En séjour "privé" en Suisse depuis mi- septembre, Paul Biya s'est résolu à rentrer au Cameroun le 21 octobre, plus d'un mois après, non sans faire claironner son retour par un communiqué officiel de la présidence précisant son heure d'arrivée et les aspects protocolaires avait regagné Yaoundé quelques jours auparavant. Etaient concernés le chef de la diplomatie Lejeune Mbella Mbella ; le conseiller spécial Luc Sindjoun ; le directeur du cabinet civil Martin Belinga Eboutou ou encore le patron du Conseil national de sécurité (CNS), Paul Atanga Nji. En mars, Biya était déjà resté longuement sur son lieu de villégiature après une visite officielle en Italie. Il y descend généralement avec la première dame Chantal Biya, leurs enfants ainsi que le personnel de domestiques et de sécurité. Une cinquantaine d'individus au bas mot !
Depuis sa suite, le chef de l'Etat, auquel seul son aide de camp Joseph Fouda dispose d'un accès direct, tient des séances de travail régulières. Ses collaborateurs effectuent des allers-retours Genève- Yaoundé avec les parapheurs en main. Ce fut le cas, début octobre, pour les secrétaires généraux Ferdinand Ngoh Ngoh (présidence) et Jean Nkuété (Rassemble- ment démocratique du peuple camerounais). S'il s'éternise en Suisse, le n°1 camerounais prend toutefois soin de ne pas dépasser quarante jours d'absence hors de son pays au risque d'enclencher la disposition constitutionnelle de vacance du pouvoir.
Tapisserie. Malgré la présence du docteur Philippe Elle Zoa à ses côtés - son médecin personnel Andela Assomo est décédé en avril 2015 -, il profite également de sa retraite helvétique pour effectuer des check-up réguliers. A 84 ans, Paul Biya fréquente de moins en moins la salle de sport de l'hôtel et limite les audiences privées. Le premier ministre Philémon Yang est contraint de faire tapisserie, masquant son ennui en parcourant les flancs du Mont Febé. Le chef du gouvernement ne reçoit généralement aucune "haute instruction" depuis Genève. Tout se passe au Palais d'Etoudi. Preuve de sa marginalisation, Yang, pourtant originaire de l'une de ces régions, a été peu impliqué dans la gestion de la crise avec les deux régions anglophones du pays. Paul Biya a préféré envoyer Ferdinand Ngoh Ngoh au front.