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Succession : Une veuve poursuivie pour avoir reconstruit une case familiale

Image illustrative

Sun, 21 Aug 2022 Source: Kalara

Les membres d’un foyer polygamique se battent pour les biens hérités de leur parent, et dont la justice tarde à arrêter les modalités de partage. En attendant, chacun tente de s’assurer la part du lion.

Le torchon brûle entre les ayants-droit supposés de Jean-Baptiste, décédé le 6 juin 2012. Au centre des tensions, la gestion du vaste patrimoine légué par le défunt. C’est Fabien, l’un de ses fils issus du deuxième lit, qui a en effet saisi la justice au moyen d’une citation directe déposée au Tribunal de première instance (TPI) de Yaoundé centre administratif. Il reproche à Jeanne, la troisième veuve de son père, les faits présumés de destruction, troubles de jouissance et violation de domicile. La mise en cause plaide non coupable et comparaît libre. Le tribunal a prévu de départager les parties le mois prochain, sauf report.

Le 12 août dernier, Fabien a expliqué que la procédure judiciaire en vue de l’ouverture de la succession de son père est pendante à la Cour suprême. Entre temps, la justice a placé les biens appartenant à la famille entre les mains d’un administrateur-séquestre. C’est ce dernier qui est en principe chargé de gérer provisoirement lesdits biens en attendant un partage définitif entre les ayants-droit de Jean-Baptiste. C’est donc l’administrateur-séquestre qui procède au recouvrement des loyers et redistribue le produit de la collecte aux membres de la famille.

Bailleresse

Mais, Fabien s’insurge du fait que Jeanne a détruit un studio qui était en location, qu’il dit avoir construit avec sa mère. Et l’accusée y aurait érigé un immeuble d’un étage, dont elle est bailleresse. Il dit craindre que cet acte ne perturbe le partage le moment venu. Il n’a pas manqué de signaler que l’acte de mariage contracté entre son défunt père et la mise en cause a même été annulé pour cause de bigamie. Cette décision a néanmoins accordé à la dame la «putativité». Ce qui signifie que la mise en cause ne peut exclusivement bénéficier que d’une partie de biens qu’elle a eu à fonder avec le défunt dans le cadre de leur mariage annulé.

Après l’audition du plaignant, le ministère public a suggéré au tribunal d’abandonner l’infraction de violation de domicile estimant que les faits ne sont pas établis, mais d’entendre Jeanne sur les deux autres infractions, notamment la destruction et les troubles de jouissance. Le tribunal l’a suivi.

Pour sa défense, Jeanne a crié à l’indigence pour se tirer d’affaire. Elle dit avoir fait sept enfants avec feu son mari qui l’a épousée il y a plus de 30 ans sous le régime de la polygamie comme la mère du plaignant. S’agissant de la maison querellée, elle déclare que c’est Rosalie, la première femme du disparu, dont le mariage était scellé sous le régime de la monogamique, qui a en réalité construit la bâtisse litigieuse.

En effet, Jeanne raconte que lorsque le chef de famille l’a prise pour épouse, la gestion du studio litigieux lui a été confié pour qu’elle puisse subvenir à ses besoins. Elle a ensuite ouvert un bar dans une partie du studio, l’autre partie a été mise en location. Elle affirme que les subsides qu’elle est sensée recevoir de l’administrateur-séquestre sont plutôt rares. C’est la raison pour laquelle elle a décidé d’aménager le studio querellé, qui était en piteux état, en construisant l’étage par soucis de rentabilité. «Quand j’ai construit l’étage, c’est pour obtenir une ration alimentaire et élever mes enfants. Mon mari m’a laissé les biens pour que je puisse manger», a-t-elle confié.

Acharnement

«Avez-vous eu l’accord du conseil de famille avant de construire cet étage ?», interroge l’avocat du plaignant. La veuve va répondre par la négative, avouant finalement que c’est en riposte aux agissements de Fabien et un de ses frères de même mère qu’elle a engagé les travaux contestés. Elle accuse ces enfants, l’un, de brader les terrains de la succession et l’autre, d’avoir aussi construit un local pour loger sa belle-famille, sans autorisation de la famille. «Si maintenant on vient à partager les biens : qu’est-ce qui vous dit que cet endroit vous reviendra ?», interroge le ministère public. L’accusée va répondre que la maison revient à ses enfants.

Lors de ses réquisitions finales, ministère public a sollicité la condamnation de Jeanne au motif qu’elle a d’autorité décidé d’accaparer les biens de la succession pour se rendre justice, alors que lesdits biens sont encore une copropriété des cohéritiers et placés sous séquestre. L’avocat de l’accusation lui a emboité le pas. Il a enfoncé le clou en trouvant que l’accusée a simplement voulu se venger des enfants de sa coépouse en agissant sans l’aval du conseil de famille.

A contrario, l’avocat de l’accusée a qualifié le procès intenté contre sa cliente d’«acharnement» et de «lynchage», qui vient après d’autres, et «rend compte du malaise qui règne au sein de cette succession». Il affirme que Jeanne «a transformé l’immeuble» parce qu’il tombait en ruine pour augmenter la rentabilité. Il indique que pour cette raison, on ne saurait donc parler de destruction, car l’action n’est pas dépréciative. Selon l’homme en robe noire, dans le cas d’espèce, il s’agit plutôt des «dépenses qui visent à améliorer le revenu et donner la plus- value». Il a conclu en demandant au tribunal de relaxer sa cliente, soulignant que la succession n’est pas encore liquidée. Verdict le mois prochain.

Source: Kalara