Tortures au Cameroun: Amnesty International signe et persiste !

Alioune Tine, Directeur Du Bureau L'Etat camerounais a refuté les conclusions du rapport d'Amnesty International

Mon, 31 Jul 2017 Source: cameroon-info.net

Selon le Directeur du bureau Afrique Centrale et de l’Ouest de l’ONG, Alioune Tine, Amnesty International n’est pas dans une logique de diabolisation des autorités ni des forces de sécurité.

Suite au dernier rapport d’Amnesty International, accusant d’armée camerounaise de torture et de violation des droits de l’homme dans la lutte contre Boko Haram, que le Gouvernement a qualifié d’apologie du terrorisme, l’ONG dit avoir tenté de rencontrer à plusieurs reprises les membres du Gouvernement camerounais, en vain.

Dans une réaction de son Directeur du bureau Afrique Centrale et de l’Ouest, publié par le site spécialisé sur les droits de l’homme, Hurinews, Amnesty International estime que les faits documentés qu’il dénonce devraient plutôt engendrer des actions allant dans le sens d’améliorer le fonctionnement de l’armée.

Car, «une armée qui torture n’est pas une bonne armée».

La réaction d’Alioune Tine: «Je m’attendais à une réaction dans laquelle le gouvernement camerounais tenterait de réfuter les résultats de la recherche menée par Amnesty International sur la base de contre-arguments sérieux et de preuves solides et concrètes. Malheureusement cela n’a pas été le cas. J’ajoute qu’Amnesty International a plusieurs fois donné l’occasion au gouvernement de répondre à ses allégations. Mais les autorités n’ont jamais réagi. Donc j’aurai davantage été satisfait si le gouvernement avait effectivement et en temps réel réagi à nos interpellations pourtant envoyées bien avant la parution de ce rapport, et qu’il essaie aujourd’hui de récuser en bloc sans argument.

Il est important que l’opinion publique camerounaise comprenne que c’est au mois d’avril, soit trois mois avant la publication du rapport, que nous avions écrit aux autorités pour leur présenter un résumé de nos constatations et solliciter une réaction de leur part. Mais nous n’avons jamais reçu de réponse.

Ensuite, du 20 au 26 mai 2017, j’ai moi-même conduit une délégation d’Amnesty International à Yaoundé pour recueillir le sentiment des pouvoirs publics concernant les conclusions de nos recherches qui, je le répète, n’étaient pas encore publiées. Mais aucun membre du gouvernement n’a accepté de nous rencontrer malgré les multiples demandes d’audience envoyées avant notre déplacement.

Pire, les autorités ont interdit une conférence de presse prévue par Amnesty International à Yaoundé le 24 mai dernier, au cours de laquelle nous avions l’intention de présenter des lettres et des pétitions adressées par plus de 310 000 signataires du monde entier, demandant au président Paul Biya de libérer trois étudiants condamnés à 10 ans de prison, uniquement pour avoir échangé une plaisanterie sur Boko Haram par SMS.

Tout au long de notre travail de recherche, nous avons demandé à rencontrer le président de la République, le ministre de la Défense, le ministre de la Justice, le ministre de la Communication, le ministre des Relations extérieures et des membres des forces de sécurité. Seuls le ministre de la Communication et le secrétaire général du ministère de la Défense ont accepté de nous recevoir, en février 2017. Confronté à une description détaillée des pratiques de torture en question, le représentant du ministère de la Défense a affirmé qu’elles ne relevaient pas de la torture, mais simplement d’une «exploitation approfondie».

En définitive, Amnesty International n’est pas dans une logique de diabolisation des autorités ni des forces de sécurité. Dans notre rapport, nous avons recueilli des informations sur 101 cas de personnes qui ont été détenues au secret et torturées, parfois à mort, par les forces de sécurité et les autorités camerounaises entre mars 2013 et mars 2017. Ces personnes, des civils, étaient souvent accusées, sans preuve ou sur la foi d’éléments peu concluants, d’avoir apporté leur soutien à Boko Haram. Le rapport montre que le recours à la torture dans le cadre de la lutte contre Boko Haram au Cameroun est aujourd’hui habituel et généralisé. Et cela nous le maintenons. Nous ne sommes pas là pour démoraliser l’armée camerounaise. Les faits documentés par Amnesty International devraient plutôt engendrer des actions allant dans le sens d’améliorer le fonctionnement de l’armée. Une armée qui torture n’est pas une bonne armée.

Si les allégations de torture ne sont pas prises en considération, cela risque de pourrir l’armée en son sein, de ternir l’image du Cameroun, et de maintenir un climat d’impunité, totalement contre-productif lorsqu’il s’agit de lutte anti-terroriste».

Source: cameroon-info.net