Les premiers usent d’intimidations et de violences pour empêcher le retour des classes le 4 septembre. Les seconds travaillent à éviter une année blanche dans les régions anglophones.
« Je doute fort que les élèves reprennent le chemin des classes cette année à Bamenda ». A écouter Amstrong, un jeune technicien d’agriculture installé dans la capitale de la région anglophone du Nord-Ouest, les deux régions anglophones ne sont pas loin de connaitre une année blanche. La faute à des groupes de radicaux, favorables à la sécession des deux Cameroun, qui ont décidé de boycotter la rentrée scolaire prochaine.
Ces radicaux ont même fait de ce boycott une question d’honneur, à en croire d’autres habitants de Bamenda. En refusant que les élèves retournent à l’école le 4 septembre prochain, les partisans de l’idéologie sécessionnistes ne surprennent personne. Leur crédo est en effet de s’opposer à toutes les décisions du pouvoir central de Yaoundé. « Ils font savoir à tout le monde qu’ils ne sont plus des Camerounais, mais des Ambazoniens. Ça fait peur », ajoute Amstrong, le ton grave.
Il n’est d’ailleurs pas le seul à appréhender ce discours irrédentiste à Bamenda. La preuve : l’exode massif des élèves originaires de la capitale du Nord-Ouest vers les régions francophones, Yaoundé et Douala prioritairement. « Des parents m’ont appelé de Bamenda pour me suppléer de prendre leurs enfants chez moi », confie Etienne, originaire d’un petit village à quelques encablures de Bamenda qui dirige un garage automobile da la capitale camerounaise. S’il ne s’est pas encore décidé, il n’en est rien de nombreux de ses frères. « Cet exode concerne surtout les familles riches, qui n’hésitent pas à inscrire leurs enfants dans les internats. Les enfants issus des familles pauvres sont condamnés à rester à Bamenda », fait savoir Amstrong.
BAMENDA
A Yaoundé, l’élite politique de Bamenda, aux antipodes de l’idéologie sécessionniste défendue par les radicaux, veut éviter le scénario catastrophique d’une année blanche. Elle rassure, réconforte et garantie la sécurité aux parents et chefs d’établissement. Problème, la crise qui paralyse les deux régions anglophones depuis bientôt un an a entamé le capital crédit de cette élite à qui les radicaux reprochent l’embourgeoisement et la collaboration avec le pouvoir de Yaoundé. Il est donc difficile de croire que les commis et les élus anglophones soient capables de décanter la situation. Surtout que l’année scolaire dernière, on se rappelle qu’ils avaient rédigé en vain un appel afin que la rentrée scolaire soit effective dans la région du Nord- Ouest et dans celle du Sud-Ouest.
Ernest Massena Ngalle Bibehe, le ministre de l’Enseignement secondaire (Minsec), est lui aussi à pied d’oeuvre pour que la rentrée soit effective dans les régions anglophones le 4 septembre. Le ministre garantie que les établissements publics vont assurément ouvrir leurs portes le jour de la rentrée. Autre victoire de M. Ngalle Bibehe : il a le soutien des autorités de l’Eglise presbytérienne du Cameroun qui se prononce contre toute année blanche à Bamenda et à Buea. Cette institution confessionnelle, bien implantée dans le Cameroun anglophone assure que ses établissements ouvriront le 4 septembre.
EGLISE CATHOLIQUE
Le mois dernier, une révélation du journal anglophone The Guardian Post renseigne aussi que l’Eglise catholique a aussi rassuré les autorités qu’elle ne fermera pas ses établissements dans les régions anglophones. « La position de l'Église catholique sur le problème du retour à l'école a été mise en évidence par une correspondance datée du 8 juillet 2017 et adressée aux secrétaires d'éducation catholique de la province ecclésiastique de Bamenda qui comprend l'archidiocèse de Bamenda et les diocèses de Kumbo, Kumba, Mamfe et Buea. La correspondance suit une longue déclaration publiée un jour plus tôt par l'Association des parents / enseignants de la province ecclésiastique de Bamenda demandant également aux parents d'envoyer leurs enfants à l'école au début de la nouvelle année académique en septembre », pouvait-on lire dans les colonnes du Guardian Post.
Pour plusieurs habitants de Bamenda, le noeud du problème est la sécurité des enfants qui vont aller à l’école. Comment se rassurer qu’ils ne seront pas agressés par les groupes radicaux qui demeurent très actifs à Bamenda ? Personne n’a pour cela oublié la vidéo, devenue très vite virale, d’un jeune élève malmené par des radicaux l’année scolaire dernière. Et encore moins la bastonnade en masse dans une école restée ouverte malgré le mot d’ordre de grève. Le gouvernement est en tout cas décidé à éviter que ces scènes se répètent.