URGENT : Alain Fogue demande une libération immédiate des prisonniers politiques et leur dédommagement

Il a écrit à la Présidente de la Cour dd'Appel du Centre

Thu, 13 Apr 2023 Source: www.camerounweb.com

Depuis ce mercredi, on apprend la possible libération de Jean Pierre Amougou Belinga, incarcéré à Kondengui dans l’affaire Martinez Zogo. Au moment où ses soutiens annoncent un mouvement de victoire devant la Cour d’Appel, le détenu politique Alain Fogue saisit la présidente de la Cour d’Appel du Centre pour la libération immédiate des prisonniers politiques et leur dédommagement. Voici sa note à la Présidente.

« Madame la Présidente,

Au Cameroun, la justice est rendue au nom du peuple. Aussi, le peuple doit- il savoir qu'est ce qui se joue dans les décisions de rejets systématiques des requêtes d'habeas corpus des militants du Mouvement pour la Renaissance du Cameroun (MRC), formulées sur la base de l'Avis du Groupe de Travail sur la Détention Arbitraire (GTDA) du 4 novembre 2022 demandant leur libération immédiate et leur dédommagement.

1- La constitution de la république du Cameroun dispose dans son Préambule que, " Le Peuple camerounais, (...) affirme son attachement aux libertés fondamentales inscrites dans la Déclaration universelle des droits de l'homme, la Charte des Nations Unies, la Charte africaine des Droits de l'Homme et des Peuples et toutes les conventions internationales y relatives et dûment ratifiées(...)".

2- Le Cameroun a ratifié le Pacte International relatif aux droits civiques et politiques le 27 juin 1984.

3- Le Conseil des droits de l'homme des Nations Unies dont émane le Groupe de Travail sur la Détention Arbitraire (GTDA) a pour textes de bases la Déclaration universelle des droits de l'homme et le Pacte International relatif aux droits civiques et politiques . Par ailleurs, la Déclaration universelle des droits de l’homme est incorporée dans le Préambule de la constitution du Cameroun.

4- L’article 45 de la constitution du 18 janvier 1996 dispose que " Les traités ou accords internationaux régulièrement approuvés ou ratifiés ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve pour chaque accord ou traité, de son application par l'autre partie.".

5- Le Groupe de travail sur la détention arbitraire a, au cours de sa quatre-vingt-quatorzième session (29 août-2 septembre 2022), émis l'Avis n°63/2022 concernant les militants du Mouvement pour la Renaissance du Cameroun (MRC) arrêtés, détenus, jugés et condamnés lors des manifestations publiques des 27 janvier, 1er et 8 juin 2019, et du 22 septembre 2020. Parmi ces militants, ceux arrêtés, détenus et même jugés et condamnés en 2019 étaient déjà libres soit pour avoir purgé la totalité de leur peine soit à la suite de l'abandon des poursuites décidé par le pouvoir en octobre 2019. Dans les rangs de ceux arrêtés, détenus, jugés et condamnés à la suite des manifestations publiques du 22 septembre 2020, certains avaient été élargis avant les procès, d'autres ayant été condamnés étaient arrivés, ou arrivaient, au bout de leur peine. Cependant, plusieurs dizaines d’entre eux (62) étaient encore en détention le 4 novembre 2022 à la publication de l'Avis du Groupe de Travail sur la Détention Arbitraire.

6- L'Avis affirme au point 134 de son Dispositif que la privation de liberté des militants du MRC " est arbitraire en ce qu’elle est contraire aux articles 3, 9, 10, 19, 20 et 21 de la Déclaration universelle des droits de l’homme et aux articles 9, 14, 19, 21, 22 et 25 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et relève des catégories I, II et III. "

7- Au point 135 de l'Avis , "le Groupe de travail demande au Gouvernement camerounais de prendre les mesures qui s’imposent pour remédier sans tarder à la situation (...) et la rendre compatible avec les normes internationales applicables, notamment celles énoncées dans la Déclaration universelle des droits de l’homme et dans le Pacte.".

8- Au point 136 de l'Avis," Le Groupe de travail estime que, compte tenu de toutes les circonstances de l’espèce, *la mesure appropriée consisterait à libérer immédiatement les individus qui restent en détention et d’accorder à chacun (...) le droit d’obtenir réparation, notamment sous la forme d’une indemnisation, conformément au droit international.

Dans le contexte actuel marqué par la résurgence de la pandémie à coronavirus (COVID-19), et de la menace qu’elle représente dans les lieux de détention, le Groupe de travail appelle le Gouvernement à prendre des mesures urgentes pour assurer la libération immédiate des individus qui restent en détention.".

9- Et au point 137, de l'Avis " Le Groupe de travail demande instamment au Gouvernement de veiller à ce qu’une enquête approfondie et indépendante soit menée sur les circonstances de la privation arbitraire de liberté (...) et de prendre les mesures qui s’imposent contre les responsables de la violation des droits de ceux-ci.".

10- L'AVIS s'adresse à tous les officiels agissant au nom du Cameroun, qu'ils occupent des fonctions au sein de l'Exécutif, des fonctions Parlementaires ou judiciaires en vertu du principe PACTA SUNT SERVANDA de l'article 26 de la CONVENTION DE VIENNE sur le droit des TRAITES bien que selon l'article 5 (2) de la constitution du Cameroun, le Président de la République, " est le garant (...) du respect des traités et accords internationaux.".

11- Celui qui occupe présentement la fonction de Président de la République du Cameroun n'est pas contre les TRAITES ET CONVENTIONS ratifiés par le Cameroun et ne saurait sans désengagement officiel être contre l'exécution de bonne foi des obligations internationales du Cameroun. L'Avis du GTDA du Conseil des droits de l'homme de l'ONU étant basé sur la Déclaration universelle des droits de l'homme, elle-même incorporée dans le Préambule de la constitution du Cameroun, et le Pacte International relatif aux droits civiques et politiques, souverainement ratifié par la République du Cameroun ; il apparait donc que le Président de la République en sa qualité de " (...) garant (...) du respect des traités et accords internationaux.", AINSI QUE TOUT OFFICIEL AGISSANT AU NOM DU CAMEROUN, devait, agir promptement, sans aucune démarche préalable des militants du MRC. Or, il apparait clairement que dans cette affaire d'arrestations, de détentions et de condamnations irréversiblement illégales et arbitraires des militants du MRC, les officiels agissant au nom du CAMEROUN refusent par pure mauvaise foi de remplir leurs obligations internationales, commettant par leurs omissions de nouvelles violations des droits de l'homme.

12- L'inaction du Gouvernement suite à l'Avis du GTDA demandant la libération immédiate et le dédommagement des militants du MRC, pourtant contradictoire à son égard, a conduit ces derniers et leurs avocats regroupés au sein du Collectif Me Sylvain Souop, à saisir les juges de l'habeas corpus devant les Tribunaux de Grande Instance du Wouri à Douala, et du Mfoundi, à Yaoundé. Dans un Ponce-pilatisme judiciaire, les magistrats, saisis de ces requêtes d'habeas corpus, essaient de ne plus agir au nom de la République ni AU NOM DU PEUPLE CAMEROUNAIS MEMBRE DES NATIONS UNIES. Ils agissent contre leur serment de magistrat en prétendant que le juge pénal ne serait pas lié par l'Avis du GTDA, alors qu'il s'agit ni plus ni moins d'un manque de loyauté incroyable et d'une rébellion contre les lois. En effet, outre le fait que l'argumentaire juridique des requêtes formulées repose sur les articles 554 et 584 du Code de Procédure pénale (CCP ), il ne s'oppose pas à la mise en application de l'article 2 du Code Pénal camerounais par ces juges. En effet, celui-ci dispose, en conformité avec l'article 45 de la constitution, que " (...) Les Règles de droit international, ainsi que les traités dûment promulgués et publiés, s'imposent au présent Code, ainsi qu'à toute disposition pénale".

L'Avis du GTDA a justement pour base légale, entre autre, la ratification par le Cameroun le 27 juin 1984 du Pacte International relatif aux droits civils et politiques.

Madame la Présidente, sur la base de ce qui précède, au nom du peuple camerounais au nom duquel la justice est rendue ; sur la base des votre serment de magistrate, et eu égard à votre obligation de loyauté envers les parties, vous devez ordonner la libération immédiate des requérants ainsi que leur dédommagement. En le faisant, vous aurez appliqué la constitution et les lois de notre pays.

Vous permettrez au Cameroun de respecter ses engagements internationaux. Conformément à l'article 2 du Code Pénal, c'est l'obligation de tout juge pénal camerounais. Vous êtes juge pénal.

Recevez, Madame la Présidente, mes salutations distinguées.

Pr Alain FOGUE TEDOM»

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