Le 18 février 2023 restera gravé dans la mémoire des habitants de Batouri, une petite ville située dans le département de la Kadey, dans l'est du Cameroun. Ce jour-là, des milliers de personnes se sont réunies pour rendre un dernier hommage au puissant ministre des Mines, Gabriel Dodo Ndoké, décédé prématurément à l'âge de 51 ans au centre hospitalier d'Essos, à Yaoundé. Cependant, ces funérailles ont été bien plus qu'une simple cérémonie de deuil. Elles ont révélé les intrications politiques et les enjeux de pouvoir qui se jouent dans cette région stratégique du Cameroun.
La présence remarquée de plusieurs ministres du gouvernement camerounais a immédiatement suscité des interrogations. Parmi eux, le Premier ministre, Joseph Dion Ngute, des parlementaires, des dignitaires religieux et des chefs traditionnels étaient présents pour témoigner leur respect envers le défunt. Mais le moment le plus intrigant est survenu lorsque Joseph Le, ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative, a pris la parole, rappelle Jeune Afrique dans un article consacré à la Région de l’Est.
Dans son discours, Joseph Le a prononcé des mots qui ont fait écho bien au-delà des collines de Batouri : "On ne s'élève pas en éliminant d'abord son frère ou sa sœur. Chacun à son tour, chacun à sa place. Je n'en dirais pas plus, on se comprend." Cette déclaration voilée a été interprétée par de nombreux observateurs comme une indication de sa prise de relais en tant que référent politique de la région de l'Est, autrefois sous l'influence du regretté Gabriel Dodo Ndoké.
Gabriel Dodo Ndoké était bien plus qu'un ministre des Mines respecté. Il était une figure de proue du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC) dans la région de l'Est, où son leadership avait perduré pendant de nombreuses années. Sa disparition inattendue a créé un vide politique significatif et a ouvert la porte à une compétition féroce pour sa succession.
Joseph Le, en tant que membre influent du RDPC, a rapidement émergé comme un candidat potentiel pour prendre la relève de Gabriel Dodo Ndoké. Sa montée en puissance au sein du parti au pouvoir dans la région de l'Est ne s'est pas faite du jour au lendemain. Moins de deux mois après sa nomination en tant que ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative en 2018, il a saisi l'opportunité de se distinguer lors des obsèques de Janvier Mongui Sossomba, une figure éminente du parti dans la région.
Depuis lors, Joseph Le a travaillé sans relâche pour renforcer son influence, utilisant habilement son poste au gouvernement et ses connexions au sein du RDPC pour consolider sa position. Son implication dans des événements politiques clés, tels que l'organisation de meetings de soutien à Paul Biya et la mobilisation de fonds pour la campagne présidentielle, a démontré sa détermination à s'affirmer en tant que leader politique incontournable de la région.
Les funérailles de Gabriel Dodo Ndoké ont ainsi été le théâtre d'une compétition discrète mais intense pour le contrôle politique de l'Est du Cameroun. Alors que la présidentielle de 2025 approche, l'évolution de la situation politique dans cette région stratégique continuera d'être scrutée de près, et le rôle de Joseph Le en sera assurément un élément central, révèle Jeune Afrique.