SGPR : Les 'hautes instructions' mettent la République en transe, le 'soldat Ngoh Ngoh sauvée'

La délégation de signature un est acte juridique

Mon, 17 Oct 2022 Source: Le Pélican N°658

Cet acte du chef de l’État accordé au ministre d’Etat SgPr, a très souvent nourri la conversation dans les chaumières, tout comme dans les cercles politiques. Certains voyant au décret du 5 février 2019, de trop larges pouvoirs accordés à ce collaborateur fidèle du président de la République. Décidément, l’ascension du secrétaire général de la présidence Ferdinand Ngoh Ngoh, a lancé une lutte acharnée pour la succession de Paul Biya.

Dans une newsletter de la présidence de la République du Cameroun vantant la politique des « Grandes opportunités » du président Paul Biya, une ligne de texte fait jaser au sein de l’opinion.

Il s’agit de celle rapportant le décret no 2019/043 du 5 février 2019 « accordant délégation permanente de signature à monsieur Ngoh Ngoh Ferdinand, Secrétaire général de la présidence de la République ». Sur les réseaux sociaux, le texte est rapidement devenu viral, non sans susciter des réactions diverses.

Dans son édition du 7 mai 2019, le quotidien Mutations indique que jusque-là, seul Titus Edzoa, avait rendu public, le décret lui accordant la même prorogative. Ce décret signé le 4 août 1994, l’ancien Secrétaire Général de la Présidence de la République (SG/PR) l’avait publié dans son livre intitulé «Cameroun, combat pour mon pays», publié en juin 2018 par l’ancien proche collaborateur de Paul Biya qui a passé 18 ans en prison. Voici les pouvoirs que ce décret accordait à Titus Edzoa: «l’intégration, l’abaissement de classe, de grade ou la révocation ainsi que la mise en retraite des fonctionnaires de la Sûreté nationale; la nomination jusqu’aux fonctions de directeur adjoint à la Présidence de la République; la publication au journal officiel, lorsqu’elle requiert l’intervention préalable, d’une décision présidentielle l’ordonnant». Mutations qui donne ces détails, souligne que selon ce même décret, l’ancien SG/PR devait «discriminer lui-même les affaires qu’il estime opportun de réserver à la signature du Président de la République».

Selon les experts, la délégation de signature un est acte juridique par lequel une autorité (déléguant) délègue, non pas ses pouvoirs, mais la faculté de signer des documents et actes énumérés strictement dans la délégation à une tierce personne… la délégation de signature n’entraîne pas la délégation de responsabilité administrative, ni ne dessaisit le déléguant de son pouvoir originel.

Le président Ahmadou Ahidjo en a délégué à Paul Biya. Beaucoup se souviennent que ce n’est qu’à la surprise de tous, le 4 novembre 1982, alors âgé de 58 ans, que le premier président du Cameroun, Ahmadou Ahidjo, va annoncer sa démission pour « des raisons de santé ». A l’époque Premier ministre, Paul Biya lui succède. Les hypothèses étaient alors nombreuses sur les raisons de cette succession inattendue et, malgré vingt-deux années passées au pouvoir par Ahidjo, prématurée. Mais à la façon dont l’ancien président fut traité depuis son départ du pouvoir, on trouva rapidement les raisons de ce départ : la guerre intestine au sein de parti du pouvoir, l’Union nationale camerounaise (UNC), avait en effet été fatale à un Ahmadou Ahidjo fragilisé en interne.

Pour sa part, Ahidjo dénonça, en substance, un coup d’Etat médical orchestré par la France et demanda, en vain, l’assistance des EtatsUnis pour reprendre le pouvoir au Cameroun. Sans succès : Ahmadou Ahidjo finit sa vie en exil au Sénégal, où il décéda d’une crise cardiaque en 1989. Auparavant, il avait été condamné à mort par contumace et avait perdu le contrôle sur l’Unc en à peine cinq mois, après son départ du pouvoir. Le parti fut alors rebaptisé Rassemblement démocratique du peuple camerounais (Rdpc). L’on apprend qu’avant le président Paul Biya, l’ancien chef de l’État Ahmadou Ahidjo avait signé en juillet 1975, un décret accordant au SGPR d’alors, Samuel Eboua, une «délégation permanente de signature». Dans les faits, ce décret conférait au SGPR, le pouvoir de signer «au nom du chef de l’État, toutes pièces et correspondances relatives aux affaires administratives courantes». En 1997, le président Paul Biya va accorder quasiment les mêmes pouvoirs à son secrétaire général de cette époque, Marafa Hamidou Yaya. Différence notable, le SgPr ne peut plus effectuer des virements de crédits budgétaires, mais bénéficie d’une nouvelle compétence : « nommer jusqu’aux fonctions de directeur adjoint à la présidence de la République ».

Son successeur Jean Marie Atangana Mebara bénéficiera du même décret. Ce sera également le cas pour l’actuel tenant du poste, Ferdinand Ngoh Ngoh, nommé SGPR en décembre 2011 et qui détient une délégation permanente de signature depuis février 2019.

Au moment où il est nommé Sg/Pr, le 9 décembre 2011, Ferdinand Ngoh Ngoh, diplomate de formation occupait les fonctions de secrétaire général du ministère des Relations extérieures. Titulaire d’un doctorat de 3e cycle en relations internationales obtenu à l’Institut des relations internationales du Cameroun (IRIC), il a débuté sa carrière au ministère des Relations extérieures à Yaoundé avant d’être détaché au Cabinet civil de la présidence de la République de 1997 à 1998.

« Sans cesse menacé, jamais écarté, le ministre d’Etat secrétaire général de la présidence est resté aux côtés de Paul Biya qui ne lui a jamais retiré la signature. Il sait pertinemment ses missions. Rappelons que le SgPr reçoit du chef de l’Etat toutes directives relatives à la définition de la politique de la Nation; suit l’exécution des décisions prises par le PR ; coordonne l’action des Administrations rattachées à la Présidence ainsi que précisées aux articles 5 et 37 du décret suscité ; instruit les dossiers que lui confie le PR et suit l’exécution des instructions données ; … assure la mise en forme, en liaison avec le SG des Services du Premier Ministre (PM) ou des Ministres concernés, des projets de loi à soumettre à l’Assemblée Nationale et au Sénat ; … veille à la réalisation des programmes d’action approuvés par le président de la République et impartis aux Chefs de départements ministériels et aux Services relevant de la Présidence ; prépare les conseils ministériels, en liaison avec le SG des services du PM, les conseils restreints, les conseils et commissions présidés par le PR ; assure l’enregistrement des actes réglementaires signés et des lois promulguées par le PR, ainsi que leur publication au Journal Officiel ; assure la tenue et la conservation des archives législatives et réglementaires ; exerce le rôle de conseil juridique de la Présidence de la République et des Administrations rattachées

Source: Le Pélican N°658
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