Cette semaine, la série l'argent des Africains met le cap sur Douala, au Cameroun, d'où Nke, 32 ans, chargé de clientèle dans une compagnie d'assurances, nous parle de son quotidien et de ses dépenses. Il nous dit tout dans ce nouvel épisode.
Sourire en coin, cheveux courts, portant souvent la veste, Nke se dit « bien loin du SMIG camerounais, qui est de 36 250 F CFA (55,10 euros, ndlr) ».
100 000 francs CFA de salaire, soit 152 euros.
« J’ai un revenu moyen par rapport au commun des Camerounais », estime celui qui gagne 100 000 francs CFA (152 euros) chaque mois.
Ses années d’étudiant sans le sous sont loin, elles aussi, quand, entre 2006 et 2007, il suivait un BTS en comptabilité et gestion des entreprises au sein du Groupe Tankou enseignement supérieur de Bafoussam, dans l’ouest du Cameroun.
« Bien que je ne m’épanouisse pas assez à mon goût, je parviens quand même à survivre », confie-t-il avec humilité, avant de renchérir, toujours aussi philosophe : « Je m’en réjouis parce que ce n’est pas tout le monde qui peut se loger, se nourrir, se vêtir ou se soigner aisément ».
Avant d’être chargé de clientèle dans une compagnie d’assurances de Douala, Nke, qui revendique cinq années d’expérience professionnelle dans la comptabilité, occupait un poste dans une société de quincaillerie. Là, il effectuait des tâches de « saisie des opérations comptables, traitement de la paie et suivi des dossiers du personnel », entre autres responsabilités.
Pourquoi n’y travaille-t-il plus ? La réponse est dans détour : « J’aspire toujours au mieux-être, explique-t-il. Nos besoins grandissant toujours plus, il faut trouver des solutions pour les satisfaire ».
Toutefois, poursuit-il, « il n’y a pas que l’argent qui m’a contraint à quitter mon boulot, ce sont aussi les conditions dans lesquelles je me trouvais ». Il se souvient avec amertume que son « dernier congé après plusieurs années de service a été suivi d’un renvoi ». Et Nke de tenir un discours très dur sur la condition des salariés dans son pays : « Nous vivons dans un contexte où l’employé est à la merci de son employeur, sans vie de famille. En toute impunité ». Prenant un air affligé, il s’interroge : « comment s’épanouir ? »
Nourriture : 46 euros
Pour se nourrir, Nke dépense chaque mois 46 euros, soit 1 euro 50 par jour. « Le petit-déjeuner me coûte 200 F CFA (30 centimes d’euro). Je mange pour 500 francs à midi (76 centimes d’euro) et 300 (46 centimes d’euros) au dîner ». Souvent, renchérit-il, « je fais la cuisine. Dans ce cas, je dépense 1500 (2,3 euros), voire 2000 francs (3 euros) pour deux jours ».
Loyer : 46 euros
Nke habite Yassa, un quartier de Douala : « Je suis en location dans un appartement, j’ai une chambre et un salon. C’est un quartier encore en construction. Il y pousse de belles maisons mais la route n’est pas encore bitumée. Les piétons et les automobilistes se disputent le trottoir à cause des nids-de-poule sur la chaussée ».
Répartition des dépenses de Nke
Nke débourse chaque jour entre 0,50 et 0,60 euros (« en fonction des négociations ») en taxi-moto (également appelé « benskineur » au Cameroun) pour rejoindre son lieu de travail. Ce moyen de locomotion lui permet de s’y rendre en cinq minutes seulement. À pieds, cela lui prend 20 minutes. En tout, ses déplacements lui coûtent 15 euros par mois.
Épargne : 30 euros
Tous les mois, Nke met 30 euros de côté en prévision du jour où il se mariera, mais également pour fonder sa propre entreprise de quincaillerie. Pour y arriver, et compte tenu de ses maigres moyens, il est conscient qu’il ne doit « pas faire trop de cadeaux, ni soutenir les amis ou la famille ».
« Sauf en cas de maladie grave, bien sûr, ou de deuil », s’empresse de préciser Nke. « Sinon, je dois à chaque fois recommencer à épargner. Une épargne qui évolue en dents de scie »…
Divers : 15 euros
Ce n’est que très exceptionnellement que Nke renouvelle sa garde-robe : « Mon salaire ne me permet pas d’acheter régulièrement des vêtements ». Les loisirs sont limités, eux aussi : « Pas de voyage, pas de sortie ou de balades à la plage », explique Nke, qui est « absorbé par le travail du lundi au samedi, de 8 h à 18h, [ses] jours de repos étant les dimanche et les jours fériés ». En espérant que le jour où il aura sa propre société, il pourra « s’épanouir », comme il aime à le répéter.