes du contrat pour alléger leurs charges, compte tenu de la flambée du brut sur le marché international. « Jusque-là, elles n’ont pas toujours pu réaliser les commandes à elles attendues au dernier trimestre de 2021 », assurent nos sources.

Les cours du baril de pétrole brut en hausse

Il faut dire que les principaux fournisseurs du Cameroun, comme ceux de la plu- part des pays du golfe de Guinée, s’approvisionnent en Ruissie. Or, les sanctions économiques prises contre la Russie ont restreint l’accès à ce marché et donc à ses hydrocarbures. Une situation qui a, en plus, engendré la hausse des prix.

Les cours du baril de pétrole brut (matière première permettant de produire du super, du gasoil et du pétrole lampant) sont passés de 51 dollars à 91 dollars (+78%) de janvier 2021 à janvier 2022 et ont atteint 139 dollars en mars 2022 à la faveur du conflit russo-ukrainien, soit « le niveau le plus haut depuis la crise de 2008 ». La tonne de diesel qui coûtait à l’inter- national 700 dollars s’achète aujourd’hui à 1200 voire 1300 dollars.

À noter qu’à cause d’un incendie survenu à la Sonara en mai 2019, le Cameroun s’est vu contraint d’importer les produits pétroliers finis (gasoil, super , pétrole lampant…) consommés sur son territoire. Pour maintenir inchangés les prix des carburants actuellement pratiqués à la pompe, l’État devrait dépenser 672 milliards de Fcfa en termes de subventions en 2022, soit 376 milliards pour le gasoil. Il a pour- tant budgétisé la subvention aux carburants à seulement 120 milliards de Fcfa.

Source: Le Messager du 13-05-2022