Le 16 septembre dernier, le Mali, le Niger et le Burkina Faso ont signé la charte du Liptako-Gourma instituant ainsi une nouvelle alliance entre ces trois Etats du Sahel.
En plus de partager la même zone géographique du Sahel, les trois états voisins sont, non seulement dirigés par des militaires, mais font face à la même menace des groupes djihadistes. C'est ainsi que le Mali, le Burkina Faso et le Niger décident de mutualiser leurs forces afin de faire face aux défis qu’ils partagent.
« Il faut comprendre que c'est une manière également d'anticiper sur la protection de notre propre régime. Ensuite, c'est une manière aussi d'anticiper sur la menace commune qui existe déjà », affirme M. Lo.
Mohamed Maiga, ingénieur des politiques sociales et politiques publiques, renchérit en expliquant que si la création de l’AES est une sorte de réponse aux menaces de la CEDEAO, elle se justifie également par l’échec du G5 Sahel.
« Le G5 Sahel, il faut le rappeler, est une organisation qui devait initialement lutter contre la problématique sécuritaire. Seulement, cette organisation a été un échec », affirme M. Maiga.
De son côté, Mohamed Maiga rajoute l'aspect financier qui est également fondamental pour la pérennité même de l’AES. « Est-ce que ces États vont finalement pouvoir mobiliser ensemble, mutualiser leurs ressources et faire face à la situation pour faire en sorte que cette organisation résiste et ne meure pas, sachant que les soutiens, il n'y en a pas beaucoup ? », s’interroge M. Maiga.
« Le financement de l’Alliance est assuré par les contributions des Etats parties », peut-on lire dans l’article 10 de la charte du Liptako-Gourma.
La question du financement a d’ailleurs été un des boulets du G5 Sahel, une organisation créée en 2014 par la Mauritanie, le Mali, le Burkina Faso, le Niger et le Tchad. Sans mandat de l’Onu, donc ne recevant pas de soutien financier des nations unies, la force conjointe du G5 Sahel mise en place pour lutter contre les djihadistes dans la région peine à mobiliser les ressources pour atteindre ses objectifs.
« Et l'autre élément, ce sera un tutorat international, parce que dans le Sahel, c'est la France qui joue ce rôle de tuteur. On a vu les tensions avec la France. Et les trois pays, certes, avec toute la volonté qu'il faut, ont besoin de ce tutorat, déjà pour pouvoir agir et avoir un soutien sur les grandes affaires internationales », affirme M. Lo.
Néanmoins, Mouhamadou Lamine Bara Lo rappelle qu’il ne faudrait pas surestimer ses capacités ou son potentiel. «Elle a des chances de survivre parce qu'il y a des intérêts réels présents qui peuvent pousser à sa réussite » ajoute-il.
Pour lui, le contexte impose une mutualisation des forces des trois pays membres. Cependant, M. Lo tient à rappeler que le G5 Sahel a également essayé de mettre en place une force conjointe sans réel succès.
En effet, le Niger et le Burkina Faso sont tous deux membres du G5 Sahel qui a été affaibli par le retrait du Mali. Le président Bazoum affirmait d’ailleurs que le retrait du Mali annonçait la mort de l’organisation.
« Le Mali, en se retirant, a créé une discontinuité territoriale. La Mauritanie qui est membre du G5 Sahel était carrément excentrée et déconnectée des autres pays », affirme Mouhamadou Lamine Bara Lô.
Mohamed Maiga estime pour sa part que « c'est seulement avec le temps qu'on pourra juger et aussi avec les réelles capacités de déploiement d'opérationnalisation de l’Alliance des Etats du Sahel.»