Suzanne Messina 39 ans, a vu sa vie basculer après une tentative d'émigration ratée vers l'Europe. Partie le 30 novembre 2017 de Yaoundé au Cameroun pour kano au Nigeria, avec son fils de 6 ans, la vendeuse de vêtements n'a pas atteint l'Italie qui devait lui ouvrir les portes de l'Europe.
Pour voir concrétiser son rêve européen, elle avait payé 1,2 millions FCFA (1800 euros) à un passeur malien installé en Libye.
"J'avais payé 1,2 millions FCFA pour ce voyage. C'était toutes mes économies. Nous n'avons pas eu la chance d'entrer en Italie. Le moteur de notre embarcation avait coulé en pleine mer. Nous avons appelé des secours ce sont les lybiens qui sont venus nous sauver", explique la mère de trois enfants dont l'aîné, est musicien.
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La jeune femme est toujours déterminée à s'installer en Europe.
"Si je dois recommencer, je le ferai. Je n'hésiterai pas. Mais ce ne sera plus par la route. Ce sera de manière légale. La vie est difficile ici au pays", indique t-elle.
Pour justifier sa détermination, Suzanne explique qu'il lui est difficile d'exercer son commerce. "Les impôts sont sans pitié ici. Mes sœurs qui sont en Europe, elles investissent ici rapidement. Elles ont des grandes maisons".
Parcours du combattant
Suzanne a quitté le Cameroun dans un groupe de trois personnes. À kano le petit groupe a rejoint un autre constitué de 30 émigrants de plusieurs nationalités.
"Après kano au Nigeria, nous avons rejoint le Niger par moto après une semaine au désert. Nous marchions en évitant les barrages de police, des algériens sont venus nous chercher à la frontière. En Algérie, nous avons passé deux semaines dans un village appelé DebDeb. C'est même à DebDeb que le vrai voyage commence", explique Suzanne.
Ensuite d'autres passeurs sont venus nous chercher pour la Libye. Nous sommes rapidement tombés sur la police. Après la fouille, les policiers nous ont tout pris."
Vie d'esclaves
"C'est au désert qu'on vous vend. Si vous tombez sur des acheteurs d'esclaves, vous êtes vendu" , explique la jeune femme.
Elle poursuit, " moi j'étais là seule femme du groupe. Le chef voulait coucher avec moi. Les hommes travaillaient dur. On les frappait avec des longs tuyaux. J'ai plusieurs fois refusé de coucher avec le chef. Il me frappait aussi. Il a même donner l'arme à mon fils en lui demandant de tirer sur moi. Mon fils a refusé. Les autres émigrants m'ont conseillé de coucher avec le chef pour que nous puissions continuer le trajet. J'avais finalement cédé".
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" Lorsque notre embarcation est tombée en panne, nous avons été ramenés en Libye. C'est là que nous avons fait la connaissance d'un responsable qui venait pour faire établir les laisser passer. Ils nous ont rapatriés vers le Cameroun", fait savoir Suzanne M.
Réintégration
"À l'aéroport de Nsimalen nous avons reçu tous les examens. Nous avons été pris en charge par les autorités camerounaises et l'Office internationale pour les migrations".
"La reintégration n'a pas été facile. Ils m'ont d'abord donné 65 000 FCFA (100 euros) puis nous avons reçu un appui de près de 600 mille FCFA (environ 1000 euros ndlr) pour lancer mon projet. J'ai choisi l'élevage des porcs".
Suzanne tient désormais un élevage de 4 porcs à Okoa Maria, arrondissement de Mbankomo, département de la Méfou-et-Akono situé à 25 km au sud-ouest de Yaoundé, la capitale du Cameroun
Suzanne attend une autre aide de l'OIM qui va permettre à son fils de 6 ans de reprendre le chemin de l'école. Avec le financement de l'Union européenne, l'OIM appui les retournés à réintégrer la société.
L'initiative conjointe UE-OIM de 2 milliards par a déjà permis la réintégration 1 902 retournés.