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Vaste enquête au cœur de la production des cartes d’identité ; fuite de choquantes révélations

Ce document officiel devient une denrée rare

Tue, 10 Jan 2023 Source: camer.be

Le phénomène de la non délivrance des cartes nationales d’identité a occasionné assez de désagréments auprès des citoyens camerounais. Nos confrères de camer.be ont entrepris une enquête dans ce phénomène scandaleux. Voici ce qui en ressort.

« Patientez madame, nous allons fouiller votre carte », indique un officier de police. Elsa. M est venue vérifier à quel niveau se trouve sa carte d’identité au commissariat de Nkometou. Plusieurs autres usagers se trouvent dans la même situation. Une dizaine de minutes plus tard, d’un geste de la main, l’officier de police récupère leurs récépissés. Assis sur un banc à la véranda, ils attendent impatiemment.

« J’espère que ma carte est sortie cette fois », murmure Elsa, avec un regard ennuyeux. Tout près d’elle, Olivier veut se faire établir une carte. « Ça peut mettre combien de temps pour obtenir sa carte », demande-t-il. Le regard anxieux, ils répondent : « À chacun sa chance ». « Moi je suis déjà à 16 mois et toujours pas de carte. Je ne sais vraiment pas quoi te dire », lui dit Gaëtan en lui présentant son récépissé. Seulement trois des personnes assises sont entrées en possession de leurs cartes.

« Vos cartes ne sont pas encore disponibles », indique l’officier en leur remettant les récépissés avec des dates prorogées. « Humm, jusqu’au 30 mars 2023 », s'exclame l'un des usagers. Avril 2019. C’est la date de délivrance qui figure sur le récépissé de Joséphine A. Trois ans déjà que la dame est en attente de sa carte nationale d’identité (CNI). Les dates de validité du récépissé ont été prorogées à plusieurs reprises. A sa dernière visite au commissariat au mois de mai 2022, son récépissé a été prorogé jusqu’à obtention de la carte nationale d’identité. « Je suis vraiment dépassée par cette histoire de carte d’identité. La première a atteint la date d’expiration, il fallait juste refaire une autre. Je ne sais pas ce qui cloche. Je suis fatiguée de faire des allers retours à tout moment au commissariat », se lamente la jeune femme. « Nous n'avons même pas d'explication sur ce retard dans la délivrance de nos CNI. Je suis allée dans le site de la DGSN, on me dit en cours de traitement. Avoir cette pièce, est un véritable calvaire », ajoute-t-elle.

Difficultés bancaires

Comme cette enseignante, d’autres citoyens camerounais vivent la même situation. Au commissariat du 6ème à Etoudi le 05 janvier 2023, des gens entrent et sortent. Sur la façade donnant sur la voix, des listes des pièces disponibles sont collées. Certains viennent se faire établir une carte d’identité, d’autres viennent pour retirer. C’est le cas d’Ismaël. Il est venu vérifier si sa carte est disponible.

« Je rentre un peu déçu. Je pensais obtenir avec ma CNI aujourd’hui mais ce n’est pas le cas », confie-t-il tout triste. Warren Mbella est mécontent du phénomène des allers et retours qu’il vit depuis près de deux ans. Le visage serré, le jeune démarre sa moto. « C’est le même refrain. Votre carte n’est pas encore disponible. Nous sommes régulièrement interpellés lors des contrôles routiers pour défaut de CNI ou récépissé non-valide. Je suis fatigué de cette situation. Je reviendrais le jour où bon me semble. Ça ne vaut pas la peine de respecter les dates qui sont données », s’indigne-t-il. Obtenir la carte d’identité, pièce permettant à toute personne d’être identifiée comme citoyen camerounais est un véritable parcours du combattant. L'attente se fait de plus en plus longue.

« Je n'ai plus l’âge de faire les concours. Je ne me gêne plus à faire le défilé au commissariat. Cela fait deux ans et la réponse est toujours la même. Votre carte n’est pas encore sortie. Repassez dans trois mois. Je suis fatiguée », confie Virginie Menye. Pour Sylvie Nka, les écritures sont presque illisibles. Son récépissé a été prorogé quatre fois, mais elle n’a toujours pas de succès avec sa carte d’identité.

« Je pensais que changer la carte ne mettrait pas assez de temps. La première a atteint la date d’expiration. Cela fait deux ans. Le comble c’est que certaines personnes ont fait des cartes après moi et celles-ci sont sorties. Je ne comprends pas ce système », s’irrite la jeune femme. « Je rentre une fois de plus bredouille. Je ne sais pas quel est le problème avec ma carte d’identité. J’ai même envoyé une photo de mon récépissé sur l’un des numéros WhatsApp indique pour savoir ce qui ne va pas, je n’ai pas obtenu de résultats », indique Monique. Et d’ajouter : « Cette fois, la date de validité du récépissé est prorogée jusqu’à l’obtention de la CNI. Anicet déplore également ce fonctionnement.

« J’ai rédigé une requête pour savoir quel était le problème avec ma CNI, malheureusement elle n’a pas abouti. J’ai décidé de faire une autre carte et la situation est toujours sans changement. J’ai appelé le numéro vert sans succès. Je ne sais plus réellement quel est le problème ». Une situation qui gêne les citoyens camerounais et est source de quelques difficultés. « Il est très compliqué aujourd’hui de faire des transactions bancaires sans l’original de la CNI. Surtout en ce qui concerne les retraits et d’autres types de transactions », explique un usager.

« Dans le compte, seuls les dépôts d’espèces ne subissent pas trop de tracasseries. Qu’on soit simple usager ou agent de l’état le défaut de CNI est un véritable cauchemar », ajoute-il tout furieux. Il en est de même avec l’identification avec les opérateurs de téléphones mobiles. « Il faut aller se faire identifier à chaque fois que la date de validité du récépissé est prorogée de peur de voir sa ligne être suspendue. C’est une situation pénible et difficile à vivre », confie Jean Martin. Isabelle Feudjeu a vu son compte orange Money être bloqué et interdit de toute opération.

Double identité

Dans des commissariats, les différents responsables n’ont pas souhaité s’exprimer à ce sujet. « Les gens viennent retirer leurs cartes. Je n’ai rien d’autres à vous dire. Consulter les listes et les affiches sur le mur », a renseigné un officier de police au commissariat de Ngoa-Ekelle. Dans le couloir principal du commissariat du 6ème à Etoudi, quelques affiches sont visibles sur le mur. Les motifs et les procédures à suivre selon chaque cas. On peut lire sur celles-ci « double identité », « triple identité » ; « date de naissance mal saisies », « noms des parents différents ».

Source: camer.be