Au lendemain de la tentative du coup d’Etat de 1984, les priorités du président Paul Biya ont changé. Celui qui prêchait le bonheur pour tous, va se concentrer uniquement sur le renforcement de son pouvoir. Malgré la colère montante dans son cercle, Paul Biya a rejeté catégoriquement l’option d’une éventuellement élimination physique de son maître politique. La journaliste Fanny Figeaud raconte la suite des évènements dans ouvrage "Au Cameroun de Paul Biya" dont nous vous proposons quelques extraits
Beaucoup reprochaient aussi à Biya d’avoir tardé à réagir face à Ahidjo et d’avoir durablement mis le pays en danger. Mi-1985, le célèbre avocat anglophone Fon Gorji Dinka l’a dit dans un « appel », qui lui a valu d’être arrêté par la police : «Après que Ahidjo se fût déclaré en guerre contre le président Paul Biya, l’intérêt du pays exigeait qu’un ennemi aussi dangereux et aussi riche soit arrêté et totalement neutralisé par tous les moyens en notre possession. M. Paul Biya était-il mu par l’intérêt du pays quand il a préféré organiser la sortie d’Ahidjo du pays? À l’évidence, le président Paul Biya savait qu’il donnait ainsi à Ahidjo l’occasion de retrouver sa fortune mal acquise ainsi que ses amis de l’étranger. À l’évidence, il savait aussi qu’Ahidjo organiserait avec de telles ressources une tentative pour renverser ou déstabiliser notre gouvernement.
Aujourd’hui, tout le pays et surtout nos forces armées vivent dans un climat d’alerte perpétuelle pour empêcher les agents d’Ahidjo d’assassiner le président Paul Biya pour des motifs personnels ».En outre, la situation économique semblait se dégrader: en1985, Mongo Beti décrivait un pays en mauvaise santé, sans projet, rongé par la corruption, le clientélisme, l’enrichissement illicite, le manque de conscience professionnelle: « Les services publics sont en voie de paralysie. Des bureaux de poste, par exemple, dans certaines grandes villes, ont été transformés en buvettes et les fonctionnaires refusent d’accueillir les usagers ou les rabrouent, à moins qu’ils ne les rançonnent. (...) Le système hospitalier a définitivement sombré dans le gouffre de la gabegie ». Preuve de la dégradation du climat social : en novembre 1985, les taxis de Douala ont lancé une grève pour protester contre les tracasseries policières dont ils étaient sans cesse l’objet.