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Crise alimentaire : la pénurie d'engrais frappe les agriculteurs africains confrontés à la crise alimentaire

Crise alimentaire : la pénurie d'engrais frappe les agriculteurs africains confrontés à la crise ali

Sun, 3 Jul 2022 Source: www.bbc.com

Sous le soleil battant de Tanzanie, Lossim Lazzaro regarde nerveusement sa ferme.

Il verse lentement du fumier de bétail sur ses cultures, dans une ultime tentative pour les aider à pousser.

M. Lazzaro possède deux hectares de terre et était autrefois un producteur de tomates prospère dans le nord de la région d'Arusha. Mais aujourd'hui, comme beaucoup d'autres, il se bat pour maintenir son activité et ses cultures en vie, dans un contexte de pénurie mondiale d'engrais.

"Il m'est difficile d'obtenir des engrais sur le marché", explique M. Lazzaro.

L'engrais - l'ingrédient clé nécessaire à la croissance des cultures - fait défaut dans le monde entier. Les prix mondiaux ont également grimpé en flèche, en partie à cause du conflit entre la Russie et l'Ukraine.

"J'avais l'habitude d'acheter de l'engrais pour environ 25 $ (15 580 f cfa) le sac de 50 kg en 2019", se souvient M. Lazzaro.

"Mais le même sac coûte maintenant presque le double de ce prix. C'est extrêmement cher pour moi."

La quantité d'engrais disponible dans le monde a presque diminué de moitié, tandis que le coût de certains types d'engrais a presque triplé au cours des 12 derniers mois, selon les Nations unies.

Cela a un effet d'entraînement dans des pays comme la Tanzanie, où les agriculteurs sont dépendants des engrais importés.

"J'ai fini par acheter de l'engrais auprès d'un fabricant local, mais je dois toujours passer commande des mois plus tôt en raison de la pénurie", ajoute M. Lazzaro.

La crise alimente les craintes de pénurie alimentaire.

L'Afrique, qui utilise déjà la plus faible quantité d'engrais par hectare au monde, est particulièrement menacée.

Le manque d'approvisionnement aura inévitablement un impact sur le rendement des cultures, en particulier pour le blé qui nécessite beaucoup d'engrais et qui est essentiel pour nourrir des millions de personnes.

Le Programme alimentaire mondial (PAM) des Nations unies a averti que la pénurie d'engrais pourrait plonger sept millions de personnes supplémentaires dans la pénurie alimentaire.

Selon le PAM, la production céréalière en 2022 diminuera à environ 38 millions de tonnes, alors qu'elle était de plus de 45 millions de tonnes l'année précédente.

La Tanzanie, comme de nombreux autres pays africains, dépend des engrais de la Russie et de la Chine, les deux principaux fabricants mondiaux.

La Russie, qui fait l'objet de sanctions occidentales, produit de grandes quantités de potasse, d'ammoniac et d'urée.

Ce sont les trois ingrédients clés nécessaires à la fabrication d'engrais chimiques. Ils ont contribué à alimenter la révolution verte des années 1960, qui a permis de tripler la production mondiale de céréales et de nourrir des millions de personnes.

Selon les données de Rabobank, la Russie exporte environ 20 % des engrais azotés du monde et, avec son allié sanctionné, la Biélorussie, 40 % des exportations mondiales de potassium.

Le coût des engrais était déjà élevé à la suite des retombées économiques de la pandémie de Covid-19. Aujourd'hui, les sanctions contre la Russie et la Biélorussie, auxquelles s'ajoutent les contrôles des exportations en Chine, ont aggravé une situation déjà difficile.

La crise a laissé de nombreux pays africains, qui sont fortement dépendants des importations étrangères, se démener pour trouver des solutions.

La demande d'engrais produits localement est en hausse. Les petits agriculteurs du nord de la Tanzanie se tournent désormais vers des entreprises comme Minjingu Mines and Fertilizer Ltd, l'un des plus grands fabricants d'engrais du pays.

L'entreprise affirme qu'elle connaît une augmentation soudaine de la demande et qu'elle s'efforce d'honorer les commandes. Mais les patrons disent qu'ils sont incapables d'augmenter leur capacité en raison de la lourdeur de la fiscalité.

"Nous ne sommes pas sur un pied d'égalité avec les importateurs", a déclaré Tosky Hans, un directeur de Minjingu Mines and Fertilizer.

"Les fabricants locaux doivent payer beaucoup de taxes, alors que les importateurs n'en paient pas", a-t-il ajouté.

Comme dans de nombreux autres pays, les investisseurs étrangers reçoivent des subventions en Tanzanie pour attirer les investissements, tandis que les fabricants locaux paient des taxes fixes.

L'Alliance pour une révolution verte en Afrique (Agra), une organisation non gouvernementale qui promeut les solutions vertes sur tout le continent, estime que c'est l'occasion pour les agriculteurs de devenir plus autonomes.

Vianey Rweyendela, directeur national d'Agra Tanzanie, encourage les agriculteurs à se syndiquer et à former des coopératives. Une démarche qui, selon lui, pourrait leur permettre de s'exprimer sur les prix du marché.

"Cela leur permettra d'avoir un pouvoir de négociation et les engrais qui leur sont vendus seront abordables", affirme M. Rweyendela.

L'homme le plus riche d'Afrique, Aliko Dangote, a récemment mis en service une usine d'engrais au Nigeria, qui devrait produire trois millions de tonnes d'engrais d'urée par an.

Il pense que la garantie d'approvisionnement fera la différence.

"Commander des engrais et les faire arriver a été un grand défi pour les agriculteurs en Afrique et ils finissent par manquer leur saison de plantation", a déclaré M. Dangote.

"Avec le lancement de cette usine, nous allons nous assurer que les agriculteurs obtiennent les nutriments en avance".

Source: www.bbc.com