Sans femme ni enfant : le mbenguiste meurt et laisse une incroyable fortune à celui qui peut la gérer

Il faut savoir ménager son corps

Mon, 26 Jun 2023 Source: Journal du Week Infos n°089 du 26 juin 2023

« Chercher l’argent humainement et rationnellement en Europe »

Par Léopold Chamberlain Chendjou

J’ai assisté une amie cette semaine, éplorée par la mort de son grand frère. Le deuil faisait encore « plus mal » parce que Benjamin, le défunt vivait en Belgique depuis plus de 20 ans. Parti du Cameroun par la voie du désert, il avait réalisé son ambition 03 ans plus tard, dans la ville de Namur. Benjamin est parti du Cameroun, un BTS (Action commerciale) en poche.

En Belgique, de petits boulots en petits boulots, il gagnait de l’argent, beaucoup d’argent. Comme le font les autres, le natif des Hauts-plateaux va acquérir un lopin de terre à Nyalla (Douala) et se lance dans la construction d’un immeuble avec une dizaine d’appartements. Benjamin envoyait le nécessaire pour son chantier.

De sa petite sœur, l’on apprend que jamais ce chantier n’avait connu d’arrêt d’activité pour manque de quoi que ce soit. Il y a environ 02 ans, Benjamin est venu au Cameroun, a passé quelques jours et est rentré satisfait de la conduite des travaux. Sa mère, son oncle, sa petite sœur veillait sur ce projet comme la prunelle de leurs yeux. Benjamin n’avait pas de femme connue, encore moins un enfant.

Des projets qu’il renvoyait à plus tard, à la fin de son chantier. Le 1er juin dernier, la nouvelle de la mort de Benjamin est prise comme une blague. Elle se confirme plus tard. Âgé de 48 ans, il est décédé des suites d’une infection pulmonaire. Sa sœur n’a pas voulu m’en dire plus. « Leo, c’est l’argent qui a tué mon frère ». Que faisait Benjamin en Belgique ? Quelle était son occupation ? Dans quelle condition vivait-il ?

Cette triste histoire serait le cas de plusieurs compatriotes partis chercher l’argent en Europe, en Asie, aux États-Unis, Canada et autres ? Très souvent, pour amasser le maximum, ils s’adonnent plus qu’il n’en faut. Travaillent comme des esclaves, subissent toute sorte d’humiliation, et meurent de fatigue. Combien sont-ils ces jeunes compatriotes qui comme Benjamin bossent comme des malades dans ces pays, rapatrient leurs revenus sous forme de projets immobiliers et meurent sans en bénéficier.

Des acquéreurs de terrain qui décèdent sans avoir mis pied sur le site. Des propriétaires d’immeubles qui ferment les yeux sans rentrer dans un appartement construit à la sueur de leurs fronts. Voilà la triste réalité. La peur de l’échec, la honte des « ont dit » si on n’achète pas le terrain ou ne construise pas l’immeuble. Il y a beaucoup d’argent là-bas, il y en a à gogo, mais, savoir comment chercher. Ne pas travailler au point d’oublier que l’organisme a besoin de repos.

Ne pas vouloir économiser au point de dormir dans des conditions inhumaines parce qu’on veut « save ses euros ou ses dollars ». Après tout, l’immeuble où le terrain revient à celui qui est resté au bercail, et qui n’a pas réalisé ton sacrifice. Benjamin a été enterré hier dimanche à Demgo (Baham).

Son chantier était à 75% achevé. Benjamin n’était pas marié, n’avait pas d’enfant. Qui va poursuivre son œuvre ? Difficile de répondre à cette question. Mais au moins on sait qui va en bénéficier : un vivant. En bon entendeur...

Source: Journal du Week Infos n°089 du 26 juin 2023