Combien d'amis avons-nous ? Dans quelle mesure sont-ils bons ou proches ? Comment nous, hommes et femmes, choisissons-nous nos amitiés ? Que privilégions-nous ? Quelle est la durée de ces amitiés ?
Le célèbre psychologue, anthropologue et biologiste évolutionniste britannique Robin Dunbar, professeur émérite à l'université d'Oxford, étudie le sujet de l'amitié depuis des années.
Spécialisé dans le comportement des primates, il est surtout connu pour avoir été le premier à formuler le "nombre de Dunbar", d'une valeur de 150 chez l'homme, qui représente une mesure de la "limite cognitive des individus avec lesquels une relation stable peut être maintenue".
Les amitiés entre hommes sont un peu plus anonymes dans ce sens.
À quoi ressemblent, selon vous, ces clubs d'amitié ?
Dans ces clubs, le fait d'appartenir au club semble être la chose la plus importante. C'est ce qui définit l'amitié.
Beaucoup d'hommes ne savent pas grand-chose de leurs amies, mais ils les acceptent parce qu'elles font partie du même club.
Les clubs d'amis ont tendance à être très informels, ce qui reflète la nature beaucoup plus décontractée des amitiés entre hommes.
L'appartenance à un club est également souvent décontractée.
Il s'agit d'amis qui jouent au football à cinq ou qui vont boire un verre tous les vendredis soirs.
C'est pourquoi les femmes peuvent vous raconter exactement ce dont elles ont parlé hier, avec détails et contexte, alors que les hommes qui étaient assis à la même table ne se souviennent de rien.
Diriez-vous que les hommes ont davantage besoin d'une présence physique, d'un ami physiquement présent ?
Oui, les hommes ont besoin de pouvoir faire des choses avec leurs amis. Ils ont besoin de les voir. S'ils ne les voient pas, la relation s'évapore. Ce n'est pas toujours le cas, bien sûr, mais c'est fréquent.
Les amitiés entre femmes ont tendance à durer dans le temps, même lorsqu'elles ne peuvent pas se voir régulièrement, parce qu'elles font l'effort de se parler ou de rester en contact souvent.
C'est moins fréquent chez les hommes.
Cela ne veut pas dire que les amitiés masculines ne durent pas ; certaines peuvent durer plus longtemps que les amitiés féminines.
Mais si l'ami d'une femme déménage définitivement dans un autre pays et qu'ils ne peuvent pas se voir, ils essaient de maintenir l'amitié par le biais des réseaux sociaux ou du téléphone.
Et les hommes perdent l'ami qui déménage...
Les hommes ne restent généralement pas en contact régulier avec l'ami qui a déménagé, mais le remplacent simplement.
Par exemple, Jimmy fait partie du groupe d'amis qui va boire au bar tous les vendredis soirs, mais il a déménagé en Thaïlande.
Au lieu d'essayer de garder le contact avec Jimmy, les autres amis se disent : "Jimmy était génial, mais il n'est plus là. Je connais Pierre qui s'intégrerait très bien, nous pouvons l'inclure dans le groupe maintenant que Jimmy n'est plus là".
La situation évolue au fil des ans.
La communication est-elle encore faible ?
Il est probable que de nombreuses personnes n'ont pas encore de conversations profondes.
Il existe une merveilleuse photographie, que l'on voit souvent dans les journaux et les magazines, de deux Grecs âgés à l'extérieur d'une taverne, assis de part et d'autre d'une table alors que le soleil brille.
Ils sont assis en silence et, de temps en temps, ils soulèvent leur ouzo (liqueur grecque) ou leur café pour en boire une petite gorgée.
Je dis toujours : c'est l'image de deux hommes qui communiquent.
Diriez-vous que les hommes sont plus paresseux socialement ?
Tout à fait. Beaucoup d'hommes âgés finissent par appartenir au club des maris des amies de leur femme, ou des amies de leur partenaire, et ce parce que les femmes sont beaucoup plus actives socialement.
Elles sont plus susceptibles que nous d'organiser des événements sociaux, qu'il s'agisse d'un dîner ou autre.
Parfois, les hommes présents forment leur propre club, mais la seule chose qui les unit est le fait qu'ils sont les maris ou les partenaires des femmes.
C'est tout à fait circonstanciel.
Quelle est l'importance d'avoir des amis en vieillissant ?
Nous pouvons ici évoquer les raisons pour lesquelles nous avons des amis.
L'une d'entre elles est le soutien moral et social, et l'aide, si nous en avons besoin.
Les bons amis finissent par devenir une sorte de protection et peuvent même constituer un amortisseur financier.
D'autre part, les amitiés ont des effets bénéfiques considérables sur la santé.
La meilleure façon de prédire votre santé physique et psychologique est d'examiner la quantité et la qualité des bons amis que vous avez.
Selon plusieurs études, le nombre optimal d'amis est le vôtre et celui de quatre autres.
S'agit-il d'amis proches ou d'amis en général ?
Des amis proches, mais aussi de la famille.
En vieillissant, nous avons tendance à donner la priorité à la famille.
On dit aussi qu'elle améliore la santé mentale.
D'un point de vue psychologique, cela réduit considérablement le risque de dépression.
Les activités que nous pratiquons avec nos amis, parler, rire, raconter des histoires tristes, chanter, danser, manger... toutes ces choses activent le système des endorphines, qui est activé dans la partie du cerveau qui contrôle la douleur.
Les endorphines procurent un sentiment de bien-être, de paix avec le monde et de confiance en soi.
Lorsque vous tombez en dépression, votre système immunitaire devient déprimé et vous êtes beaucoup plus susceptible de contracter des maladies, en particulier des virus et des bactéries, parce que votre corps ne peut pas les attaquer efficacement.
En fin de compte, lorsque vous avez peu ou pas d'amis, votre espérance de vie s'en ressent.