Une atmosphère de tension règne au sein du gouvernement camerounais depuis le week-end dernier. Alors que des rumeurs persistantes évoquent la démission de plusieurs ministres originaires du Grand Nord, notamment le ministre d'État Bello Bouba Maïgari et le ministre délégué Nana Aboubacar, les faits révèlent une situation plus complexe qui témoigne de possibles tensions internes au sein de l'exécutif.
Les spéculations ont commencé à circuler après la réunion du comité exécutif de l'Union nationale pour la démocratie et le progrès (UNDP), tenue le 28 juin 2025. Selon plusieurs sources proches de la formation politique, cette rencontre aurait été le théâtre de vives discussions sur la stratégie du parti au sein de la coalition gouvernementale.
C'est dans ce contexte que les noms de Bello Bouba Maïgari, ministre d'État chargé du Tourisme, et de Nana Aboubacar, ministre délégué auprès du ministre de l'Environnement, ont été évoqués comme ayant présenté leur démission. Une information qui a rapidement fait le tour des cercles politiques de la capitale.
Cependant, les faits semblent contredire ces rumeurs. Un membre du personnel du ministère du Tourisme, interrogé sous couvert d'anonymat, a formellement démenti ces allégations. "Le ministre Bello Bouba était présent au travail ce 30 juin", affirme cette source, précisant que le ministre a effectivement exercé ses fonctions normalement.
Toutefois, un détail troublant mérite d'être souligné : selon la même source, le ministre d'État a travaillé "sans son garde du corps" ce jour-là. Une situation inhabituelle pour un membre du gouvernement de ce rang, qui soulève des interrogations sur les circonstances de cette absence.
Cette anomalie prend tout son sens au regard d'informations concordantes faisant état de mesures exceptionnelles prises par les services de sécurité. Depuis lundi matin, les gardes du corps de plusieurs ministres originaires du Grand Nord seraient retenus au Secrétariat d'État à la Défense (SED), selon plusieurs sources sécuritaires.
Cette rétention des éléments de protection rapprochée concerne spécifiquement les ministres "qui auraient démissionné ou menaceraient de le faire", selon les informations recueillies. Une mesure préventive qui, si elle se confirme, révélerait l'existence de tensions réelles au sein de l'équipe gouvernementale.
Les raisons exactes de cette décision des services de sécurité demeurent floues. Aucune communication officielle n'a été faite par le SED ou la présidence de la République pour expliquer ces dispositions exceptionnelles. Cette opacité alimente naturellement les spéculations sur d'éventuelles craintes des autorités quant à la stabilité de l'exécutif.
La formation politique dirigée par Bello Bouba Maïgari traverse une période délicate. Allié historique du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC) au pouvoir, l'UNDP a toujours constitué un pilier important de la coalition gouvernementale, particulièrement dans la représentation des régions septentrionales du pays.
La réunion du 28 juin de son comité exécutif pourrait avoir été l'occasion de débats internes sur la stratégie du parti face aux défis politiques actuels. Les discussions auraient porté sur le positionnement de l'UNDP dans la perspective des échéances électorales à venir et sur sa place au sein de la majorité présidentielle.
Cette séquence révèle les mécanismes de contrôle mis en place par l'appareil sécuritaire camerounais pour surveiller les mouvements au sein de l'exécutif. La rétention des gardes du corps de ministres, même en l'absence de démissions effectives, illustre le niveau de vigilance des services de sécurité face à toute velléité de déstabilisation.
Ces mesures préventives témoignent également de la concentration du pouvoir sécuritaire autour de la présidence de la République, qui dispose ainsi d'un moyen de pression indirect sur les membres du gouvernement par le contrôle de leur protection rapprochée.
Alors que les rumeurs continuent de circuler dans les milieux politiques yaoundéens, l'absence de communication officielle entretient le flou sur la réalité de la situation. Ni la présidence de la République, ni les services du Premier ministre n'ont jugé nécessaire de faire une mise au point publique sur ces spéculations.
Cette situation rappelle les épisodes précédents de tensions gouvernementales au Cameroun, où les remaniements ministériels sont souvent précédés de périodes d'incertitude et de rumeurs contradictoires. La gestion de ces moments révèle les codes particuliers du système politique camerounais, où l'information officielle prime sur les spéculations, même les plus persistantes.