Voracité foncière: voici comment ils dépècent le Cameroun

Une manœuvre, estiment certaines langues, pour voler au secours de la coterie.

Sat, 12 Nov 2022 Source: La Nouvelle du 12-11-2022

C’est la question qui mérite aujourd’hui d’être posée au regard de la persistance des manœuvres ourdies par certains réseaux bien identifiés dans le sérail pour noyer le poisson de leurs malversations. Décryptage.

Ce qu’il faut dire d’emblée c’est qu’au lendemain de la célébration du 40ème anniversaire de l'accession à la magistrature suprême du président Paul Biya, la question de l'Etat de droit au Cameroun se pose avec acuité. En effet le chef de l’Etat, dans sa prestation de serment de novembre 1982 et de toutes celles qui ont suivi ses différentes réélections, n'a eu de cesse à s'engager à défendre et à renforcer l'Etat de droit au Cameroun. 40 ans plus tard, on constate à la faveur de faits précis et documentés que certains et non des moindres rament à contre contre-courant de ces idéaux et tentent même d'imposer un Etat de non-droit au Cameroun. Et pourtant, les vertus d'un Etat de droit sont suffisamment claires, à savoir assurer à chaque citoyen un plein épanouissement dans la paix, l'harmonie, la sécurité. L'Etat de droit permet en effet à chacun de jouir des libertés individuelles qui sont fondamentales telles que définies par la déclaration universelle des droits de l'Homme et du citoyen de 1789.

Ce cadre permet ainsi à chacun, dans son domaine, de jouir de sa propriété, d'aller et de venir, d'être protégé par la justice, de ne pas se voir privé de liberté de manière arbitraire, mais aussi de respecter le bien et la fortune communs par exemple. A l'inverse, comment se définit l'Etat de non-droit et que produit-il ? Selon certains observateurs avisés, l'Etat de non-droit peut-être résumé comme le non-respect de l'autorité souveraine et des règles établies. C'est un peu un retour à l'Etat de nature dont parle le philosophe Thomas Hobbes dans son ouvrage le Léviathan.

Ici, c'est la loi du plus fort qui prévaut. On foule au pied les lois qui garantissent les droits de l'Homme, c'est-à-dire les droits de chacun des citoyens in fine qui garantissent la paix. On sème l'intolérance, le non-respect mutuel. Le vivre-ensemble est menacé. Alors question : comment cela se traduit concrètement aujourd’hui, cet Etat de non-droit, devenu l’apanage de quelques délinquants à col blanc ? Pour répondre à cette question lancinante, deux constats sont faits : d'une part cette voracité foncière et immobilière qui écrase tout sur son passage et d'autre part cet incivisme fiscal et cette prévarication des fonds publics comme on le découvre dans la gestion chaotique et brumeuse de la ligne 94, avec pour corollaire le braquage du Trésor public.

Détournements des fonds

Pour ce qui est de la voracité foncière et immobilière, de nombreux observateurs n’hésitent pas à évoquer les dessous scabreux de l’acquisition du terrain qui abrite aujourd’hui l’«Immeuble Ekang » à Yaoundé. La succession Ndingue, régulièrement détentrice du titre foncier N°248/Mfoundi pour un terrain de 1 534 m2 s’est vue dépouiller en plein jour de son bien. Ceci, au profit d'une coterie mafieuse bénéficiant de soutiens en haut lieu, notamment le DCC . Cette main basse aura ainsi permis l'érection en ces lieux d'un immeuble au nom fumeux, « Immeuble Ekang », avec pour finalité de manipuler la communauté à laquelle il fait référence. Alors question : comment des hauts responsables de l'administration nommés par le président de la République peuvent-ils se rendre complices d'une telle violation ?

Difficile à dire. Concernant cet incivisme fiscal qui déconstruit aujourd’hui l’existence de l’Etat de droit au Cameroun, de nombreux observateurs sont aujourd’hui sans voix. Alors que des inspecteurs d'impôts formés pour collecter les recettes fiscales et veiller sur la fortune publique à travers une gamme variée d'actions dont les contrôles fiscaux, sont dans leurs missions, ils se sont vus accusés de tentative d'extorsion de fonds par ceux-là même qu'ils sont venus contrôler et à qui ils imposent un redressement fiscal - prévu par la loi - A la surprise générale, le MINFI, Louis Paul Motaze, la tutelle de la direction générale des Impôts, va ubuesquement commettre un abattement de près de 8 milliards de Fcfa.

Une manœuvre, estiment certaines langues, pour voler au secours de la coterie. Par ailleurs, pour ce qui est de la gestion catastrophique des lignes 65 du MINFI et 94 du MINEPAT devenues depuis des années l’épicentre des détournements massifs des fonds publics, le chef de l’Etat s’est trouvé dans l’obligation d’instruire un audit du contrôle supérieur de l’Etat (CONSUPE) dont l'une des missions est le contrôle de la gestion des deniers publics. Seulement, à la surprise générale, de curieuses voix vont s’élever pour tourner le gendarme de la fortune publique en dérision. On le découvre par exemple dans l’affaire Cabinet Atou-CONSUPE dans laquelle les inspecteurs d’Etat sont poursuivis au TPI de Douala parce que ceux-ci voulaient rempli leur devoir. Alfred Wambang Nyamalum, Aboubakary Modibo et Hassan sont aujourd’hui poursuivis pour des faits de « rébellion, abus de fonction, coalition contre les lois, trouble de jouissance, diffamation… ».

Seulement, il n’a échappé à personne que derrière ce procès contre les inspecteurs d’Etat, se cache en réalité un acharnement contre Ferdinand Ngoh Ngoh dont le péché une fois de plus est celui d’avoir transmis les hautes directives du chef de l’Etat pour enquêter dans la gestion d’un pion de la maffia. Pour nos observateurs, cette agitation du Cabinet Atou est loin d’être anodine. Elle a pour finalité de détourner le CONSUPE de sa mission afin de laisser libre cours au siphonage des caisses publiques.

Source: La Nouvelle du 12-11-2022