Les adeptes de cette pratique connaissent une expansion certaine par rapport à la forme classique d’antan.
Il y a quelques jours, alors que Jules Moffa vient de participer à la rencontre hebdomadaire de son club 2-0 à Soa, il décide en compagnie de quelques amis d’aller partager une bière dans un point de vente de produits brassicoles du coin. Il est surpris de voir entrer quelques minutes après son ami d’enfance, Crépin N., prendre place dans le même bar. Il est 11 heures. Accolades et souvenirs s’enchainent. Lorsque Jules Moffa demande à son ami la raison de sa venue à Soa, il lui dit qu’il a une affaire à régler. Ce dernier échange constamment avec quelqu’un via le réseau social whatsapp. Une jeune et ravissante demoiselle et étudiante le rejoint. C’est Françoise, résidente dans la même cité universitaire que Jules Moffa. Après un bref échange, Crépin N. et Françoise s’éclipsent. Après une heure et trente minutes environ, Crépin N rejoint son ami qui était toujours en train de lever le coude. Une fois de nouveau installé, Jules Moffa veut comprendre et pose la question de savoir comment sa voisine et lui se connaissent.
« En surfant sur mon mur à Facebook, constamment je vois des annonces sur des groupes de rencontres où on me demande juste de laisser mon numéro de téléphone. Lorsque je l’ai fait j’ai été introduit dans un groupe sur whatsapp quelques minutes après. J’ai reçu un autre message me demandant de faire un dépôt de 2.000 Fcfa à un numéro de téléphone ainsi que le genre de filles que je voulais rencontrer, la tranche d’âge que je voulais ainsi que mes préférences en pratiques sexuelles», a expliqué Crépin N à son ami.
Jules Moffa ne cache pas sa stupéfaction lorsqu’il constate que son ami est venu de Yaoundé pour rencontrer une commerçante du sexe et que sa voisine en est une. Après de nombreuses tentatives, Françoise a accepté de donner quelques réponses sur son activité. La jeune étudiante de 24 ans confie que, « je suis dans cette activité pour le compte du groupe depuis bientôt un an. Les réseaux sociaux ont élargi notre champ d’actions. Lorsqu’un client se déplace, il me paye 5.000 Fcfa. Si le déplacement est fait par moi, c’est 7.000 Fcfa pour une heure. Les exigences de ce dernier sont limitées par rapport à son argent. Le champ d’actions est encore plus vaste en fonction du prix qu’il y met. Il m’arrive souvent de me déplacer ou recevoir pour une nuit », dit-elle. L’activité qui permet aujourd’hui à plus d’un de se faire des sous n’est pas pour autant sans danger.
A Ngoa-ekellé ou Obili, des quartiers universitaires de Yaoundé, l’activité bat son plein. Lucas, conducteur de moto confie qu’il s’est un jour prêté au jeu des rencontres de sexe organisées en ligne et la nuit s’est très mal terminée. «Avant que nous n’allions la jeune fille et moi, nous étions d’accord que nous allions passer la nuit ensemble et que tout était permis si je payais 12.000 Fcfa. Mais, à une certaine heure de la nuit, la bonne dame me demande repos et veut réduire les possibilités des offres. Ce que je n’ai pas accepté. Je l’ai un peu brutalisé en menaçant de ne pas lui donner la totalité de la somme prévue mais le fait qu’elle me tape dessus avec un banc m’a mis hors de moi. Je l’ai aussi frappé et la jeune fille a perdu connaissance. J’ai jeté l’argent sur le lit et je me suis sauvé », explique Lucas. Fort heureusement, la fille n’est pas morte. Elle a été secourue par son voisinage qui est au courant de son activité.
D’aucuns sous cape préfèrent cette façon de faire les choses en ce qui concerne le commerce de sexe. Car disent-ils, «à travers nos téléphones, nous faisons connaissance et on s’accorde. Seul reste le passage à l’acte », « j’ai eu des rapports avec des filles que je n’avais jamais imaginé parce qu’à première vue, vous ne pouvez pas imaginer que c’est ce métier qu’elles font pour gagner leur vie» ou encore « quand on va le faire chez moi ou chez elle, le cadre est beaucoup plus convivial que lorsqu’on va à l’hôtel ou un motel ». Ces derniers affirment qu’il ne faut jamais briser les règles établies au préalable, sinon vous vous exposez à des représailles que vous risquez de ne pas pouvoir gérer parce que le système est savamment encadré.
Les raisons qui poussent les jeunes filles surtout à se joindre à ce genre de pratique sont nombreuses. Certaines le font dans le souci d’avoir de l’argent rapidement au mépris des risques et de leur santé pour acquérir des ustensiles de beauté tels des mèches de diverses origines, des vêtements, les téléphones de dernière génération, etc. pour Corine T., étudiante à l’université de Yaoundé II-Soa et mère d’un petit garçon, «c’est une copine qui m’a mis en contact avec une grande sœur qui au départ me venait en aide financièrement sans contrepartie. Après un certain temps, elle a commencé à me convier à des nuits dansantes avec des inconnues qu’elle semblait visiblement connaitre.
Sans qu’elle ne le dise, j’ai compris de quoi il s’agissait. Je pouvais déjà payer ma chambre et assurer le casse-croûte de ma fille tous les jours. Je me suis lancé pour pouvoir mériter plus et faire des économies qui me permettent d’assurer seule mes frais de pension», confie Corine T. cette dernière avoue aussi que l’activité paye mais elle n’est pas un long fleuve tranquille. Dans son groupe, les filles ne se déplacent pas seules lorsqu’elles vont chez un client. Elles se font toujours accompagnées de quelqu’un qui les suit de loin sans donner l’impression au client qu’il est observé. A la moindre incartade, elle lance l’appel et le bourreau vole à son secours.