La crise entre l'Église catholique et le gouvernement camerounais s'intensifie autour de la possible candidature de Paul Biya à la présidentielle d'octobre. Une rencontre tendue entre le ministre de l'Administration territoriale et le nonce apostolique, ce 8 janvier, marque une nouvelle étape dans ce bras de fer.
Le ministre Paul Atanga Nji a tenté d'apaiser les tensions lors de sa rencontre avec Mgr José Avelino Bettencourt, représentant du Vatican, en évoquant d'« excellentes » relations entre Yaoundé et le Saint-Siège. Une position reprise par le porte-parole du gouvernement, René-Emmanuel Sadi, qui nie tout conflit avec les confessions religieuses.
Pourtant, la fronde des évêques ne faiblit pas. Depuis le début de l'année, les déclarations fracassantes se multiplient contre une éventuelle nouvelle candidature du président Biya, 93 ans, au pouvoir depuis 1982. L'évêque de Yagoua, Mgr Yaouda Hourgo, s'est particulièrement fait remarquer lors de son homélie du Nouvel An en déclarant : "Même le diable, qu'il prenne d'abord le pouvoir, et on verra après !"
Le gouvernement apparaît divisé dans sa réponse à cette contestation religieuse. Si certains ministres, comme Grégoire Owona, appellent à la "sérénité", d'autres adoptent un ton plus menaçant. Le ministre délégué à la Justice, Jean de Dieu Momo, a ainsi dénoncé "une exagération blasphématoire" dans une lettre ouverte aux prélats. Plus inquiétant encore, Paul Atanga Nji avait précédemment affirmé détenir des "éléments" compromettants sur certaines associations religieuses, qu'il accusait d'être des "fauteurs de troubles".
La tension pourrait encore monter d'un cran avec la clôture, le 11 janvier, du séminaire des évêques du Cameroun à Buea, dont la déclaration finale est très attendue. Cette crise intervient dans un contexte particulier en Afrique centrale, où l'engagement politique de l'Église catholique est historiquement plus marqué qu'ailleurs sur le continent.
Cette passe d'armes entre l'Église et le pouvoir survient alors que le président Biya vient de réaffirmer sa "détermination intacte à continuer à servir son pays", laissant présager une nouvelle candidature qui cristallise les tensions à moins de dix mois de l'échéance présidentielle.