En attendant les conclusions des enquêtes de la gendarmerie, et des experts venus de Yaoundé, le délégué du gouvernement accuse l’entreprise Enéo et la vétusté du bâtiment. D’aucuns veulent au contraire y voir une manière d’effacer des malversations.
La voix la plus autorisée de la Région du Littoral ne cache pas son étonnement. « Le seul fait que l’incendie se soit déclaré dans les services financières crée la polémique. Il faut une enquête approfondie, c’est la raison pour laquelle des enquêtes seront menées à trois niveaux.
Il y aura d’abord une enquête technique sur le bâtiment. On y associera les experts d’Eneo, ceux du ministère de l’Eau et de l’Energie, les sapeurs pompiers ainsi que ceux de la communauté urbaine de Douala. Nous prévoyons également une enquête financière et administrative approfondie pour déterminer la nature des dossiers et documents brûlés », tone le gouverneur de la Région du Littoral.
Joseph Beti Assomo n’est pas le seul à être interloqué face à cet incendie qui a ravagé entre 40 et 50 % les locaux de l’hôtel de ville de Douala. « Monsieur le délégué, croyez-moi, j’ai suivi les voix les plus respectueuses de notre ville dire que cet incendie n’est pas naïf et qu’il s’agit, ni plus ni moins, d’une manière pour la communauté urbaine d’effacer les traces des détournements.
Pouvez-vous nous dire la vérité ? » Questionne Cyrielle Etoundi, grand conseiller à la communauté urbaine de Douala (CUD), lors de la rencontre entre le délégué du gouvernement et les grands conseillers le 8 avril.
Le délégué du gouvernement auprès de la CUD soutient que les causes de l’incendie qui a consumé la quasi-totalité des services financiers, des ressources humaines, de la division de la communication et des archives entre autres et s’est arrêté net devant son cabinet se trouvent ailleurs.
« Il n’y a que des esprits naïfs qui peuvent croire que pour fuir un contrôle ou cacher les traces de détournement, on met le feu. Nous sortons de la plateforme de lutte contre le désordre urbain et lors de ces travaux, il a été dit qu’au cours du mois de mars, Douala a enregistré 104 incendies. Cela dit, pour notre bâtiment, il faut interroger cette recrudescence des incendie qui sont à 75 % causés par le courant électrique », argumente Fritz Ntonè Ntonè.
Le super maire de la capitale économique poursuit : « Lorsqu’on a construit ce bâtiment en 1956, il y avait moins de 25 personnes qui travaillaient ici. Or, la ville a grandi, les effectifs des employés ont augmenté et l’immeuble a été subdivisé en plusieurs bureaux avec du contre-plaqué. C’est pour cela que les flammes ont vite tout ravagé. Il y a trop de surcharge, le courant n’aime pas ça ».
Hors des murs de l’hôtel de ville, Charly Penda, un employé de la CUD, a sa lecture. Le mois dernier, indique-t-il, il y a eu un contrôle du ministère des Finances qui a révélé que plusieurs employés de la maison ont des faux diplômes.
En plus, « c’est curieux tout de même. Cet incendie arrive au moment où dans nos couloirs, se raconte une anecdote du délégué du gouvernement qui vient de rétrograder M. Endaman, un neveu du directeur du cabinet civil à qui le délégué a donné de l’argent pour le directeur du cabinet civil et le commissionnaire est accusé d’avoir soustrait 10 millions sur les fonds qu’il transportait. C’est un aspect à prendre en considération », souffle un autre agent de la maison.
Mais, indique le grand conseiller Cyrille Etoudi, « je ne dis pas que tout ce qui se passe à la CUD est net. Mais depuis trois ans, nous avons le système Simba qui nous avait été donné par l’Association internationale des maires francophones et qui fait que, pour que vous détourniez de l’argent de la CUD, il faut être ingénieux. »
L’incendie du 6 avril dernier à 23h à la CUD a marqué les sapeurs pompiers. « Cela fait des années que je fais ce métier mais, ce que j’ai vu était extraordinaire. Le feu allait très vite, comme si on avait mis de la poudre à incendie. Nous n’avons rien compris », témoigne un soldat du feu.
Aux grands conseillers qui l’ont sollicité le 8 avril pour d’amples informations sur l’incendie à l’hôtel de ville, Fritz Ntonè Ntonè rassure : « Le point le plus névralgique, c’est le cabinet du délégué du gouvernement. C’est lui qui a des symboles, c’est le cœur de la ville. S’il avait brûlé, on aurait dit qu’on nous a enlevé le caleçon en public. C’est les bureaux des directeurs qui ont été touchés, tous les permis de construire sont ailleurs et au sujet du système informatique, nous venions de le confier à un prestataire pour qu’on le remplace pour un système up to date. Donc incendie ou pas, on allait le remplacer. »