Au sein de la Banque des États de l’Afrique centrale (Beac), un nouveau conflit est ouvert. Il est au niveau du personnel, à la suite des mesures institutionnelles de discriminations. Boris Bertolt décrit la situation.
Après la récente crise relative au concours de recrutement au sein de la Banque des États de l'Afrique centrale (Beac), l'institution financière est de nouveau secouée par une nouvelle crise. Celle du statut du personnel. Le personnel de la Beac est en effet régi par deux textes. D’une part les clauses et conditions générales et d’autre part le Statut d’encadrement supérieur. C’est-à-dire qu’à la Beac, on a le personnel dit ACCG (agent relevant des clauses et conditions générales) et le personnel dit AES (agent d’encadrement supérieur). Cette situation est aujourd'hui au cœur de vives tensions au sein de la structure.
En effet, le personnel régi par le statut de ACCG dénonce ce qu’ils qualifient de système d’apartheid et de discrimination. Ainsi au sein de la structure, certains personnels AES n'adressent pas de salutations au personnel ACCG au prétexte qu'ils ne relèvent pas du même statut. Même dans les mails envoyés au personnel, la discrimination est fortement visible car dans la mailing list la distinction est faite entre les ACCG et les AES, et ceci parfois au sein d’une même direction ou d’un même département. De plus, même dans la restauration, il existe au sein de la Beac deux restaurants d’entreprise : un pour le personnel ACCG et un autre pour le personnel AES ou les menus sont plus achalandés et plus complets.
Cette discrimination est encore plus visible au niveau des avantages financiers. Les AES ne paient pas d'impôts. Ils ont des traitements salariaux de l’ordre de 7 à 10 fois plus que les ACCG. À titre d'exemple, un ACCG gagne 300 000 francs CFA tandis qu’un AES expatrié gagne 3 000 000 de francs CFA. Et un AES local gagne 2 500 000 francs CFA. Par ailleurs, les AES sont les seuls éligibles à des postes de responsabilité.
Dans le registre de la gestion des ressources humaines au sein de l’institution, pas de disposition en termes d’évolution des carrières au point où, l'on a des agents ACCG recrutés en 1999 et même avant qui, à date, sont au point de départ. C'est-à-dire qui occupent le même poste qu’ils occupaient y a 26 ans lors de leur recrutement. Certains agents ACCG partent à la retraite après 35 ans de service, voire plus, au même poste de départ que lors de leur recrutement. Les cas sont nombreux.
Des deux textes régissant le personnel, aucune passerelle n’est prévue pour passer automatiquement du personnel ACCG au personnel AES. Le nouveau gouverneur Sana Bangui a été saisi de cette situation dès son arrivée. Sauf que jusqu'à ce jour, il n'a rien entrepris pour pallier cette situation en dépit de plusieurs relances d'un collectif d'employés au sein de l'institution.
Pourtant l’ancien gouverneur de nationalité équatoguinéene, Abaga Nchama avait entamé une série de réformes dans la gestion des ressources humaines et avait amorcé le chantier d’élaboration d’un statut unique pour le personnel afin de définir des trajectoires linéaires en termes de carrières pour le personnel et aussi réduire la discrimination. Son successeur, le Centrafricain Abbas Tolli n’a pas poursuivi l'œuvre de son prédécesseur. Ce dernier a tout simplement rangé dans les placards le travail commencé par Abaga Nchama.