Tribunal militaire : l’affaire Martinez Zogo renvoyée au 27 mai 2024

Martinez Zogo Tribunal militaire : l’affaire Martinez Zogo renvoyée au 27 mai 2024

Tue, 7 May 2024 Source: Le Messager

Le motif évoqué est lié au fait que le tribunal se prononce sur les exceptions soulevées, notamment celle relative à la communication de la copie du dossier.

Au Tribunal militaire de Yaoundé, les débats achoppent sur l'absence de communication du dossier de la procédure à toutes les parties. Alors que le président du tribunal a annoncé l'ouverture des débats dans le fond, les conseils de la défense et des parties civiles ont fait front commun pour décrier l'inégale gestion des dossiers de procédure entre le commissaire du gouvernement et les avocats. Pourtant, tous sont concernés par le procès. Comment peut-on défendre nos clients sans savoir ce qui leur est concrètement reproché ? Comment peut-on aller en guerre sans armes pour se défendre, s’est interrogé maitre Jacques Mbuny, l’avocat du lieutenant-colonel Justin Danwe, ancien directeur des opérations de la Dgre. Pour lui tout comme pour les autres, il n’est pas question de poursuivre la procédure sans qu’ils n'aient reçu, au même titre que le commissaire du gouvernement, une copie du dossier. « Justement, nous estimons que c'est un préalable. Il y va des droits de la défense. Nous avons demandé que le dossier soit reproduit et que à tous les avocats des accusés, qu 'on puisse leur tenir une copie bien évidemment à nos frais. Donc, nous ne comprenons pas cette réticence à mettre ce dossier à notre disposition. Cela se fait par tout ailleurs. On ne va pas créer le droit au Tribunal militaire » , indique Me Mbuny.

A la réunion de concertation du 29 avril 2024 entre les avocats et le ministère public, la question avait été soulevée, mais sans suite favorable. Par contre, deux autres diligences posées ont été prises en compte. L’Etat du Cameroun, via la Direction générale de la recherche extérieure (Dgre) est cité civilement responsable dans la mort de Martinez Zogo, tout comme la liste des différents témoins a été communiquée à toutes les parties. Toute chose qui a fait croire au président du tribunal que l’on pouvait passer à l’étape des débats. Mais là, c’était sans compter sur la fermeté des avocats.

Pour se concerter, l’audience est suspendue pour 30 min. A la reprise, le président est ferme sur sa position. Le dossier peut être consulté et des notes prises. Mais pas question de le donner aux avocats. Un véritable recul de la démocratie, estime le bâtonnier maitre Charles Tchoungang, qui défend Jean pierre Amougou Belinga, le patron du groupe l'Anecdote. « C'est un recul énorme en ce qui concerne les droits de la défense au Cameroun que l'on puisse juger des gens en refusant qu 'ils aient copie du dossier. C'est un précédent dangereux pour les libertés, pour la défense, pour le barreau du Cameroun et pour les citoyens. Pourtant, jusqu 'ici, les textes qui sont prévus sont les textes d'ouverture. On ne comprend pas qu ' une pratique qui est courante dans toutes les juridictions du pays, dans toutes les cours d'appel y compris à la Cour suprême, ça ne se passe pas ici. Pourquoi on ne veut pas que l'on accède à toutes les pièces du dossier? Ce n'est pas seulement une question qui interpelle les avocats, mais ça interpelle aussi les citoyens » , explique Me Tchoungang.

Distraction

Pour le Commissaire du gouvernement Cerlin Belinga, les avocats feraient de la pure distraction. Pour lui, l’article 413 du Code de procédure pénale trancherait le débat. Celui-ci stipule: « lorsque l'accusé fait choix d' un conseil ou que le président lui en a désigné un d'office, ce dernier peut, à tout moment, prendre connaissance des pièces du dossier. Il est question de prendre simplement connaissance du dossier et non de l’avoir » . Or pour les conseils des accusés, c’est un article général. C’est plutôt l’article 172 qui devrait être appliqué dans le cas d’espèce. Il stipule que « le dossier de procédure est tenu à la disposition de l'avocat au cabinet d'instruction, 24 heures avant chaque interrogatoire ou confrontation » . Maitre Claude Assira défend l’Etat du Cameroun. « C'est à partir d'aujourd'hui que l'on commence à se demander s'il n' y a pas du louche. Quand les choses sont faites de façon simple, elles ont toujours été faites comme ça historiquement. La loi prévoit, mais vous tordez le cou à la loi en essayant d'induire le tribunal en erreur, en lui indiquant une fausse piste, c'est-à-dire de faux textes. Ça veut dire qu 'il y a quelque chose dans la coulisse que nous ne connaissons pas. Si le tribunal avait même voulu être loyal, s'il avait été sûr de sa position, il aurait rendu une décision qui laisse la possibilité à chacun de se faire son opinion » , explique Me C. Assira. Devant la fermeté des différentes parties, l’affaire a été renvoyée au 27 mai 2024 afin que le tribunal se prononce sur les revendications soulevées par les différents avocats.

Source: Le Messager