L'ONG Amnesty International a dénoncé ce 4 juillet les « atrocités » perpétrées par les forces de l'ordre et les séparatistes armés dans les régions anglophones du Cameroun, mettant en évidence de « graves violations des droits humains ».
Les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest du Cameroun, principalement peuplées par la minorité anglophone camerounaise, sont régulièrement le théâtre d'« atrocités » telles que des exécutions, des tortures et des viols, commis tant par les forces de l'ordre que par les séparatistes armés, selon Amnesty International.
À partir de fin 2016, le régime du président Paul Biya a réprimé violemment des manifestations pacifiques organisées par les anglophones qui se sentaient marginalisés par le pouvoir central, majoritairement francophone. Par la suite, de nombreux groupes armés indépendantistes anglophones ont pris les armes et proclamé l'« indépendance » d'une région qu'ils appellent l'« Ambazonie ». En réponse, le président Paul Biya a massivement déployé des troupes dans la région.
Dans son rapport intitulé « Avec ou contre nous. La population prise en étau entre l'armée, les séparatistes armés et les milices dans la région anglophone du Nord-Ouest », Amnesty International recense des cas d'« exécutions extrajudiciaires », d'« homicides » visant des civils, y compris des femmes et des enfants, ainsi que des cas de « tortures », de « viols et autres violences sexuelles » perpétrés par les deux camps. Ces « atrocités récurrentes » constituent de « graves violations des droits humains ».
Le rapport d'Amnesty s'appuie sur les témoignages de « plus de cent victimes », ainsi que sur des rapports d'ONG locales et de journalistes.
Kidnappings quotidiens
Parmi les cibles des séparatistes, qui pratiquent également des enlèvements quasi-quotidiens contre rançon, figurent des civils accusés de « collaborer » avec Yaoundé, en particulier ceux de l'ethnie peule des Mbororos.
L'armée et la police sont régulièrement accusées par l'ONU et les ONG d'attaquer et de dévaster des villages dont les habitants sont soupçonnés de sympathie envers les séparatistes, et d'y commettre des bavures et des crimes. Amnesty International accuse également les « milices mbororos » de collaborer avec les militaires lors de ces attaques.
Les « autorités politiques et judiciaires » sont également accusées de « violation des droits humains », notamment en emprisonnant « arbitrairement » des civils, des journalistes et des responsables de la société civile, et en les faisant juger par des tribunaux militaires pour des faits liés au « terrorisme ».
Absence de réaction des partenaires internationaux
Amnesty s'inquiète également du fait que des pays partenaires du Cameroun, dont la Belgique, la Croatie, les États-Unis, la France, Israël, le Royaume-Uni, la Russie et la Serbie, continuent de coopérer militairement avec le pays en fournissant des armes et du matériel militaire. Ces armes et équipements risquent d'être « utilisés par les forces armées, les milices ou les séparatistes armés pour commettre des exactions », selon l'ONG.
Amnesty demande à ces « partenaires internationaux » de « condamner ces atteintes aux droits fondamentaux » commises par les deux camps, et au gouvernement de « diligenter de toute urgence des enquêtes approfondies, indépendantes et impartiales ».
Amnesty affirme que les demandes de rendez-vous avec les ministres du gouvernement, sollicitées dans le cadre de ce rapport, sont restées sans réponse. Le gouvernement ne réagit généralement pas immédiatement aux rapports réguliers publiés par les ONG, le cas échéant, plusieurs jours ou semaines après leur publication.
Selon le groupe de réflexion International Crisis Group (ICG), le conflit a déjà causé plus de 6 000 décès et forcé plus d'un million de personnes à se déplacer, bien que ce bilan n'ait pas été mis à jour depuis trois ans.